Archives annuelles : 2013

... thanks for all the fish!

« Il est un fait important (et bien connu) que les choses ne sont pas toujours conformes aux apparences. Par exemple, sur la planète Terre, l'homme a toujours considéré qu'il était plus intelligent que les dauphins sous prétexte qu'il avait inventé toutes sortes de choses — la roue, New York, les guerres, etc. — tandis que les dauphins quant à eux n'avaient jamais rien su faire d'autre que déconner dans l'eau et plus généralement prendre du bon temps. Mais, réciproquement, les dauphins s'étaient toujours crus bien plus intelligents que les hommes — et précisément pour les mêmes raisons. »
(Douglas Adams, Le Guide du voyageur galactique, 1979.)

Poisson. — Je pensais que personne ne goberait mon article d'hier : posté en date du premier avril, avec une référence appuyée aux trois premiers mots du titre du quatrième volume de la série du Guide du voyageur galactique de Douglas Adams, So Long, and Thanks for All the Fish (Salut, et encore merci pour le poisson en français), le morceau me paraissait par trop indigeste pour avoir la moindre chance de passer. Et pourtant, il faut croire que cet article était assez crédible pour être pris au sérieux par ces quelques lecteurs et lectrices qui m'ont envoyé de courts messages d'adieu ou de remerciement ! — Peut-être est-ce en partie parce que Léandra et Andrew ont eu la bonne idée, hier soir, de me conseiller de rédiger rapidement trois petits articles d'affilée : deux pour préparer le clou, le dernier pour l'enfoncer. En plus de donner un squelette au poisson, l'idée avait un autre grand mérite : celui de me permettre de rattraper ce retard de publication qui, tel un dauphin, avait recommencé à pointer le bout de son museau.

Malade. — Ceci n'est pas un poisson : je suis à nouveau malade depuis la nuit de vendredi à samedi. Ce mardi matin, au réveil, la situation s'est empirée : mes pensées sont confuses, j'ai le nez qui coule, je suis au bord de l'aphonie et j'ai la gorge qui me fait mal lorsque je tousse ou lorsque j'avale. Je me rends tout de même au boulot mais mon état décline encore dans la journée. Si j'étais médecin, je jurerais que j'ai un début d'angine... Mais je ne suis pas médecin. — En tout cas, je suis presque tout le temps malade : c'est une abomination. Si je disposais d'un calendrier mural, il serait plus aisé d'apposer une croix aux jours durant lesquels je suis bien portant : ça userait moins d'encre... Mais je n'ai pas de calendrier mural.

Scooby-Doo Layton. — Le Professeur Layton partage avec Scooby-Doo et ses quatre compagnons du gang Mystère la même curieuse aptitude à vivre des histoires tordues, voire carrément tirées par les cheveux. Gamin, lorsque je regardais un épisode de Scooby-Doo, où es-tu ?, j'étais déjà marqué par le côté totalement saugrenu du traditionnel dénouement final, cette fameuse scène où l'on voit Fred Jones enlever le masque du méchant et l'astucieuse Véra Dinkley expliquer de manière très rationnelle l'illusion qui est à l'origine de l'apparition des spectres, momies et autres zombies qui peuplent ce dessin (mal) animé... C'est lors de ce dénouement que l'on s'aperçoit que le méchant fantôme plus vrai que nature qui a poursuivi cet idiot de Sammy pendant la majeure partie de l'épisode, sur fond de décor répété à l'infini, n'était en fait qu'un bête jeu d'ombres et de lumières, ou bien encore que le balai de la terrifiante sorcière ne volait pas vraiment, non, non, pas du tout : il était dirigé par un système très complexe de câbles transparents, oui, oui !... Tout cela parce que le propriétaire du terrain voulait continuer à avoir accès à cette vieille mine remplie d'or, mais oui, tout s'explique désormais ! — Avec le Professeur Layton, c'est un peu le même principe qui est à l'œuvre : à la fin de l'histoire, le grand archéologue-énigmologue a parfaitement dénoué tous les fils et compris que tout cela n'était qu'un très subtil jeu d'apparences : cette petite fille n'était pas vraiment une petite fille mais un homme déguisé en petite fille, tellement bien déguisé que tout le monde n'y voyait que du feu ; cette charmante ville dans laquelle ils se baladaient depuis des heures n'était pas vraiment une charmante ville mais le fruit d'hallucinations causées par des gaz s'échappant d'anciennes excavations ; ce monstre n'était pas vraiment un monstre mais deux créatures distinctes, l'une organique, l'autre mécanique, qui, en se battant, donnaient l'impression d'être une seule et unique entité ; etc. Ça ne tient pas du tout la route, mais merci quand même, professeur Layton !

