Archives mensuelles : août 2012

On ne s'évade pas du Temps

« J'ai deux montagnes à traverser,
Deux rivières à boire.
J'ai six vieux lacs à déplacer,
Trois chutes neuves à mettre au lit,
Dix-huit savanes à nettoyer,
Une ville à faire avant la nuit.
 »
(Félix Leclerc, chanteur et poète québecois, 1914-1988.)
Original : ce syndicaliste, contacté par mon chef hier par téléphone, dit avoir puisé une de ses stratégies dans L'Art de la guerre de Sun Tzu. Sur base du concept de « non-guerre » développé par le tacticien chinois (l'art de la guerre est aussi et avant tout celui de l'éviter), il a développé celui de « non-grève ». Exemple : continuer la production au sein d'une entreprise tout en bloquant les camions et donc la distribution. Un moyen de pression qui, dans certains cas, peut s'avérer gagnant : les stocks s'accumulent, les ventes se tarissent et le personnel continue à être payé.
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Débat sur Facebook, la journée. — Qu'est-ce que ça peut faire qu'elle ait un voile sur la tête, bordel ? — À jouer la carte de la laïcité là où il n'y a rien à défendre ni à combattre, on se retrouve à se faire des amis qui écrivent comme des éditorialistes de Minute !

Lu, à peu de chose près : « C'est communautariste de mettre ensemble quatre Arabes sur un tract. » — Ce ne sont pas des Arabes, ce sont des habitants qui s'impliquent dans la politique de leur commune (Molenbeek) au travers d'un des quatre partis traditionnels (le PS). Si quatre noms flamands avaient été sur un même tract, aurait-on mis en avant la dérive communautariste ?

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Dans le train, le soir. — Yama m'informe de la mort de Chris Marker, qui a eu lieu le 29 juillet 2012, à l'âge de 91 ans. Sans journal ni télévision pour m'informer de ce genre d'événement, je me retrouve à découvrir l'information avec un putain de décalage.

« Une fois sur la grande jetée d'Orly, dans ce chaud dimanche d'avant-guerre où il allait pouvoir demeurer, il pensa avec un peu de vertige que l'enfant qu'il avait été devait se trouver là aussi, à regarder les avions. Mais il chercha d'abord le visage d'une femme, au bout de la jetée. Il courut vers elle. Et lorsqu'il reconnut l'homme qui l'avait suivi depuis le camp souterrain, il comprit qu'on ne s'évadait pas du Temps. Et que cet instant qu'il lui avait été donné de voir enfant, et qui n'avait pas cessé de l'obséder, c'était celui de sa propre mort. » (La Jetée, 1962.)

Nostromo, Sulaco, Narcissus... Tous ces noms de vaisseaux appartenant au monde angoissant de la série Alien sont issus de l'univers de Joseph Conrad. D'aucuns ont essayé d'y trouver une signification particulière : ce serait en rapport avec le pessimisme radical qui transparaît tant dans Alien (?) que dans le roman Nostromo ; ou bien encore avec l'échec cuisant d'une quête effrénée de richesse et de pouvoir... — Mais il s'agit sans doute avant tout d'un clin d'œil au film précédent de Ridley Scott, The Duellists (1977), dont le scénario est tiré d'une nouvelle de... Joseph Conrad.

Ils sont en train de transposer Ender's Game, le chef-d'œuvre d'Orson Scott Card, au cinéma, avec Harrison Ford dans le rôle du colonel Graff et Ben Kingsley dans celui du grand Mazer Rackham, le vieux sauveur de l'humanité. Et dans le rôle d'Andrew « Ender » Wiggin ? Asa Butterfield ! Regard intelligent, sourire espiègle... Je dois avouer que le choix de l'acteur n'est vraiment pas mal. — Une crainte cependant : que cette fabuleuse histoire d'enfant brillant et tacticien de génie, dernier espoir de la Terre face à une probable troisième invasion d'extraterrestres du nom de Doryphores, ne devienne un mélange raté de Harry Potter et d'Avatar.

« Ce livre est extrêmement difficile à transposer en film. Du début à la fin, il est question d'entraînements en école militaire de plus en plus poussés... Jusqu'au final époustouflant où l'on se rend compte que... Ha, oui, c'est vrai, tu ne veux pas connaître la fin des histoires ! » Jusqu'au moment où Ender se rend compte que son entraînement final n'en était pas un et qu'il a mené et gagné une vraie guerre offensive et destructrice contre les Doryphores à l'intérieur de leurs propres systèmes solaires !

Wittgenstein aurait-il pu écrire ce qu'il a écrit s'il n'avait pas été un tyran égocentrique, une sorte d'enfant-adulte ? Ou plutôt : quelqu'un d'autre aurait-il pu développer la même pensée en étant globalement plus sympathique (plus « normal ») que lui, avec ses amis notamment ? Je pense que non (sans ce comportement perfectionniste et totalement monomaniaque, il n'aurait pas écrit ce qu'il a écrit). Yama, plongée actuellement dans sa biographie, pense au contraire que oui (cette pensée est possible et répond à des questions que nous nous posons ; elle aurait donc pu être développée par une toute autre personnalité).
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Léandra me rejoint vers 21 heures à la Maison du Peuple. Deux sujets occupent la discussion. En premier lieu, elle en a vraiment marre de Jonas et a vraiment décidé de ne plus entrer dans son jeu. Je suis d'accord avec le principe. Cette histoire devient éreintante pour tout le monde, d'abord pour Léandra évidemment, mais aussi pour son entourage immédiat. Il faudrait pouvoir secouer ce type une bonne fois pour toute et lui dire : « Prends une décision ! » et « Sois plus souple ! » (Et c'est moi qui dis ça ! Oui, oui, je sais : je ne manque pas d'air !)

