Matin. — Sept heures quarante-cinq, dans le train Bruxelles-Liège, le contrôleur vérifie le ticket d'un homme assis à quelques sièges du mien : « Désolé, Monsieur, mais ce train ne s'arrête pas à Leuven !
— Hé ?
— Ce train ne s'arrête pas à Leuven. Vous allez devoir descendre à Liège puis reprendre un autre train.
— Hmmm ?
— Vous parlez français ?
(Haussement d'épaules.)
— Spreekt u Nederlands?
(Regard perplexe, yeux ronds comme des billes.)
— Do you speak English?
— Engl... Hé ?
— Leuven, NO ! tente le contrôleur en faisant de grands gestes de la main. We DON'T stop in Leuven !
— Hmmm ? Leuv... Hé... Ha ?
— Oh, je ne peux rien faire pour vous ! »
Le contrôleur continue son tour. Le navetteur semble alors désemparé : il se lève, se rassied, se relève, marche dans le couloir, regarde par la fenêtre, se rend en tête de voiture pour intercepter le contrôleur, qui lui lâche : « Vous ne parlez ni français, ni néerlandais, ni anglais ! Que voulez-vous que je fasse ? » Lodewijk donne la réponse un peu plus tard, à la pause café du boulot (durant laquelle j'explique rapidement l'histoire) : « Il aurait pu lui faire un dessin ! »
Soir. — Dans le train de retour, le contrôleur considère que mon nouvel abonnement électronique n'est pas valide : « Où allez-vous, Monsieur ?
— Laissez-moi deviner : il est écrit sur votre machine que j'ai un abonnement "Bruxelles-Bruxelles".
— Comment le savez-vous ? me demande-t-il d'un air suspicieux.
— C'est la dixième fois qu'un contrôleur tique... jusqu'au moment où il fait je ne sais quelle manipulation et voit qu'il s'agit en fait d'un abonnement "Réseau".
— Mais pourquoi est-il écrit "Bruxelles-Bruxelles" si c'est un abonnement "Réseau" ?
— Je suppose que c'est un code utilisé par la SNCB pour décrire un abonnement national, parce que, électroniquement, on ne pouvait pas le symboliser autrement ?
— Jamais entendu parler de ça ! »
Il reprend ma carte et la contrôle une seconde fois : « Ha oui, c'est bon ! »
Mais le mystère reste entier.