... and...

« J’adore les dates limites. J’aime le son qu'elles font lorsqu'on les dépasse à toute allure. »
(Douglas Adams)

J'avais prévu un long message d'adieu, mais ce soir, Léandra et Andrew m'en ont dissuadé autour de plusieurs morceaux de pizza (!) : renoncer et s'en aller sans plus de cérémonie, voilà un comportement des plus nobles ! — « Tu n'as qu'à écrire le plus simplement du monde que tu arrêtes, et puis c'est tout ! », m'a conseillé Léandra. « Tes lecteurs comprendront, j'en suis sûre... »

Donc voilà : après presque deux ans d'écriture quotidienne, j'ai décidé d'arrêter ce journal. Peut-être reviendrai-je dans les prochains mois avec un nouveau projet. Peut-être pas. (Une partie de mon esprit me chuchote : « À quoi bon ? »)

Avant de « rendre l'antenne », je tenais à remercier tous ceux et celles qui m'ont suivi assidûment. Le nombre de lecteurs importe peu ; seule importe la qualité de ceux qui lisent !

— Merci, merci, merci ! —

... long...

« Exiger l'immortalité de l'individu, c'est vouloir perpétuer une erreur à l'infini. »
(Schopenhauer)

Je n'ai rien à dire ce soir... Oh ! Et si je parlais de The Big Bang Theory ?
Je n'ai rien à dire ce soir... Eh bien ! Je n'ai qu'à traiter de mon quotidien !
Je n'ai rien à dire ce soir... Oh ! Et pourquoi ne pas mentionner ce groupe de rock découvert récemment ?
Je n'ai rien à dire ce soir... Eh bien ! Je peux toujours parler de Wittgenstein, de Nietzsche ou de Kraus !

Ce retard qui s'accumule sans cesse, malgré cette volonté de ne pas permettre son accumulation !
Ces complications familiales qui s'ajoutent à tout le reste !
Cette envie de dormir plus que trois heures par nuit !
Cette envie de rencontrer des humain(e)s en d'autres lieux que dans ces putain de livres !
Cette envie de reconstruire une vie ! — ma vie.

« Je suis las, las, las... », comme dirait Gracchus Pleindastus.

So...

« L'immortalité de la rose consiste dans le fait qu'elle est la sœur jumelle des roses futures. »
(Ramón Gómez de la Serna)

Que dire sans que ce ne soit une répétition ?
Je me répète sans cesse, entre routine ancienne et routine nouvelle, entre soirée improductive et soirée improductive.

Est-il vraiment nécessaire que je décrive chaque jour de ma vie ?
Est-il vraiment nécessaire que je passe des heures entières à chercher mes mots et mes phrases ?
Est-il vraiment nécessaire que je traque dans ces textes surannés la faute d'orthographe et l'erreur de grammaire ?
Est-il vraiment nécessaire que je me tracasse sans cesse à propos du « sujet du jour », au point de chercher matière à réflexion dans chaque petite expérience quotidienne insignifiante ?

Retour de classes vertes

À trois heures tapantes, j'arrive en vue de la place Saint-Aubain à Namur, au moment où les enfants de première et deuxième primaires descendent du car. Ils sont de retour de leur semaine de classes vertes à Saint-Vaast, dans la région du Centre. Gaëlle court vers moi en pleurant : « Je dois vraiment aller faire pipi mais Madame n'a pas voulu, bou-hou-hou !
— Y avait pas de toilettes dans le car ?
Non-on-on-on, y avait pas de toilettes dans le ca-a-a-ar ! »

Sur le trajet du retour, Gaëlle a déjà oublié qu'elle avait un besoin pressant : « Durant le voyage, j'ai rencontré deux nouveaux amoureux. Donc, maintenant, en tout, j'en ai quatre-vingt-quatre ! »

Comme chaque vendredi (ou presque), nous nous reposons à notre table habituelle, à la brasserie « Le Flandre ». Gaëlle retrouve sa Nintendo 3DS devant un verre de grenadine et un paquet de chips. (Curieuse impression de déjà-vu.)