Le second sujet concerne cette fameuse discussion sur Facebook, dans laquelle Léandra, tout en restant très calme, s'est pas mal impliquée, à l'inverse de moi. Elle m'explique : « Au début, je n'ai pas vu où était le problème. J'ai cru qu'il y avait sur le tract électoral une phrase du genre : "Dieu est avec nous" (ça s'est déjà vu)... Puis je me suis rendu compte que le problème pour lui, c'était que la dame était voilée et aussi, peut-être, qu'ils avaient tous les quatre des noms à consonance arabe. »

« Franchement, il se dit socialiste simplement parce qu'il se présente à Charleroi. Mais il pourrait tout aussi bien très vite passer à droite. Ça arrivera un jour, sans doute, tu verras, Hamil'. »

Léandra et moi sommes parfaitement d'accord sur le sujet, à savoir que ce genre de discours présenté comme « laïque » sert surtout et avant tout de défouloir pour les fachos nostalgiques de la Belgique de Degrelle (« Au moins, à son époque, l'ordre régnait Monsieur, et nous étions chez nous ! »).

Mais, pourrait-on me rétorquer, « et alors ? De nombreux sujets de société sont récupérés par l'extrême droite ! Faut-il pour cela renoncer à des principes comme la défense de la laïcité ou la lutte contre l'incursion du religieux dans la politique et les services publics ? » — Je n'ai pas de réponse à cette question. Rien n'est simple, comme dirait l'autre.

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Andrew nous rejoint après une très longue journée de travail. Il a passé ces dernières semaines à la rédaction d'un texte de géostratégie (je ne suis pas certain que ce soit le bon terme) en anglais pour un commanditaire qui semble avoir une idée assez précise de ce à quoi le texte devrait ressembler. — Décidément, écrire l'histoire sans contrainte extérieure est toujours loin d'être évident, quel que soit le milieu dans lequel on évolue !

« There ain't no sense in runnin' »

Trois heures du matin et des poussières. Je me réveille sous l'emprise de la chaleur. Pas d'air, juste la moiteur d'une nuit lourde et sans nuage... Impossible de me rendormir... Mes draps sont trempés et je respire difficilement... J'ai sommeil, pourtant ! Pour créer le courant d'air salutaire, je relève mes trois stores et ouvre grand la fenêtre de ma chambre. Une pensée morbide : et si, dans une crise de somnambulisme, je me jetais par la fenêtre, du haut de mon quatrième étage ? — Qu'à cela ne tienne : grâce au stratagème de la fenêtre béante et au courant d'air ainsi créé, j'arrive à me rendormir pour quelques heures.
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Au boulot, l'après-midi. — Alors que le continent américain se réveille en douceur, je reçois l'une après l'autre les réponses (positives) à mes demandes d'hébergement en auberge de jeunesse. Auberge alternative de Montréal : OK. Auberge internationale de Trois-Rivières (là où les magnifiques courbes du Saint-Maurice rejoignent le puissant Saint-Laurent, devant lequel le Grand Amazone lui-même s'avoue vaincu) : OK. Auberge internationale de Québec : OK. Auberge de jeunesse de Tadoussac : OK, mais les réservations ne se font que par téléphone. Auberge festive « Sea Shack » en Gaspésie : on s'en fout, on n'y va pas.
Pour être définitivement tranquille avec ces bêtes histoires de réservations, je prends mon courage à deux mains et téléphone outre-Atlantique, à la fameuse Auberge de Tadoussac, à l'aide de mon petit téléphone portable tout pourri. Lors du dernier voyage, je les avais joints depuis une des cabines téléphoniques de l'Auberge internationale de Québec et j'avais eu le plus grand mal à comprendre les questions que la demoiselle de l'accueil me posait. — C'était du français, mais les accents toniques étaient tellement déplacés par rapport au français de Belgique ou de France que l'ensemble était très difficile à suivre. (Je suppose que le même problème se posait à mon interlocutrice, à l'autre bout du fil.)
(Pour se rendre compte de la différence, une anecdote : lors de notre dernier voyage au Québec, plusieurs habitants n'ont pas fait la différence entre l'accent de Flippo, le mien et celui de deux Toulousains à la voix chantante rencontrés sur la route !)
Aujourd'hui, même problème... Un gars décroche avec un très fort accent québécois. Je sais qu'il vient de me dire quelque chose comme : « Auberge de Tadoussac, bonjour ! », mais je le devine plus que je ne le comprends. Je ne fais cependant pas la même erreur que la dernière fois et ne lance donc pas : « Allo ? Suis-je bien à l'Auberge de jeunesse de Tadoussac ? » mais plutôt : « Oui, bonjour, ce serait pour réserver deux lits dans votre auberge pour le mois de septembre... » Gros blanc puis : « Oui... » (Haha, je crois qu'il lui a fallu, tout comme moi, un certain temps pour comprendre la demande !) Il me dit de patienter et me met en attente. Dix bonnes minutes passent... Bonjour la facture de téléphone, mais je m'en fous ! Je poireaute, je poireaute et je finis par penser qu'il est parti rameuter tout le monde : « Hé ho, lo gars, v'nez donc écouter c'te drôle d'accint ! C't'in Belge ou in Frinçais, n'sais po trô ! », mais je me fais sans doute un film, comme d'habitude.
Il finit par reprendre le combiné et me demande mon prénom, mon nom et le numéro de ma carte de crédit. Il m'explique que si nous voulons aller observer les baleines, nous aurons un prix plus favorable en tant que clients de l'Auberge. Je lui réponds : « Oui, oui, on connaît ! Nous sommes déjà venus chez vous ! Nous avons même fait la balade aux castors avec Coco ! » Il raccroche, je raccroche. Je crois que nous avons réussi à communiquer et qu'il a bien réservé deux lits simples pour quatre jours. Je serai néanmoins beaucoup plus rassuré une fois sur place, en voyant mon nom sur le registre des arrivées.
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Ce ne sont plus les trompettes mais les grandes orgues que j'entends désormais ! — Diantre, je suis à l'avance sur mon blog ! Je suis à l'avance sur mon blog ! J'ai couru, couru pendant toutes ces années pour réaliser en fin de compte que l'origine de ma course était... moi-même ! Un homme doit faire ce qu'un homme doit faire et il n'y a aucune raison de courir sans cesse. Maintenant, je dois me retourner. Je dois me battre. Et surtout je dois marcher droit !

