Expériences cliniques. — Dans les écouteurs, au boulot : Images du futur, le deuxième album du groupe montréalais Suuns sorti ce 5 mars 2013. Ils sont toujours aussi doués pour distordre les guitares et donner à leurs chansons la précision rythmique d'un bon vieux morceau de krautrock, mais j'ai comme une impression de déjà-vu : le début de « 2020 » ressemble au début de « Up Past the Nursery » (sur leur premier album, Zeroes QC), « Edie's Dream » rappelle les Liars en moins dissonant et « Sunspot » — « Ô Seigneur Dieu ! », comme dirait Dalida ou bien Monsieur Esclave — « Sunspot » est un copier-coller d'une chanson de Clinic ! Je ne sais pas exactement laquelle (sans doute un peu toutes, en fait), mais Clinic est là dès les quinze premières secondes : mêmes nappes de synthétiseurs, mêmes rythmes chirurgicaux, même timbre de voix nasillard... Et pour arriver à produire un son aussi particulier que celui de Clinic sans le vouloir, faut le vouloir ! — Je réécoute l'album une deuxième fois et je remarque que cette ressemblance avec le groupe de Liverpool n'est pas un fait isolé ; qu'elle « saute aux oreilles » sur la plupart des morceaux. Référence épisodique dans le premier album (quoique !), elle devient incontournable dans le deuxième. On se consolera en se disant qu'ils ont au moins eu le très bon goût de prendre pour modèle principal l'un des groupes les plus originaux de la dernière décennie encore en exercice.
« And what you see is really what you see.
What you, what you, what you, what you... »
What you, what you, what you, what you... »
Mais qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire ?
(Est-ce un discours philosophique sur la perception du réel ?)
Midas. — Ces quatre musiciens-là transforment tout ce qu'ils touchent en or massif ; ils n'ont même pas besoin d'instruments : même a capella dans la rue, ils sont parfaitement capables de produire un lingot. C'est comme ça : Grizzly Bear est un groupe de talentueux alchimistes et Shields un album dont chaque facette a été façonnée à coup de pierre philosophale. — C'est en tout cas la première pensée qui m'est parvenue lorsque j'ai lu ce que Kris Moyes, réalisateur et producteur australien, avait en tête lorsqu'il a travaillé sur le clip vidéo de la chanson « Gun-Shy » (la version complète du texte, en anglais, se trouve ici ; la traduction française qui suit est approximative) : « L'idée est venue d'une question : "Si l'on pouvait voir l'énergie créative de chaque organisme vivant, à quoi ressemblerait-elle ?" Ed, Daniel, T et Bear [Edward Droste, Daniel Rossen, Chris Taylor et Chris Bear, les quatre membres du groupe] démontrent où se situe leur énergie créative en extrayant leurs cheveux, leurs ongles, leur peau, leur sueur et leur sang. Il s'agit d'une invitation à un très rare aperçu de ce à quoi l'énergie créative pourrait ressembler à un niveau moléculaire si nous pouvions la percevoir. (...) La seconde partie de la vidéo s'inscrit dans une perspective plus métaphysique, voire alchimique. Nous y voyons l'impact qu'ils ont sur leur environnement, faisant frémir des feuilles ou bouillir une rivière, expirant de la vapeur, planant dans les airs, scintillant comme des insectes sous le soleil de l'après-midi, etc. (...) Lors du tournage de ce clip, nous avons employé diverses méthodes scientifiques de connaissance du monde naturel (comme l'interférence sur un film de savon, la cristallisation rapide ou encore la décomposition du spectre lumineux) pour créer l'impression que ces phénomènes visuels venaient d'eux. (...) La science a essayé, sans succès, d'expliquer d'où provenait la créativité : pourquoi certains humains bénéficiaient d'un instinct créatif et pourquoi d'autres ne l'avaient pas ; pourquoi telle ou telle personne était bonne en dessin mais n'avait pas l'oreille musicale ; pourquoi telle ou telle autre était plus à l'aise avec une clarinette qu'avec une guitare ; ou encore pourquoi certains individus pouvaient jouer n'importe quel instrument avec lequel ils entraient en contact. » — Mettre en images ce genre de réflexion est pour le moins original. Le clip est fabuleux... et dérangeant aussi.
« All of the years, leaving me here, gun-shy... »
Promotion. — En janvier dernier, Gaston, compatriote du forum MonLégionnaire, a mis au monde un blog consacré à la musique. Après deux mois de vie secrète, il voudrait que l'heureux événement soit enfin connu de tous. Esildut, une ancienne dudit forum avec qui je garde quelques rares contacts, m'avait parlé de cette naissance en ces termes : « Vos goûts musicaux ne sont peut-être pas identiques, mais sur la démarche, les explications, le partage, vous devriez vous retrouver. » — Ça s'appelle « Le Son de Gaston » et c'est ici que ça se passe !