Le vieux monsieur au discours incohérent, qui voulait absolument boire un verre avec moi la semaine dernière, n'est pas là aujourd'hui (ouf !), mais j'ai tout de même droit à la visite d'un autre vieux monsieur qui semble captivé par la faculté de ma fille à jongler avec les fonctionnalités de sa console de jeux. — Rectification : tout compte fait, il s'agissait d'un prétexte bateau pour engager la conversation avec la vieille dame seule assise à ma droite (re-ouf !).

« J'ai une amie qui s'appelle "Océane". Si ça avait été un garçon, il se serait appelé "Océan"... C'est amusant, tu ne trouves pas ? »

Colombine, la petite fille avec qui Gaëlle a lié connaissance le 22 février dernier, débarque dans la brasserie avec sa maman. Elle se déplace en béquilles. « Que s'est-il passé ? Tu as fait une vilaine chute ?
— Non, pas du tout. Un gros garçon m'est tombé sur les jambes... »

Gaëlle va s'installer à la table de Colombine et lui montre ses jeux : Pokémon Rumble, Professeur Layton et la Boîte de Pandore et Super Mario 3D Land. Elle revient vers moi : « Papa, papa ! Tu peux résoudre cette énigme ? Il faut que le vent souffle mais on ne comprend pas comment faire ! », puis elle repart, avant de revenir : « Papa, papa ! C'est la fin du jeu Layton ! », puis elle repart, avant de revenir à nouveau : « Papa, papa ! C'est embêtant : elle joue à Mario et ne veut plus me rendre ma console ! »

Dans le train de retour, Gaëlle et moi prenons cette fois-ci le rôle du duo comique improvisé. Elle me pose des questions saugrenues et je lui réponds à chaque fois de manière ironique. Ça fait rire les étudiantes et ça fait passer le temps...

Mayonnaise

Souvenir d'université*. — (Il y a treize ou quatorze ans environ.) Nous nous asseyons à la table d'un restaurant, aujourd'hui disparu, du rond-point du Cimetière d'Ixelles. Un serveur vient prendre notre commande et nous demande gentiment ce que nous faisons comme études. « L'histoire ! », déclarons-nous de concert. « Ha, c'est cool, ça ! », répond le serveur. Mais à peine celui-ci est-il reparti en cuisine que mon ami Hamilton (deuxième du nom donc) ajoute, légèrement dédaigneux : « Ben oui quoi, on n'a pas envie de rester serveur toute notre vie, nous ! » Rires. La remarque, d'une condescendance crasse, m'a semble-t-il marqué.

Condescendance. — Ce jeudi soir, buvant tranquillement un Orval à la brasserie de la gare des Guillemins à Liège, j'apprends ce que c'est que d'être vraiment condescendant et désagréable envers un serveur. Une dame s'assied à ma droite. Elle demande la carte et râle presque aussitôt parce cette dernière n'arrive pas assez vite à son goût. Un serveur vient prendre la commande : « Ha, enfin ! » Le service prend trop de temps pour elle. Attendant son plat pendant dix minutes, elle observe le monde alentour et rumine : « Ils se foutent de ma gueule, c'est ça ? ». Elle happe une serveuse et aboie : « Votre collègue m'a oubliée ?
— Il est en pause, mais votre plat va bientôt arriver, Madame.
— Oui, eh bien il peut aller se rhabiller, votre collègue ! Ha ! »
Le serveur revient de sa pause et dépose le plat sur la table de la cliente aigrie, qui lance d'un air sardonique, sans le regarder : « Et vous m'apporterez aussi tout le reste !
— Tout le reste, Madame ? »
Elle prend un air peiné pour annoncer, toujours les yeux dans le vague : « Mayonnaise, ketchup, moutarde, sel, poivre, sauce anglaise, beurre, pain... Tout le reste quoi ! » Elle fait un geste de la main comme pour signifier : « Tu devrais déjà être parti chercher tout ce que je t'ai demandé, mon gaillard ! » Le serveur revient avec un plateau contenant tout sauf... Misère ! « Où est la mayonnaise ?
— Ha oui, la mayonnaise... Désolé, je vous apporte cela tout de suite.
— Ouais, ouais, c'est ça, c'est ça. Pfff, mais c'est quoi ce service de merde ? »
Ma tête se remplit de scénarios tous plus séduisants les uns que les autres, dont un dans lequel je lui fais bouffer sa putain de mayonnaise par les trous de nez ou encore un autre contenant une recette originale de shampooing à base de sauce anglaise. — Mais je me retiens de mettre en pratique l'un de ces fantasmes et me contente de noter l'anecdote dans un carnet, pour restitution ultérieure.