« Now wait there stranger! A man can run and run for year after year until he realizes that what he's running from is... hisself ! A man's gotta do what a man's gotta do, and there ain't no sense in runnin'. Now you gotta turn, and you gotta fight, and you gotta hold your head up high. Now you go back in, my son, and be a man: walk tall! » (Monty Python Flying Circus, « The Cowboy Interlude ».)

Ode à Trois-Rivières

« Trois-Rivières, ville algonquine presque quatre fois centenaire, berceau de l'implantation européenne en Amérique du Nord, capitale de la poésie, ville de science et de lettres !
» Trois-Rivières, dont les joyeux vallons, creusés par le vieux Saint-Maurice avant de se jeter dans le grand fleuve, laissent béat d'admiration le voyageur égaré !
» Trois-Rivières, dont les habitants — les "Trifluviens", le savais-tu ? — arborent en permanence un sourire qui n'a son pareil nulle part ailleurs dans la Belle Province !
» Trois-Rivières, bordée par le Saint-Laurent, voie navigable qui a servi de porte d'entrée triomphale à l'exploration sans limite du continent nord-américain ; cours d'eau impérial dont le débit dépasse de loin celui du Nil !
» Trois-Rivières... Écoute comme ce nom coule ! Écoute-le résonner à l'intérieur de ton esprit, tel le béluga nageant majestueusement au gré du courant et des marées !
» N'as-tu donc jamais observé, Hamilton, le soleil de septembre se coucher sur le lac Saint-Pierre ?
» N'as-tu jamais vu ces terrasses se remplir au premier rayon de soleil estival ?
» N'as-tu jamais entendu vibrer la ville lorsque, au gré des saisons, des groupes itinérants envahissent les rues, les esplanades et les terrasses pour jouer une musique qui, longtemps après son évaporation, bercera ton cœur ?
» N'as-tu jamais senti le souffle léger du vent du Sud-Ouest effleurer ta peau avec amour ; avec la même délicatesse que l'abeille butinant la rose au crépuscule ?
» N'as-tu jamais touché ces anciens murs de pierres préservés du grand incendie ? — Leurs aspérités sont aussi douces que la rosée glissant sur la feuille d'érable au petit matin...
» Tonnancour, Saint-Quentin, Laviolette, Attikameks, Capitanal... Ces mots qui aujourd'hui ne t'évoquent sans doute rien de connu seront pour toi comme une seconde nature après y avoir séjourné !
» Trois-Rivières est plus qu'une ville, c'est un pays à elle toute seule !
» Trois-Rivières est plus qu'un pays, c'est un...

— Ouais, ça va, c'est bon, t'as gagné, Flippo ! On va s'y arrêter quelques jours, à ta fameuse Trois-Rivières ! »

* * *

Après m'être fait convaincre, chez Flippo, de faire une escale de deux nuits à Trois-Rivières (on l'aura compris) pendant notre voyage au Québec en septembre prochain, je retrouve ma Maison du Peuple de Saint-Gilles pour y attendre Léandra, que je n'ai plus vue depuis des semaines. — Cela fait d'ailleurs des semaines que je n'ai plus vu grand monde...

Même si, pour le moment, ce n'est pas facile tous les jours — c'est le moins qu'on puisse dire ! — avec Jonas (avec qui elle sort/ne sort pas — biffer la mention inutile), Léandra n'est pas déprimée. Elle a profité à moitié de son pass pour le Brussels Summer Festival (BSF pour les intimes) et a vu (et adoré) Iggy Pop, le chanteur fou contorsionniste. Elle sera bientôt en vacances — encore ! — et ne sait toujours pas vraiment comment elle va en profiter.

Qu'écrire d'autre ?
Léandra n'essaie pas de me convaincre d'aller à Trois-Rivières.
Léandra s'en fout, des verts vallons creusés par le Saint-Maurice.
Léandra n'a pas d'atomes crochus avec le Canada, ni avec ses habitants.

