15. « À chaque casserole son couvercle »

15.1. Sur la grande cour devant la maison, toute la famille est réunie. Grande-tante Marcella — 77 ans au compteur — est là. Elle parle, parle, parle encore. Elle n'arrête pas de parler. Quand sa fille la rejoint en fin d'après-midi, elle parle aussi. À deux, elles parlent, parlent, parlent, encore et toujours. Elles n'arrêtent pas de parler... Deux fois plus.

15.2.
Ce flot continu de paroles me rend nerveux. Tellement nerveux qu'après deux heures de logorrhée mère/fille presque ininterrompue, je ressens le besoin de m'enfermer dix minutes dans ma chambre, avant de reprendre le chemin du Front.

15.3. « Toujours pas de copine, Hamilton ? me demande Marcella.
(Je quitte lentement des yeux mon écran d'ordinateur pour la regarder.)
— Non, toujours pas.
— Et c'est pour quand ?
— Jamais.
Ooooh... À chaque casserole son couvercle, pourtant, comme on dit.
— Ouais, peut-être, mais là, j'ai dévalisé les armoires de la cuisine sans en trouver une seule.
— Les casseroles sont trop petites pour ton couvercle, c'est ça qu'il y a !
— Oui, c'est ça... "Les casseroles sont trop petites." »

15.4. « Michel Daerden, il avait un gentil regard. C'est ça, il avait un regard gentil. Moi, j'ai un regard méchant. Je n'en peux rien. J'ai un regard méchant. Je suis née comme ça. Mais Michel Daerden, il avait un regard gentil, ha ouais, ha ouais, ouais, ouais ! »

15.5. « Et Michèle Martin ? Moi, je ne sais pas... Je ne suis pas très futée, mais vous en pensez quoi, vous, de sa libération ? Je ne sais pas, moi, bah ouais, ha ouais. Non, je ne sais pas... Je ne sais pas, je ne sais pas. Elle n'aurait pas dû sortir de sa prison, non ? Et toi Hamilton ? Tu en penses quoi, toi qui es intelligent ?
— Euh... »

15.6. La fille : « Il travaillait dans l'Horéca mais il a fait un gros burn out. Et il a dû arrêter de travailler pendant un an. Sans rire, avec sa dépression, s'il avait continué, il aurait tué tout le monde dans le restaurant : les clients, son patron... » — Ha ! Comme John Cleese avec son hachoir dans le fameux sketch du restaurant du Monty Python Flying Circus !
« You bastards! You vicious, heartless bastards! Look what you've 
done to him! He's worked his fingers to the bone to make this place 
what it is, and you come in with your petty feeble quibbling and 
you grind him into the dirt, this fine, honourable man, whose boots 
you are not worthy to kiss. Oh, it makes me mad. Maaaaaad! »
15.7. « Oui, Gaëlle, pour le moment, elle croit en Dieu, tout ça... 
— Ha ? Roberto, lui, il a des "visions", m'explique Aude. Il affirme qu'il est capable de voir les gens à travers les portes et les murs. Ce genre de chose... »
(L'une se prend pour Jésus, l'autre pour Superman : ça promet !)

15.8. « Moi, je vois des gens la nuit, raconte la même (40 ans). Je me réveille et je vois des silhouettes à la périphérie de mon regard. Je suis certaine de ne pas rêver et qu'il y a vraiment un inconnu. Alors, je sursaute, je crie et Fridric me demande ce qu'il y a... Mais j'ai peur de passer pour une folle, alors je fais semblant de rien.
— Tu vois un inconnu dans ta chambre la nuit et tu fais "semblant de rien" ? »

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