Zombies et contrôleur. — Ce contrôleur, dans le train de sept heures du soir, passe à côté de mon siège, me voit devant un épisode de The Big Bang Theory, continue son chemin, s'arrête, puis revient sur ses pas pour me demander : « Excusez-moi, est-ce que c'est avec vous que j'ai discuté de The Walking Dead la semaine dernière dans le train ? »
(Lit-il mon journal ?)
« Non, ce n'est pas avec moi, dis-je.
— Ha... Je dois confondre avec un autre homme qui avait la même taille, la même corpulence et le même visage que vous alors !
— Oui, ça me paraît indubitable. Par contre, il se fait que je vois très bien de quoi vous voulez parler ! C'est cette histoire de...
— ... morts-vivants, oui !
— Celle qui questionne l'éthique des...
— ... relations humaines, tout à fait ! Bonne soirée ! »
Et il s'en va.
(Je vais vraiment devenir paranoïaque, si ça continue.)

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* Comme je suis en ce moment dans une phase « réminiscence », j'en profite pour inaugurer un volet [Souvenir] à mon journal, selon le même principe que les catégories [Rêve] et [Déjà-vu].

Bazinga!

« Tu devrais regarder The Big Bang Theory », m'avait conseillé Zapata il y a de cela trois ou quatre ans. « Quand j'ai vu les premiers épisodes, j'ai tout de suite pensé à toi : "Ça, c'est une série qui plairait à Hamilton !" » Et Zapata de me raconter cette scène au cours de laquelle Sheldon Cooper explique à son ami et colocataire Leonard Hofstadter ses dernières réflexions sur le voyage temporel : s'il avait fabriqué une machine à voyager dans le temps, il serait revenu dans le passé pour se la donner, éliminant de la sorte la nécessité de l'inventer en premier lieu ! (Début du quatrième épisode de la première saison, « The Luminous Fish Effect », 2007.)

Oui, le contenu semblait très alléchant, mais j'ai toujours eu quelques difficultés à adhérer au format de la sitcom : une vingtaine de minutes destinées à s'intercaler entre de nombreuses pauses publicitaires ; des saynètes à l'humour immédiat acceptant mal les longs développements... Un argument que Yama détaillait tout récemment dans le train de retour vers Bruxelles : les sitcoms ne permettent que très rarement la mise en place d'une histoire suivie et transversale. Elle ajoutait néanmoins : « À part Seinfeld, évidemment. » — À part Seinfeld, oui, évidemment, mais... mais... je n'ai jamais vu un seul épisode de Seinfeld ! (Une confession qui avait fait sursauter Flippo environ un an plus tôt dans le même train de retour vers Bruxelles : « Comment ? Tu n'as jamais vu un seul épisode de Seinfeld ? ») Terriblement gêné, j'ai donc préféré taire mon ignorance devant Yama afin qu'elle découvre par elle-même en différé l'horrible vérité via mon blog : non, je n'ai jamais vu un seul épisode de Seinfeld... mais je ne demande qu'à apprendre, n'est-ce pas ?

Depuis des semaines, j'étais à la recherche d'une simple série (par « simple série », comprendre : une série constituée de courts épisodes faciles à digérer et non une histoire de très longue haleine « à la The Wire »). Depuis des semaines, pour me détendre la nuit, je regardais en boucle de vieux épisodes de South Park déjà vus des dizaines de fois. Mais un statut de Doëlle dans lequel elle affirmait vouloir devenir la meilleure amie de Sheldon Cooper m'a remis en mémoire The Big Bang Theory. — Doëlle sera-t-elle contente d'apprendre qu'elle a légèrement modifié le cours de ma vie en me rappelant indirectement l'existence de cette sitcom qui était depuis des années sur ma liste d'attente virtuelle des « choses à découvrir » ? Je suppose que oui.