Le prix des « antipasti » a augmenté.
Ils ont tout « arrondi » vers le haut, les salauds !

Il fait chaud — étouffant même !

Et puis Jonas envoie un message pour demander à Léandra de le recontacter, et la soirée se termine vers dix heures du soir ! — Au vu de la chaleur et de mon épuisement, ce n'est sans doute pas plus mal...

All clean, Sir!

20.0. J'envoie toute cette numérotation moribonde aux oubliettes... Elle s'avère beaucoup trop artificielle et n'apporte strictement rien à l'ensemble. — « De toute façon, ce ne sera pas la première fois que ton blog change de forme ! » En effet.
Aujourd'hui, samedi 18 août 2012, l'heure est au grand nettoyage, et à mon retour à Bruxelles. Maman et moi prenons le chemin de la capitale avec pour objectif principal de remettre à neuf mon appartement.
Sur le trajet, nous nous arrêtons au Lunch Garden de Waterloo. C'est le restaurant de prédilection de ma mère, va savoir pourquoi ! Personnellement, j'ai toujours eu le plus grand mal à comprendre ce qui pouvait l'attirer dans ce haut lieu de perdition gastronomique... Sont-ce les pommes de terre en bocal mal cuites ou bien les salades dures comme le roc ? À moins que ce ne soient les délicieuses semelles de viande noyées dans leur sauce ? (Point positif : c'est tout de même moins répugnant que les horribles boulettes scandinaves de chez IKEA.)

Un vieux monsieur dans les toilettes du restaurant : « Je venais manger ici tous les samedis avec ma femme, depuis des années... Mais elle est morte l'an dernier... Alors je continue à venir, seul, en sa mémoire. »
À mon appartement. — Mes amis savent que je peux être maniaque pour une broutille, mais s'ils connaissaient ma mère, ils se rendraient vite compte que me traiter de « maniaque » est pour le moins totalement disproportionné... Maman traque les poussières jusque dans leurs derniers retranchements et rétablit l'ordre et la symétrie partout où elle passe. — Tu verrais ma chambre après son passage ! Ce n'est plus une chambre, c'est un sanctuaire !

Que dire de cette journée si ce n'est que je range et que je trie ?... Je classe les centaines de bandes dessinées dans leur étagère, je remets en ordre ma bibliothèque, je fais le tri dans tous ces papiers accumulés au fil des mois. Avec toutes les conneries que j'ai entassées depuis des lustres, je pourrais allumer un immense feu de joie.

Au coucher du soleil, tout est en ordre. La moindre poussière est maîtrisée. Chaque livre est à sa place. Les pièces d'échecs sont bien au centre de leur case. La cuisine a repris ses couleurs d'antan. La salle de bain est si éclatante que s'y rendre est un véritable supplice pour les yeux. Ma mère reprend alors la route de la maison, me laissant seul dans cet appartement tellement propre que j'ai peur de le souiller par ma seule présence.

19bis. 17§

19bis.1. Hier, dans mon wagon, un jeune gars semblait captivé par un roman de Bernard Werber... Du moment qu'il lit, l'expérience ne peut être que positive et enrichissante !

19bis.2. Tout comme Isaac Asimov, Bernard Werber ne se démarque pas spécialement par la brillance de son style. Qui s'en soucie ? Car l'auteur (et c'est lui-même qui le dit) met d'abord en avant des idées.
19bis.3. Éric-Emmanuel Schmitt, Marc Levy et Bernard Werber ont indubitablement des points communs, et ceux-ci ne se résument pas uniquement à leurs succès littéraires respectifs. Non : ils placent tous les trois au centre de leurs textes l'humain, l'émotion et le mystère existentiel !
19bis.4. « Pourquoi ? Pourquoi faut-il que tu sois toujours si positif en tout ? » — C'est faux, c'est faux ! N'as-tu donc pas lu ce que j'ai écrit hier ? Tout, absolument tout, était broyé par le moulin du cynisme, de la critique et de l'élitisme !

19bis.5. N'as-tu donc jamais lu, à d'autres endroits de ce journal, ce que j'ai écrit sur les personnages formatés des films d'animation en provenance des grands studios américains ?... Et cette horreur que j'ai rédigée sur le pessimisme, il y a une quinzaine de jours ?... Et ces écrits dans lesquels j'explique que je suis moralement abattu et ne fais rien d'autre que regarder Les Pingouins de Madagascar en sirotant des bières ?... (Si je suis positif vis-à-vis de la lecture en général, c'est parce que j'ai moi-même beaucoup lu et que je connais tous les bienfaits que cette pratique peut apporter au quotidien.)
19bis.6. Lu dans les toilettes d'un train : « You are in a metal snake, on a rock floating through space. » — Une description concise et réaliste de la présente situation.
19bis.7. Pendant que je travaillais, une candidate du FDF (Fédéralistes démocrates francophones) s'est présentée à la maison pour exposer son programme en vue des élections communales à venir. Paraîtrait qu'elle a été reçue par mon père. — Mon papa a ses idées (marxistes), mais il sait accueillir les gens.
19bis.8. Ladite candidate a parlé de son implication au sein d'une association dédiée à l'alphabétisation. — Elle n'est pas du même bord politique que nous et mes parents ne voteront certainement jamais pour elle, mais elle a le courage de venir frapper à toutes les portes... et le mérite de s'impliquer dans des projets communaux ! Et ça, c'est quand même très chouette !

