Crac !

Désormais, je comprends vraiment la signification première du mot « craquer » : quand on laisse malencontreusement un membre (le pouce de la main droite, par exemple) dans l'ébrasement d'une porte que l'on referme, ça fait « crac » ! — Ou bien alors plutôt « croc » ? Je dois bien avouer que, sur le moment même, je n'ai pas eu le temps de me poser beaucoup de questions par rapport au son entendu.

L'éclair et le tonnerre : on voit la foudre avant de l'entendre. — Le bruit et la douleur : on entend le son avant d'avoir mal.

Entre « craquer » et « croquer », il n'y a qu'une lettre de différence. La langue française me rappelle en filigrane cette vérité : amour et sexe sont toujours liés. Quand je craque pour une femme, je veux aussi la croquer.

Fin de semaine prochaine, dans le cadre de mon travail, je devrai tenir un stand lors d'un congrès syndical à Blankenberge. Le coordinateur m'envoie ce message : « Nous avons réservé une chambre individuelle pour vous à l'hôtel Aazaert pour le 10 et le 11 décembre. Le déjeuner est compris. Il y aura un repas prévu le 11 au soir. » (Ça me rappelle le domestique Max et sa voix de robot dans Le Manoir de Mortevielle : « Les repas sont à douze et dix-neuf heures. Il y a un recueillement à la chapelle à dix heures, tous les jours. ») Mais une question me taraude : « Doit-on participer financièrement à tout cela ? » « Bien sûr que non, tout est aux frais du syndicat ! » — Je vais enfin pouvoir réaliser un rêve : me promener la nuit sur la jetée, avec pour seule compagnie le vent froid et le bruit du ressac !

J'ai besoin de trois euros en pièces de monnaie pour la consigne de la gare de Namur. À Bruxelles-Midi, je prévois donc le coup : je vais m'acheter de quoi manger chez EXKi de telle manière qu'en donnant un billet de cinquante au caissier, ce dernier doive me rendre au moins les trois euros en question : simple, logique, efficace. J'arrive à un total de 11 euros et 5 centimes. Parfait. Je donne le billet de cinquante au caissier et lui dis : « J'ai les 5 centimes si vous voulez ! », puis en regardant mieux dans mon portefeuille : « En fait, j'ai même un euro et 5 centimes, comme ça vous me rendez pile quarante ! » — En sortant du magasin, une autre partie de ma conscience (celle qui s'était occupée de tout le raisonnement en rapport avec la consigne) me tance vertement : « Mon petit Hamilton, tu sais, n'est-ce pas, que tu viens de faire quelque chose de particulièrement stupide ? »

Mais il en faut plus au petit Hamilton pour être abattu : et si j'allais m'acheter un café pour le voyage en train ? Je sais qu'à l'Espace Café, le lungo est à 1,90. Si je donne un billet de cinq, on me rendra 3,10. Parfait. — C'est le changement de service, semble-t-il : un gigantesque serveur de plus de deux mètres, du genre « basketteur américain » (c'est un stéréotype, mais quand je le vois, je l'imagine vraiment marquer plein de points en s'accrochant au panier), nettoie des dessous-de-plat et me fait patienter quelques minutes. Lorsque je peux enfin commander mon lungo trois minutes plus tard environ, il s'excuse : « Oh, c'était seulement pour un lungo ? J'aurais pu vous le faire tout de suite si c'était seulement un lungo que vous vouliez. Désolé. je suis très gêné. » (Ça ne me dérangeait pas d'attendre. Sa réaction est curieuse.)

« J'ai pleuré dans la cour de récréation cet après-midi : J'ai appris qu'à sa nouvelle école, Alder tenait une autre fille par la main. Par la main, tu te rends compte ? Je me suis sentie complètement abandonnée ! »

Le serveur du Flandre, sûr de lui (c'est un crâneur) : « On dit une Orval et pas un Orval. Le mot "Orval" signifie quelque chose, et ce quelque chose est féminin. » Moi : « Oui, ça signifie "Val d'or", donc aux dernières nouvelles, c'est masculin. » (Échec et mat ?)

Ma mère et ma tante disent souvent de ma grand-mère qu'elle devient acariâtre, mais lorsque je discute avec celle-ci (par exemple ce soir pendant une petite heure), je n'ai pas du tout ce sentiment. Peut-être le courant passerait-il mieux si elles lui parlaient sans a priori, comme à une humaine qui est encore capable d'émettre des pensées intéressantes et d'échanger des idées, et non comme à un petit enfant dont il faut s'occuper en soupirant ?

« Je sais que ça ne me regarde pas et tu n'es pas obligé de me répondre, Hamilton, mais... tu ne sors toujours avec personne pour l'instant ?
— Oh non, Bobonne. Tu sais, je ne suis jamais sorti qu'avec Maïté dans ma vie ! Je n'ai jamais eu personne d'autre.
— Même pas des petites aventures passagères ?
— Je ne suis même pas certain de comprendre ce que l'on entend par "aventure". Je ne suis apparemment pas fait pour ce genre de choses. Je ne suis pas doué pour la légèreté en amour. » Puis je me rappelle la phrase d'Ibsen : « En fait, c'est tout ou rien. »

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