The Big Bang Theory est sans doute la chose la plus diablement comique que j'aie vue depuis très, très longtemps. Je crois même que je n'ai pas été sujet à de pareils fous rires depuis l'époque où je visionnais l'intégrale du Monty Python's Flying Circus. C'est dire ! Il faut préciser que le personnage de Sheldon Cooper, interprété par Jim Parsons, est particulièrement bien conçu et que ce dernier porte presque toute la série à bras-le-corps : physicien surdoué spécialiste de la théorie des cordes, doté d'une mémoire exceptionnelle et d'une culture hors norme, sociopathe, vénérant le personnage de Spock dans Star Trek, conscient de son génie, un brin hypocondriaque, détestant l'inattendu (par exemple, il a un emplacement de prédilection dans chaque appartement qu'il fréquente et ne veut/peut s'asseoir nulle part ailleurs), cultivant l'analogie et l'ironie, il est parfait. Et en plus — ça fera plaisir à Léandra —, il est grand et effilé.

Et ces rires que l'on entend constamment en arrière-plan, est-ce grave docteur ? — Non, ça fait partie du jeu. D'ailleurs, les brillants Monty Python utilisaient ce même procédé dans leur cirque, sans que cela ne nuise en quoi que ce soit à la qualité du show... De même que Seinfeld, apparemment. Amen !

« Why hast thou forsaken me, O deity whose existence I doubt? » :
voilà ce qui arrive quand Sheldon Cooper, alias Sheldor, elfe de sang niveau 85,
se fait pirater son compte sur World of Warcraft.

Goélands

Pandore. — Dans toute bonne série mettant en scène un gentleman (Sherlock Holmes, Hercule Poirot, Arsène Lupin, John Steed, etc.), il faut au bas mot un épisode qui se déroule, en totalité ou en partie, dans un train de très grand confort, avec compartiment privé, restaurant et tout le tralala. Il n'est donc pas du tout étonnant de retrouver Hershel Layton, éminent archéologue amateur d'énigmes, bla-bla-bla, pour un voyage dans le luxueux Molentary Express à l'occasion de sa deuxième aventure, Professeur Layton et la boîte de Pandore sur Nintendo DS. Toujours le même concept : on se rend dans de mystérieuses localités peuplées de mystérieux habitants et on se rend compte que la fondation de la localité est elle-même mystérieuse, ou encore que telle petite fille est mystérieuse et que la grande tour effrayante qui se dresse à l'horizon est... mystérieuse elle aussi. — Grand Dieu ! Serais-je en train de me lasser de ce jeu ? Ou bien suis-je seulement jaloux des succès répétés que rencontre le Professeur dans la résolution de ses propres énigmes ?

Des perles aux pourceaux. — « Is anybody listening? », peut-on entendre à la toute fin de la superbe « Riegal » de Pearls Before Swine : un cri de détresse lancé depuis un bateau en train de sombrer, mais aussi un joli parallèle avec l'absence de succès de ce groupe psychédélique actif de 1967 à 1971. — Il avait pourtant tout pour plaire, sacrebleu : des pochettes se référant aux peintures de Bosch, Bruegel ou Bellini ; de l'humour ; de la subtilité ; de la mélancolie ; des mélodies somptueuses ; une instrumentation des plus délicates... En 1971, Tom Rapp, le cerveau derrière toutes ces perles, a connu une courte période solo avant d'abandonner la musique pour embrasser une carrière d'avocat. En guise de consolation, il nous a légué dix albums, dont un petit dernier sorti en 1999 !

« (Oh Dear) Miss Morse » (One Nation Underground, 1967) : ou comment arriver à faire passer le mot « Fuck » à la radio sans se faire censurer. (« Dit Dit Dah Dit. Dit Dit Dah. Dah Dit Dah Dit. Dah Dit Dah », « Dit » étant le point et « Dah » le tiret.)

