Archives mensuelles : octobre 2011

Souvenir de neige qui tombe

"Pourquoi le présent est-il souvent peint de couleurs plus sombres qu'un passé pourtant difficile et qui devient presque chatoyant dans la parole-source ?" (Danièle Voldman)

Donc voilà : depuis ce matin, à mon travail, j'essaie (entre une réunion, un appel d'offre à finaliser et une demande de renfort – tombée à l'eau – pour démonter/transporter de vieilles étagères déglinguées) de me concentrer sur la réécriture d'un texte à rendre pour l'année dernière, voire même pour l'année d'avant (très gros soupir). Sans entrer dans les détails techniques, le texte en question traite de sources orales, de maisons du peuple (pour une fois pas celle de Saint-Gilles – qui n'en est plus une, d'ailleurs) et de portail Web consacré à la mémoire orale. Un sujet intéressant mais... je suis en retard, en retard, en retard ! Si ça continue, on va me couper la tête.

Peu importe. Je me replonge donc dans le monde encore en partie à défricher des sources orales, ces documents sonores un peu à part, souvent mésestimés, en marge des sources écrites "traditionnelles". Dans le cas présent, il s'agit d'une série d'interviews historiques ou anthropologiques, plus ou moins cadrées, de témoins d'une époque, d'un lieu, d'un événement. Chose amusante, que l'on retrouve dans beaucoup d'études basées en tout ou en partie sur l'oralité : les témoins sont plus ou moins conscients d'être acteurs ou spectateurs des événements qu'ils vivent. Ainsi l'historienne Danièle Voldman – toujours elle – fait-elle la différence entre un "grand témoin" et un "petit témoin" (ce n'est pas moi qui le dis : c'est dans les notes qu'on m'a transmises). Le premier, dit aussi "témoin-sujet", a pleinement conscience d’avoir joué un rôle dans une structure donnée, d’avoir laisser son empreinte personnelle dans les événements qu’il décrit ; le second, au contraire, est un "témoin-objet" et considère n’avoir été qu’un spectateur (et non un acteur), un pion parmi tant d’autres des événements qu’il narre.

En outre, en compulsant les quelques notes qui sont à ma disposition, je tombe sur des réflexions intéressantes concernant la mémoire, cette petite fée espiègle qui nous joue constamment des tours. Ainsi, quand un témoin raconte un événement plus ou moins ancien, il faut avoir à l'esprit que ce qu'il raconte n'est pas la vérité (c'est presque une évidence, certes) mais bien la façon dont il a vécu l'événement, avec ses espérances du moment, sa propre logique, ses propres structures de pensée. Pire : avec le temps, la mémoire déforme l'événement de manière à réadapter celui-ci au présent. Seul compte le présent : la mémoire est un instrument de survie, pas un élément au service de l'Histoire. Pour faire une dernière analogie, la mémoire ne fonctionne pas comme un disque dur : elle ne stocke pas simplement une suite d'informations sans les modifier. Au contraire, elle réinterprète constamment les observations, elle les passe au travers d'un prisme déformant. On en revient presque à la résilience : la mémoire peut déformer un souvenir traumatisant de manière à ce qu'il soit pleinement accepté ; mais elle peut aussi tout simplement déformer un souvenir banal pour donner plus ou moins d'importance à une action personnelle à un moment donné (ha, cette putain d'estime de soi !).

En creusant encore un peu plus, la mémoire pose la question de ce qu'est le passé, en opposition avec ce qu'est le présent. Le passé n'est que le souvenir qu'on en garde ; le présent est aussi impalpable que des grains de sable s'échappant d'une paume... Entre les deux, où nous situons-nous ? Et où se situe l'historien, censé être le plus "vrai", le plus "juste" possible ? (Et comment s'est-il débrouillé, Thucydide ? Merde !) Chaque lettre que je tape sur ce clavier appartient déjà au passé... Et le "Carpe diem" cuisiné à toutes les sauces et lâché à la va-vite sur Facebook est sans doute beaucoup plus difficile à atteindre qu'il n'y paraît de prime abord. Souvenir : une nuit, seul, revenant d'une soirée dont j'ai tout oublié (encore cette fichue mémoire), marchant dans une rue de Bruxelles, Like Spinning Plates en boucle dans les oreilles, de gros flocons tapissant le paysage : là, pendant un court moment, le temps s'est réellement arrêté ; je me suis assis sur un banc couvert de neige et j'en ai vraiment profité. Mais ce n'est encore qu'un souvenir, un simple souvenir...