19bis.9. Cette dame a bien raison de mettre l'alphabétisation sur le tapis. La lecture permet de comprendre le Monde, et comprendre le Monde est une condition sine qua non à toute démocratie !

19bis.10. Ses paroles s'inspirent de temps à autre des bruissements du discours populaire ? Et alors ? Peut-être est-ce simplement la preuve qu'elle est à l'écoute du peuple ?

19bis.11. À la question « C'est quoi le malheur ? » postée par mon père sur Facebook, un de ses amis a répondu : « Ces d'etres gouverné par des incapables!!!!! » — Il serait aisé de critiquer l'orthographe du commentaire, et aussi de railler la naïveté d'un tel discours... Mais c'est oublier que chaque individu a sa place dans notre société et qu'il convient d'être à l'écoute de tous, y compris de ceux qui n'ont pas appris à structurer leurs pensées. Plutôt que de prendre un tel message avec condescendance, pourquoi ne pas essayer d'accompagner le bonhomme dans la construction d'une plus grande conscience politique ?
19bis.12. Mon père approuve : « Ce gars, il ne sait pas écrire, mais tu lui montres une chaudière, il la répare en deux temps trois mouvements ! » — Un point commun avec Ludwig Wittgenstein, tiens ! (Pour la chaudière, hein, pas pour l'écriture...)
 
19bis.13. À quoi cela sert-il d'être élitiste ? Chaque être apporte sa pierre à l'édifice et puis c'est tout !
19bis.14. Mister H « n'écrira plus jamais parce que plus personne ne lit. » — Accroche-toi ! Continue à écrire coûte que coûte, Bertrand ! Même si tu n'es lu que par une seule personne, ce ne sera jamais une perte de temps !

19bis.15. Lorsque ma vieille grand-mère joue au Scrabble, elle perd. C'est parce qu'elle s'en fiche de gagner : elle joue pour le plaisir de jouer et elle a bien raison !

19bis.16. La voisine de mes parents ne connaît qu'un seul mode d'expression : le cri. — Quelle veine de pouvoir symboliser personnellement un célèbre tableau !
19bis.17. Les entends-tu, toi aussi, les trompettes de la victoire ? Elles marquent le début d'une vie nouvelle. Celle qui consiste à ne plus être esclave du temps et à prendre la vie telle qu'elle se présente comme seul horizon !

19. 17§

19.1. Un des grands mystères de la vie : le nombre important de personnes qui, dans le train, sont plongées dans un roman de Bernard Werber et — c'est là, fondamentalement, que réside le mystère — semblent apprécier ce qu'elles lisent.

19.2. Isaac Asimov non plus ne possédait aucun style, mais au moins il défrichait des territoires !
19.3. Éric-Emmanuel Schmitt, Marc Levy et Bernard Werber forment les trois angles d'un « Triangle des Bermudes » littéraire. Une fois à l'intérieur de cette zone infernale, l'esprit critique disparaît sans laisser de trace (au détriment d'une admiration béate).
19.4. « Pourquoi ? Pourquoi faut-il que tu sois toujours si négatif sur tout ? » — C'est faux, c'est faux ! N'as-tu donc pas lu ce que j'ai écrit récemment sur Les Pingouins de Madagascar ?...

19.5. Plus sérieusement, n'as-tu donc jamais lu ce que j'ai écrit sur les creux et les sillons parcourus par les Fremen de Dune ?... Et sur Enoch Wallace, le fermier du Wisconsin responsable d'une gare de triage pour « extraterrestres en transit » dans le génial Way Station de Simak ?... Et sur les contes du futur de Cordwainer Smith, traversés de part en part par la poésie et l'humanisme ?...  (Si je déteste Werber, ce n'est pas parce que je suis réfractaire à la science-fiction mais au contraire parce que j'en ai beaucoup trop lu pour apprécier cette daube.)
19.6. Lu dans les toilettes d'un train : « You are in a metal snake, on a rock floating through space. » — Énoncé de cette façon, c'est vrai que ça peut paraître totalement surréaliste.
19.7. Pendant que je travaillais, une candidate du FDF (Fédéralistes démocrates francophones) s'est présentée à la maison pour exposer son programme en vue des élections communales à venir. Paraîtrait qu'elle a été accueillie par mon père. — Mazette ! C'est une intrépide !
19.8. Elle a parlé de son implication au sein d'une association dédiée à l'alphabétisation, puis a subitement changé de sujet et s'est mise à critiquer vertement un projet d'accueil des « Gens du voyage » dans la commune. — Mauvaise idée : elle aurait mieux fait de continuer à parler d'alphabétisation.

19.9. J'imagine la feuille de route de cette dame : « Parler des Gens du voyage et, si l'électeur potentiel accroche au discours, continuer sur le thème de l'Islam radical ».

19.10. Comment faire confiance à des personnes qui, pour être élues, prennent pour base les bruissements du discours populaire ?

19.11. À la question « C'est quoi le malheur ? » postée par mon père sur un réseau social, un de ses amis a répondu : « Ces d'etres gouverné par des incapables!!!!! » — Une réponse pour le moins paradoxale.
19.12. « C'est facile de critiquer, Hamilton, mais ce gars, tu lui montres une chaudière, il la répare en deux temps trois mouvements ! » — Un point commun avec Ludwig Wittgenstein !
 