(Oh Dear) Miss Morse by Pearls Before Swine on Grooveshark

 
« Riegal » (The Use of Ashes, 1970) : ma préférée de toute, racontant le naufrage d'un navire de prisonniers en 1944. La progression mélodique, la narration, la tension dramatique : tout, absolument tout dans cette chanson est parfaitement à sa place.


Riegal by Pearls Before Swine on Grooveshark

« Song About A Rose » (The Use of Ashes) : « With the children of Fribourg and the good thief standing by, we consort in silent rendezvous and call the world a lie... » En plus de savoir à quel moment faire démarrer la flûte pour créer un effet poignant, indubitablement, ce type savait écrire.

Song About a Rose by Pearls Before Swine on Grooveshark

« Snow Queen » (Beautiful Lies You Could Live In, 1971) : sans doute une des mélodies les plus tristes jamais écrites, avec une composition au piano typique du style de Tom Rapp.

Snow Queen by Pearls Before Swine on Grooveshark

« Departure and worry »

« Les paroles d'Halleck lui revinrent : "On se bat quand il le faut, et pas lorsqu'on en a le cœur ! Garde donc ton cœur pour l'amour ou pour jouer de la balisette. Ne le mêle pas au combat !" »
(Frank Herbert, Dune.)

Choqué ? — Dois-je être triste ? Dois-je pleurer ? Dois-je être bouleversé par ce que je viens d'apprendre ? Dois-je ressentir quoi que ce soit d'autre qu'un certain dégoût au regard de ce cruel manque d'honnêteté, de cette flagrante tromperie de la part d'une personne en qui ma mère avait toute confiance ? Apparemment, la norme « voudrait » que oui ; la norme voudrait que je sois triste et sous le choc. Il paraît d'ailleurs qu'une de mes cousines a pleuré en apprenant la nouvelle, non pas à cause de la nouvelle en tant que telle, mais à cause du choc que celle-ci aurait dû me causer. — J'ai beau remuer le moindre recoin de ma conscience, je n'y trouve nul choc, ni quoi que ce soit allant dans ce sens. Comme je l'écrivais à Andrew tout dernièrement, j'hésite constamment entre l'analyse froide, la consternation et l'ironie. De toute façon, être estomaqué, réagir avec ses tripes, ne servirait strictement à rien et nuirait gravement à la réflexion. (Désolé d'être si circonspect à ce sujet. Des explications plus complètes finiront bien par arriver un jour ou l'autre.) 
Zombies et éthique. — Je rejoins Léandra et Andrew en début de soirée à la Maison du Peuple, puis nous allons tous les trois chez la première pour un repas improvisé. Léandra parle entre autres de ce Parisien avec qui elle est en contact en ce moment : « D'habitude, il passe son temps dans les expositions ou les sorties culturelles mais, en ce moment, il me dit qu'il n'y a rien d'intéressant à voir. Alors il s'est rabattu sur un jeu vidéo : The Walking Dead... » Elle attrape son smartphone et retrouve le message de son correspondant : « Un pur chef-d’œuvre qui questionne l'éthique dans nos relations aux autres. » — Et moi qui croyais qu'il suffisait de s'armer d'un riot gun et de leur dégommer la cervelle, à ces saloperies de zombies !
Quid novi? Leandra cattum habebit! — Elle ira le chercher dans un mois environ et l'appellera « Quid », comme le célèbre jeu Ravensburger mais aussi comme ce pronom interrogatif latin utilisé dans la très belle « Quid non mortalia pectora cogis, auri sacra fames? » de Virgile (« À quels forfaits pousses-tu les cœurs des hommes, soif sacrée de l'or ? »). Mais qu'importe le nom ! Avant de me rendre chez Léandra, il faudra désormais que je me gave encore une fois de cétirizine pour ne pas passer mon temps à me gratter ou à renifler. Il semblerait que Léandra déteste les personnes qui reniflent.

Jason Molina (1973-2013). — Farewell, Jason! Ta voix, tes textes, ta musique — ta simplicité et ta sincérité ! — manqueront terriblement au monde (même si le monde, dans son ensemble, ne s'en est pas encore rendu compte).

 Captain Badass by Songs: Ohia on Grooveshark

« We get no second chance in this life
We get no second chance in this life
You won't have to think twice
If it's love, you will know »