Dommage que je ne puisse pas aligner tout cela tel quel dans un article "scientifique", sans la vérification constante de quelques collègues scrutant la moindre faille dans mon argumentation.

* * *

Dans le train vers Bruxelles, avec Yama, nous parlons de cinéma. Yama est un "rouleau-compresseur" en ce qui concerne le septième art (pas que pour le septième art, d'ailleurs)... Autrement dit : elle connaît tout. J'exagère sans doute, mais je la considère, avec Flippo (qui a fait ELICIT – Arts du spectacle, orientation écriture et analyse cinématographiques) et mon chef Lodewijk (qui a travaillé plus de dix ans à la Cinémathèque royale), comme mes trois références en matière de cinéma. (Je sais que Flippo et Yama lisent de temps en temps – voire tout le temps – ce blog, du coup je suppose qu'ils vont s'indigner de la réputation que je leur fais ici, mais tant pis !)

Yama me demande si j'ai vu de bons films récemment (elle demande ça à tout le monde pour le moment, me dira-t-elle). Réponse : non, je n'ai rien vu qui en vaille la peine (faut dire que ça fait très longtemps que je n'ai pas vécu une phase "cinéma" intensive). Dernièrement, pour sa part, Yama a (re)vu Éclipse d'Antonioni et Stalker de Tarkovski. Éclipse : un film d'actualité (rien ne change !), quand on connaît la frénésie de certaines personnes (même parmi les proches amis) quant à l'activité boursière. Stalker : c'est un chef-d'œuvre ; il faut le voir, point. Ci-dessous le superbe final en noir et blanc d'Éclipse et celui, non moins superbe, de Stalker, juste pour le plaisir des yeux (il n'y a pas ici de "spoiler", ni de révélation finale : juste une esthétique hors du commun).



Ce n'est pas la première fois que nous en parlons, mais nous en parlons quand même : le fantastique Blade Runner de Ridley Scott, un des films dans le top 3 de Yama (jamais je n'ai eu l'idée de lui demander quels étaient les deux autres films du top). Blade Runner : un mélange de mélancolie et de perfectionnisme. 

La mélancolie d'abord : aucun humain dans ce film n'est heureux. Rick Deckard (Descartes ?), le chasseur de réplicants, est forcé de reprendre du service, sans entrain : il arbore ainsi toujours une moue soit mélancolique, soit cynique par rapport à sa quête ; Elron Tyrell est un génie solitaire, magnat gouvernant de très haut son empire technologique ; J.F. Sebastian, designer souffrant du syndrome de Mathusalem, est un nerd qui vit seul, en dehors du monde, avec pour seule compagnie ses jouets... Les seules personnes qui essaient de vivre leur vie coûte que coûte sont les réplicants eux-mêmes, ces androïdes plus vrais que nature, à la durée de vie limitée, qui passent pour les vilains méchants au début du film. À la fin, retournement de situation lorsque Roy Batty, le dernier réplicant renégat en vie, sur le point de mourir, sauve Deckard (censé être son ennemi), lui déclamant la célèbre phrase : "J'ai vu tant de choses que vous, humains, ne pourriez pas croire. De grands navires en feu surgissant de l'épaule d'Orion. J'ai vu des rayons fabuleux, des rayons C, briller dans l'ombre de la porte de Tannhäuser. Tous ces moments se perdront dans l'oubli comme les larmes dans la pluie. Il est temps de mourir". La citation est presque un équivalent futuriste du Bateau Ivre de Rimbaud : "J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur (...)". Une réminiscence de Cordwainer Smith, aussi.

Des non-humains doués d'empathie... Qui est humain et qui ne l'est pas ?

Ensuite, le perfectionnisme : dans Blade Runner, d'après Yama, tous les objets du film, y compris les plus insignifiants – c'est-à-dire présents ne fut-ce qu'une seconde à l'écran – ont été choisis avec le plus grand soin, parmi les plus avant-gardistes de l'époque. Cette volonté perfectionniste, on la retrouve jusqu'à l'art des origamis laissés par Gaff tout au long du film...

Faudra que je reparle de Blade Runner un de ces jours... Si aujourd'hui je continuais sur ma lancée, non seulement mes rares lecteurs me diraient à nouveau que c'est trop long blablabla, mais en plus je finirais par m'endormir sur mon clavier, laissant une série de "zertfgyiokpomlkiujygfrtvdc" (c'est ce qu'écrit toute seule ma tête lorsque je la pose aléatoirement sur mon ordinateur portable).

Comme dirait l'autre : il est temps de dormir.