19.13. « Tu n'es qu'un élitiste, voilà ce que tu es ! » — Est-ce élitiste de pointer du doigt un flagrant problème d'orthographe ? — « Oui. » — Ha bon ! Misère !
19.14. Mister H « n'écrira plus jamais parce que plus personne ne lit. » — Quelle importance ? Faut-il être lu pour écrire ?

19.15. Lorsque ma vieille grand-mère joue au Scrabble, elle perd. C'est parce qu'elle refuse de savoir que ce jeu prend ses racines dans la logique et non dans le vocabulaire.

19.16. La voisine de mes parents ne connaît qu'un seul mode d'expression : le cri. Elle hurle sur tout ce qui bouge : son mari, ses enfants, son chien, sa main...
19.17. Les entends-tu, toi aussi, les trompettes de la victoire ? Elles marquent la fin de mon calvaire. Celui qui consistait à courir après ces journées qui toujours s'enfuyaient vers l'horizon du temps !

18. 17§

18.1. De nouveau ces petits « paragraphes péremptoires » à la con. C'est Léandra qui va être contente !

18.2. « Tout cela manquent cruellement de souffle épique » [10.3] : bravo Hamilton ! Quand on écrit vite et quand on ne se relit qu'une seule fois, on en arrive à de telles monstruosités orthographiques !

18.3. Je sais que mes lecteurs sont très laconiques mais face à pareille faute, leur silence s'apparente presque à du sadisme.

18.4. Anubis : une série pour adolescents dont Gaëlle raffole et qui a pour principale caractéristique d'être vide de presque tout contenu. Les étudiants du pensionnat « Anubis » en Angleterre enquêtent sur je ne sais quoi et se rendent, munis de lampes de poche, dans divers recoins de la bâtisse... et il ne se passe rien. — À elle seule, Nathalia Ramos, alias Nina Martin, sauve la série du fiasco.

18.5. Gaëlle est repartie chez sa maman. Des jouets éparpillés dans plusieurs pièces et la télévision restée allumée, en sourdine, sur la chaîne Nickelodeon sont les seuls vestiges de son passage. — Dans toute sensation de manque ou de perte, ce sont les petits détails insignifiants qui réveillent les sentiments.

18.6. Boire de l'Orval dans un verre à Leffe : un affront à frère Xavier !

18.7. Sur les forums de presse, des anonymes critiquent l'argent dépensé par la NASA pour ses programmes spatiaux à vocation scientifique. — Pour une fois que ce putain de billet vert sert à autre chose qu'à l'armement des bombardiers...
18.8. « Allochtones » : celui ou celle qui ne perçoit pas les relents nauséabonds de l'extrême droite dans ce terme utilisé à toutes les sauces, par de nombreux médias mais aussi par certains organismes étatiques, ferait bien d'aller se passer la tête sous l'eau froide pour sortir de sa torpeur...

18.9. Selon la définition standard, je suis un « autochtone » parce que mes parents, mes grands-parents et mes arrière-grands-parents sont restés plus ou moins sur la même petite portion de terre. — Et à bien y réfléchir, je me demande bien pourquoi ils y sont restés, d'ailleurs.
18.10. « Hamilton ! Ne vois-tu donc pas ? Les autochtones partagent depuis des générations la même culture, la même langue, la même religion, contrairement aux allochtones ! » — Ben voyons ! C'est vrai que je me sens appartenir à une vraie communauté d'idées regroupant droite catholique ardennaise et fascistes anversois... (Ironie, je précise.) 
18.11. Il n'existe pas d'allochtones ni d'autochtones. Toute réduction d'un individu vers l'une ou l'autre de ces catégories est une énorme foutaise idéologique, généralisatrice et fantasmée.

18.12. Retour sur la question : « Toi qui es intelligent, qu'est-ce que tu en penses ? » — Je pense que c'est un leurre de croire que quelqu'un considéré (j'insiste sur ce mot) comme intelligent puisse mieux penser et par conséquent donner une meilleure réponse.

18.13. Ce serait même plutôt l'inverse : avec l'esprit, vient le doute.

18.14. Tous ces chroniqueurs qui ont réponse à tout ne peuvent être que des faussaires. Quel que soit le sujet, même le plus obtus, ils ont leur mot à dire. Et ce mot est au service d'une thèse générale préétablie qui jamais ne dévie. Ils se veulent experts en tout et ne sont experts en rien. (Le faussaire Cavada coupant et reprenant Bourdieu.)

18.15. Il faudrait pouvoir lâcher du lest à certains moments ; devant quelqu'un qui a l'air de s'y connaître, dire : « Je ne sais pas si tu as raison, mais je vais me renseigner avant de te répondre. » (Je sais d'expérience qu'il est très difficile de réagir comme cela !)

18.16. J'imagine un débat télévisé sur le conflit israélo-palestinien où l'un des protagonistes n'aurait strictement aucun avis. Il ne ferait que répéter qu'il « ne sait pas ». Est-ce seulement jamais arrivé ?

18.17. Cette histoire de « bonne personne » qui tomberait fatalement sur la « bonne bouteille » est ridicule. C'est pour cette raison que ma vie personnelle n'avance pas !