Un coup de dés, etc.

Hem...
Ça suffit.
Gaëlle est fan...
Mais faut pas exagérer.
J'ai d'autres sujets à traiter.
Bref : pas de Spelunky aujourd'hui.

Quand je rends ma fille à Maïté, il est 16h26.
Après, je m'assieds à la terrasse d'un café pour écrire.
Léandra arrive et, avec Andrew, nous décidons d'aller au Potemkine.
Le Potemkine : là où coule la répugnante Volga et passe l'insouciante musique made in sixties des bobos heureux et fiers de l'être... Bah !
Arrivés en terrasse, nous assistons aux toutes dernières minutes du concert d'un groupe de free-jazz (?). Un peu plus tard, à la sono : encore et toujours "I Heard It Through The Grapevine", mais dans une version alternative, chantée par The Slits, un éphémère groupe punk majoritairement féminin qui a officié au tournant des années 70 et 80. Pourquoi pas ? Cette version est éminemment sympathique.

Comme tous les dimanches, sans raison (ou peut-être parce que je sais que je n'aurai rien d'autre à raconter), je note pour plus tard quelques sujets de conversation. La mémoire (ma mémoire surtout) est ainsi faite : sans note, impossible de retrouver le moindre thème abordé durant une soirée. Par contre, à l'aide de notes lacunaires – quelques rares mots-clés gribouillés ou encodés –, tout un pan de la conversation me revient d'un seul coup. Ça fonctionne de la même façon pour les rêves : il me faut une simple clé d'entrée (une ID, dirait-on dans le monde des bases de données), un mot-souvenir qui, une fois invoqué, éclairera cette minuscule zone de souvenirs située sur la gigantesque face cachée de ma mémoire. Nous n'oublions rien : nous enfouissons, simplement.

* * *


Durant la discussion, Andrew mentionne à nouveau la conjecture de Poincaré... Il la remet de temps en temps sur le tapis, celle-là, car c'est passionnant. Passionnant non pas à cause de la conjecture en elle-même (quoique !) mais surtout en raison du mathématicien russe qui en 2002-2003 a démontré son exactitude : Grigori Perelman.

Cette conjecture (une conjecture : une affirmation mathématique qui n'a pas encore été démontrée), formulée pour la première fois par le mathématicien français Henri Poincaré en 1904 (merci Wikipédia), est la suivante : "Soit une variété compacte V simplement connexe, à 3 dimensions, sans bord. Alors V est homéomorphe à une hypersphère de dimension 3". Je n'ai même pas envie de définir le moindre terme de cette conjecture, tant j'ai la trouille de me planter lamentablement la gueule dans ce domaine que je ne maîtrise absolument pas.

Donc Grigori Perelman a démontré la conjecture de Poincaré (qui n'en est plus vraiment une, du coup). En 2006, pour couronner ses travaux, Perelman est nommé lauréat de la médaille Fields, une des plus hautes distinctions dans le domaine des mathématiques, attribuée tous les quatre ans par l'Union mathématique internationale à quelques "jeunes" mathématiciens de moins de quarante ans. Perelman refuse la médaille (c'est le seul à l'avoir déclinée depuis la création du prix, en 1936). Plus fou encore : plus tard, en 2010, le mathématicien refusera le prix Clay. Décerné par le Clay Mathematics Institute, ce prix récompense d'un million de dollars la première personne qui arrivera à démontrer un problème mathématique complexe. Sur une liste de sept problèmes, seule la conjecture de Poincaré a été démontrée et Perelman a donc refusé la récompense. Dans une rarissime interview parue dans le tabloïde  Komsomolskaïa Pravda (Комсомо́льская пра́вда), le génie reclus dans un petit appartement de Saint-Petersbourg explique comment il a trouvé la solution de la conjecture (à savoir grâce au fait que dès sa jeunesse, il a essayé de trouver des réponses à des questions complexes, du genre : calculer la vitesse à laquelle aurait dû marcher Jésus Christ sur l'eau afin de ne pas tomber dedans, oui, oui !) et pourquoi il a refusé le prix ("Je sais comment gouverner l'Univers. Pourquoi devrais-je courir après un million ?") : c'est entre autres expliqué ici. Ce gars me fait penser à un autre génie, des échecs cette fois-ci : Bobby Fischer. Un type hors norme, à la logique différente, refusant lui aussi des sommes astronomiques (par simple caprice), annulant des tournois, disparaissant de la circulation... Mais ceci est une autre histoire.