17. 17§

17.1. Il est impératif — si ce n'est pour la marche du Monde, du moins pour la mienne — que le présent journal soit entièrement à jour lors de mon départ pour la Belle Province. Alors je trace, oubliant pendant quelque temps que je n'ai pas le temps.
17.2. Ce journal est une longue succession de bouteilles jetées à la mer : je ne sais pas pourquoi je l'écris, je ne sais pas pour qui je l'écris et je ne sais même pas si, un jour prochain, un de ces messages sera lu par la bonne personne.
17.3. Une partie de moi chuchote : « Si un message doit absolument être lu par quelqu'un, alors il le sera ! », pendant que l'autre, beaucoup plus cynique et réaliste, lui répond par un énorme « Foutaises que tout cela ! » bien senti.
17.4. L'essentiel change-t-il selon les époques ?
17.5. Peut-être la véritable intelligence n'est-elle pas une question d'adaptabilité à une situation donnée mais au contraire la capacité de ne pas s'adapter du tout, de penser le Monde en se détachant complètement des contingences du temps ? — À l'humain qui réussira une telle prouesse, je donnerai mon chapeau...

17.6. (... et à celui qui me fera remarquer que je ne porte jamais de chapeau, je lui expliquerai que là n'est pas la question.)
17.7. Une définition possible du relativisme : c'est lorsque ma mère s'inquiète du désordre ambiant, alors que je ne vois pour ma part qu'une série d'objets particulièrement bien ordonnés.

17.8. Ce qui me gêne chez les animaux domestiques, c'est qu'ils sont domestiques, justement. Un oiseau est toujours plus intéressant à observer lorsqu'il n'est pas en cage.

17.9. J'ai du mal à comprendre les animaux qui sont trop proches des humains (chiens, chevaux, vers des sables...). Leur proximité me paraît suspecte et j'ai tendance à les considérer soit comme stupides car non libres, soit comme fayots (ce qui est encore pire).

17.10. Le chien fait presque figure d'exception dans cette histoire. Il a croisé le chemin de l'humanité il y a si longtemps qu'il en est presque devenu le complément naturel. Si un chien est totalement libéré de ses chaînes, ce n'est plus vraiment un chien.

17.11. Malgré toutes les apparences, j'adore les chats. Ce que je déteste, c'est le chat domestique, ce petit couillon au poil lustré qui se fait servir du Whiskas® spécial Oméga3 par son maître totalement gaga de lui. Le chat, c'est l'inverse du chien : s'il n'est pas totalement libéré de ses chaînes, ce n'est plus vraiment un chat.
17.12. La question du bruit que fait l'arbre qui tombe dans la forêt quand personne n'est là pour l'entendre, si elle est prise au premier degré, est d'une grande platitude. Mais comment est-il possible de la prendre au premier degré ? — Eh bien j'ai pourtant dans mon entourage familial des gens qui à coup sûr ne la comprendraient pas. (« S'il tombe, il fait quand même du bruit, qu'il y ait quelqu'un ou non ! » ou « Bah oui, il ne fait peut-être pas de bruit... Et alors ? »)
17.13. Si on l'aborde sous l'angle de la métaphore, cette phrase prend un sens complètement différent. La forêt, c'est l'Univers, et la question se transforme en quelque chose comme : « Quel existence aurait l'Univers si aucun observateur conscient n'était là pour l'observer ? » — Mais la question de l'arbre qui tombe exprime cette pensée beaucoup mieux que n'importe quelle autre interrogation plus directe.
17.14. La fameuse question de Leibniz, « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? », s'inscrit dans le même sillage, mais contrairement à la précédente, elle semble réellement attendre une réponse, qui forcément ne viendra jamais : s'il n'y avait rien, je ne pourrais pas me poser la question. 
17.15. (L.W.) Les termes « quelque chose » et « rien » sont ici détournés de leur usage courant et cette prétendue question philosophique n'en est pas une. — En raisonnant d'une autre manière (en donnant aux mots leur sens usuel), elle n'existerait même pas.
17.16. Il m'est extrêmement difficile de m'imaginer que l'Univers ne poursuit aucune finalité particulière. — Et pourtant, c'est peut-être le cas ! (Si j'observe la longue chaîne d'événements improbables qui a donné la possibilité à la matière de devenir vivante puis consciente de sa propre existence, je me dis que nous ne devrions pas être là.)

17.17. Et si nous étions une formidable erreur ? — Et si nous étions les seuls êtres vivants dans l'Univers à nous poser ce genre de question ? — Et si nous étions les seuls et uniques observateurs ? (Quelques milliards d'entités conscientes sur une planète paumée au sein d'un gigantesque ensemble d'objets célestes tournant à vide.)

16. Le monde accéléré

16.0. Dans une volonté toujours extrêmement vivace de rendre ce blog le plus inintéressant possible, aujourd'hui, je m'amuse à poster les résultats de mes expériences de vidéos accélérées [14.2]. Le principe est toujours le même : poser mon vieil appareil photo quelque part et le régler de telle manière qu'il prenne des photographies selon un intervalle de temps déterminé à l'avance, pour ensuite regrouper les photos au sein d'une vidéo qui les diffuse à raison de 25 ou de 12,5 images par seconde. Le but est de montrer la marche du monde à un rythme différent, difficilement perceptible par nos sens : le mouvement de la Lune, la projection des ombres sur le sol...

16.1. Lever de Lune. La nuit, j'ai posé mon appareil photo à la fenêtre de ma chambre, dans la maison de mes parents. L'idée était de photographier le lever de la Lune puis, au petit matin, celui du Soleil. Les photos, espacées de 5 minutes dans le temps réel, sont diffusées à raison d'une image tous les 8 centièmes de seconde, soit à une vitesse 3750 fois plus grande que la normale. Résultat : on voit la Lune se lever au début de la vidéo (en haut à gauche), puis arrive le jour, et les nuages défilent sans discontinuer...

16.2. Dissipation des nuages. Ensuite, les nuages disparaissent pour laisser la place à un joli ciel bleu. Sur cette seconde vidéo, les photos ne sont plus espacées que de 30 secondes l'une de l'autre, à raison de 25 images par seconde, soit une accélération de 750. Ce petit film permet de cerner un phénomène difficilement perceptible à l'œil nu, à savoir que tous les nuages présents dans le ciel ne se déplacent pas dans la même direction selon qu'ils sont proches du sol ou en très haute altitude (influence des grands courants de type jet stream).


16.3. Ombres. La troisième vidéo est filmée à partir de la sapinière de mes parents. Elle montre la progression des ombres à raison d'une photo par minute, à du 25 images par seconde. Commentaire de mon cousin Fridric : « Ouais, bon, t'as filmé un cadran solaire géant, quoi... » — Ce n'est pas très palpitant, je l'avoue.

16.4. Route. Dans la quatrième vidéo, j'ai filmé la route devant la maison. (Oui, je sais, c'est terriblement sexy.) On y voit à nouveau la formation des nuages, les changements d'ombre, mais aussi le passage furtif de quelques voitures ou piétons. (1 photo toutes les 30 secondes, à du 25 images/seconde.)

16.5. Je maîtrise désormais la technique... La prochaine fois que je posterai une vidéo de ce type, je me fais la promesse solennelle que ce sera un tout petit peu plus intéressant...

15. « À chaque casserole son couvercle »

15.1. Sur la grande cour devant la maison, toute la famille est réunie. Grande-tante Marcella — 77 ans au compteur — est là. Elle parle, parle, parle encore. Elle n'arrête pas de parler. Quand sa fille la rejoint en fin d'après-midi, elle parle aussi. À deux, elles parlent, parlent, parlent, encore et toujours. Elles n'arrêtent pas de parler... Deux fois plus.

15.2.
Ce flot continu de paroles me rend nerveux. Tellement nerveux qu'après deux heures de logorrhée mère/fille presque ininterrompue, je ressens le besoin de m'enfermer dix minutes dans ma chambre, avant de reprendre le chemin du Front.

15.3. « Toujours pas de copine, Hamilton ? me demande Marcella.
(Je quitte lentement des yeux mon écran d'ordinateur pour la regarder.)
— Non, toujours pas.
— Et c'est pour quand ?
— Jamais.
Ooooh... À chaque casserole son couvercle, pourtant, comme on dit.
— Ouais, peut-être, mais là, j'ai dévalisé les armoires de la cuisine sans en trouver une seule.
— Les casseroles sont trop petites pour ton couvercle, c'est ça qu'il y a !
— Oui, c'est ça... "Les casseroles sont trop petites." »

15.4. « Michel Daerden, il avait un gentil regard. C'est ça, il avait un regard gentil. Moi, j'ai un regard méchant. Je n'en peux rien. J'ai un regard méchant. Je suis née comme ça. Mais Michel Daerden, il avait un regard gentil, ha ouais, ha ouais, ouais, ouais ! »

15.5. « Et Michèle Martin ? Moi, je ne sais pas... Je ne suis pas très futée, mais vous en pensez quoi, vous, de sa libération ? Je ne sais pas, moi, bah ouais, ha ouais. Non, je ne sais pas... Je ne sais pas, je ne sais pas. Elle n'aurait pas dû sortir de sa prison, non ? Et toi Hamilton ? Tu en penses quoi, toi qui es intelligent ?
— Euh... »

15.6. La fille : « Il travaillait dans l'Horéca mais il a fait un gros burn out. Et il a dû arrêter de travailler pendant un an. Sans rire, avec sa dépression, s'il avait continué, il aurait tué tout le monde dans le restaurant : les clients, son patron... » — Ha ! Comme John Cleese avec son hachoir dans le fameux sketch du restaurant du Monty Python Flying Circus !
« You bastards! You vicious, heartless bastards! Look what you've 
done to him! He's worked his fingers to the bone to make this place 
what it is, and you come in with your petty feeble quibbling and 
you grind him into the dirt, this fine, honourable man, whose boots 
you are not worthy to kiss. Oh, it makes me mad. Maaaaaad! »
15.7. « Oui, Gaëlle, pour le moment, elle croit en Dieu, tout ça... 
— Ha ? Roberto, lui, il a des "visions", m'explique Aude. Il affirme qu'il est capable de voir les gens à travers les portes et les murs. Ce genre de chose... »
(L'une se prend pour Jésus, l'autre pour Superman : ça promet !)

15.8. « Moi, je vois des gens la nuit, raconte la même (40 ans). Je me réveille et je vois des silhouettes à la périphérie de mon regard. Je suis certaine de ne pas rêver et qu'il y a vraiment un inconnu. Alors, je sursaute, je crie et Fridric me demande ce qu'il y a... Mais j'ai peur de passer pour une folle, alors je fais semblant de rien.
— Tu vois un inconnu dans ta chambre la nuit et tu fais "semblant de rien" ? »