* * *
De son côté, Léandra chante. Enfin, pas toujours. Juste un morceau en fait : "Octobre" de Francis Cabrel. Une des chansons préférées de ma mère – normal car c'est aussi son mois préféré –, une de celle qu'elle voudrait à son enterrement (enfin, je crois). J'adore également le mois d'octobre pour ses couleurs, ses odeurs... Léandra dira – et je suis fondamentalement d'accord avec elle, mais pas Andrew – que seul le mois de novembre est horrible : il est moche, froid, venteux et sans aucune magie... En tout cas, pour le moment, octobre ne ressemble absolument pas au mois d'octobre de l'ami Francis : pas de feuilles partout, pas de nuages pris aux antennes, pas d'écharpes pour deux...
Autre sujet de discussion, lancé par Léandra : l'anniversaire prochain de Jonas. Jonas est informaticien et est né un 10.10 : un nombre "binaire". De mon côté, je suis né un 10.01 : un nombre binaire aussi. Question : combien de jours de l'année sont binaires ? Facile : seuls les mois de janvier (01), octobre (10) et novembre (11) peuvent concourir. Pour les jours, c'est seulement le cas des 01, 10 et 11 aussi... Conclusion : 9 jours sur 365 ne sont pas hors-jeu : ça fait un peu moins d'une chance sur 40 de tomber juste. C'est pas mal je trouve... Par contre, si l'on ajoute les années à la donne, il va falloir attendre longtemps avant de voir la naissance d'un "bébé binaire", à savoir l'année 10000 après Jésus-Christ. Entre 1111 et 10000, un "grand vide binaire" s'étale dans toute sa splendeur, à moins de calculer avec un autre calendrier que le calendrier chrétien ou bien de tricher et de ne compter que les deux derniers chiffres de l'année (dans ce cas, 2011 fonctionne mais c'est le dernier avant 2100)...
Une dernière question : pourquoi la plupart des célibataires (éventuellement frustrés) d'Adopteunmec.com, le site de rencontre préféré de Léandra, sont-ils des inconditionnels de Dune de Frank Herbert ? Exemple : un des derniers en date que Léandra a rencontré virtuellement a pour surnom... Duncan Idaho ! Léandra ne savait même pas qui c'était avant que je ne le lui dise ! M'enfin ! Duncan Idaho : le fidèle lieutenant de la Maison des Atréides, celui qui bloquera la route aux Harkonnens assez longtemps pour que Paul et sa mère puissent s'enfuir dans le désert ! Hum... Peu importe. J'en suis arrivé à une théorie beaucoup plus générale : lire Dune nuit gravement à la vie conjugale. Pire : les fans de Dune sont destinés à être des éternels célibataires. En fait, je suis bien conscient que c'est souvent exactement l'inverse : ceux qui lisent ce genre de romans sont déjà dans un monde à part et le fait qu'ils aiment Dune n'est qu'un révélateur parmi d'autres d'une forme de rêverie, voire d'échappatoire...

Un peu comme la fantasy, le rock, les bandes dessinées, les jeux vidéo ou encore l'astronomie...

* * *
Avec tout cela, je n'aurai même pas mentionné le fameux poème de Mallarmé.
À la suite d'une phrase de Vincent le jour où nous l'avons rencontré,
Andrew a eu l'idée de retrouver une vieille édition du poème
D'après Andrew, ce poème typographique
échappe à toute vaine tentative
de compréhension frontale.
C'est mieux ainsi,
sans doute.
Non ?
spelunky

Samedi Spelunky

– Gaëlle, tu veux aller faire un tour dehors ?
– Non, merci.
– Gaëlle, ça te dirait d'aller jouer une heure au parc ?
– Non, merci.
– Gaëlle, tu veux dessiner ? Regarder un dessin animé ?   
– Non, merci.
– Et sinon, ça va ? Tu ne t'ennuies pas ?
– Oh, non je m'amuse super-bien avec Spelunky !

Voilà : après le "pique-nique Spelunky" d'hier soir, place au... "samedi Spelunky" ! Ma fille ne joue plus qu'à ça : c'en est presque devenu compulsif ! Parfois, lorsqu'elle en a marre de mourir, loin de vouloir arrêter le jeu, elle me demande de prendre le clavier et de jouer à sa place. "Pendant que tu joues", me lance-t-elle, "je te dirai ce qu'il faut faire pour éviter les serpents, les flèches et les pics".

Spelunky, c'est donc ce "bête" jeu indépendant, gratuit, créé par Derek Yu (un des développeurs derrière le très beau "Aquaria" – dont il faudra que je reparle un de ces jours aussi) et qui aurait pu sortir à la fin des années 80, mais non : le jeu date de 2008. Le but : explorer des cavernes remplies d'or, de pierres précieuses et de monstres, en prenant les commandes d'un aventurier dans le pur style d'Indiana Jones... En effet, comme ce dernier, le héros a un beau chapeau, un fouet et ne supporte pas les serpents (il a également un nez rouge, comme le remarquera Gaëlle, mais ça n'a rien à voir). La référence à Indiana Jones est plus subtile encore : le surnom du célèbre archéologue est "Indy", comme dans... "indie game". Oui, oui : derrière le gros pixel, se cache la subtilité et l'humour. 


Ce jeu a ceci de particulier que chaque nouvelle partie est différente, car les plateaux sont créés de manière aléatoire. Ainsi, à l'intérieur d'une zone de difficulté donnée, on retrouvera le même genre de monstres, de structures, de trésors, de marchands, mais jamais disposés de la même manière. Il s'agit là d'une différence de taille avec les jeux de type "Super Mario Bros" (pour ne citer que le plus connu), dans lesquels un joueur expérimenté, connaissant le monde comme sa poche, peut avancer les yeux fermés ou presque.

En découvrant ce jeu la semaine dernière, je me suis dit : "Ouais, bon, Hamilton, c'est un jeu de plate-formes comme plein d'autres, qui n'est a priori pas très addictif". Mais après en avoir pris les commandes bien en main ce week-end (simplement pour faire plaisir à ma fille), je suis revenu sur mon jugement... Ce jeu est dans une certaine mesure addictif : il est extrêmement bien équilibré et, comme beaucoup de bons jeux, il contient des secrets, des mystères ainsi que des niveaux et des personnages cachés dont l'obtention me demandera sans doute des heures et des heures de pratique. Ha ben merde alors !

Créer un jeu de cette trempe est donc bien plus complexe qu'on ne le pense... C'est ce que décrit très bien cet article détaillé (en anglais), montrant notamment en quoi la dynamique équilibrée de Spelunky en fait un très bon jeu.
* * *
En plus de jouer à Spelunky, ma fille mange de temps en temps. Ce soir, il a donc bien fallu sortir de notre caverne de Morlocks pour aller chercher de la nourriture. Gaëlle voudra que je lui cuisine de la chipolata et de la compote de pommes. C'est très simple à faire : ça me change des carbonnades flamandes.
Nous sortirons même une seconde fois, en fin de soirée, pour rejoindre Léandra et Andrew, "en transit" au Bar du Matin. Ces deux-là ont décidé de se rendre ensuite dans le Centre-ville afin de participer aux Nuits blanches bruxelloises, avec Emily et Walter. Pour ma part, je passe forcément mon tour car je me vois mal me trimballer jusqu'à deux heures du matin du côté de la Bourse avec ma fille de six ans sur les épaules. Gaëlle boit une eau-grenadine. Léandra offre un verre et je boirai un Orval (pour changer). On reste une grosse heure puis Emily embarque tout le monde (sauf Gaëlle et moi) devant la porte de mon appartement.
Pour endormir ma fille (tu parles !), je lui lis une série d'histoires de Schtroumpfs intitulée "Roméos et Schtroumpfette" (troisième et dernier récit de L'Apprenti Schtroumpf, 1971). En résumé : c'est le printemps, la sève monte dans les arbres et tous les Schtroumpfs – y compris le Grand Schtroumpf, ce vieux pervers de 542 ans – ont envie de se taper sortir avec la Schtroumpfette. Les petits Schtroumpfs sont tous un peu dans le genre "amoureux niais" ou "chevalier servant". Le Grand Schtroumpf, lui, drague la Schtroumpfette en ces termes : "Je ne suis plus un bleu, mais je suis encore très vert, malgré mes cheveux blancs ! Et puis, vous deviendriez Grande Schtroumpfette !". Mais la Schtroumpfette s'en fout : elle est très réticente. À la fin de l'histoire, elle ne sortira donc avec personne. Tous les Schtroumpfs seront juste bons pour rentrer se masturber dans leurs petits champignons ridicules. Mais ça, l'histoire ne le dit pas (c'est un livre pour enfants).

Quand je lis cette histoire à Gaëlle (sans lui raconter toutes les hypothèses scabreuses ci-dessus), elle est capable de se souvenir, presque mot pour mot, de ce que certains phylactères contiennent, avant même que je ne les lise. Niveau "mémoire", elle m'impressionne toujours autant.