Fracasser son PC n'est PAS une solution

Depuis environ trois ans, je possède un PC portable ACER Aspire 5715Z : une saloperie d’ordinateur "tatoué". J’aurais mieux fait de me renseigner avant d’acheter un ordinateur de cette marque. En gros, ça signifie que la machine est matériellement marquée pour être utilisée avec une version précise de Windows. Ainsi, au premier lancement, "Windaube" s’installe à partir de la première partition (non accessible) du disque dur. Le but d’une telle manœuvre : empêcher le (forcément) vil utilisateur final d’utiliser une copie piratée du système d’exploitation. Dès le départ, et à moins de faire une série d’opérations compliquées pour un non-informaticien, on est obligé d’utiliser l’ignooooble Windows Vista, sans se poser de questions. Oui, Vista : ce putain d’OS à la con qui me demande tous les quarts d’heure si je veux faire une mise à jour importante pour le système ou si je suis certain que je veux réellement exécuter tel ou tel logiciel non reconnu. Heureusement, on peut désactiver toutes ces fonctions stupides et infantilisantes. J’avais aussi installé Ubuntu sur des partitions parallèles, via un système de double boot (l’un menant à Windows, l’autre à Linux), et une partition d’échange en FAT32. Mais je passe ici les détails. 
Cela fait presqu'un an que tout le monde – y compris moi-même – considère ce PC comme étant en fin de vie, voire carrément mort. Les gens se foutent ouvertement de ma gueule quand ils me voient avec cette épave, mais je les emmerde tous, cette bande de moules matérialistes ! Un serveur (un homme-serveur, pas un ordinateur-serveur, hein...) de la Maison du Peuple (celui qu’on appelait Étienne, qu’on trouvait sympa, mais qu’on n’a plus jamais vu depuis longtemps, sauf Léandra qui l’a croisé avec sa copine dans un transport en commun) m’a dit un jour : "Il a fait la guerre, votre ordi !". En effet ! Le pauvre est tombé plusieurs fois de mes mains. Le touchpad ne fonctionne plus (tant mieux !). Le graveur DVD ne s’ouvre plus depuis belle lurette – quelquefois, il émet un râle inquiétant et se met à tourner et à chauffer frénétiquement. J’ai renversé un café, puis une bière, puis de l’eau (provenant d’un pommeau de douche !) sur le clavier, dont certaines touches ont été désactivées à la suite de ces maladresses successives. J’ai essayé d’enlever les touches pour les nettoyer : depuis, je n’ai jamais réussi à les replacer ; en conséquence, je me trimballe constamment avec un gros clavier USB que je suis obligé de brancher à chaque fois que je veux utiliser correctement mon PC. Cerise sur le processeur : depuis deux semaines, Windows est devenu super-instable : l’explorateur s’arrêtait sans raison, le système s’éteignait sans arrêt, je recevais plein de messages d’erreur débiles, ceux du genre "Division par zéro".
Hier, j’avais envie de fracasser ce PC qui ne m’obéissait plus contre un des murs de la Maison du Peuple, puis plus tard contre le plancher de ma chambre (j’en aurais été capable, si je n’avais pas retenu ma froide colère). Aujourd’hui, au boulot, après une bonne nuit de sommeil, plutôt que de démolir mon vieil ordinateur – une solution idiote, j’en conviens, et qui aurait en outre pu blesser ma gentille collègue Wynka –, j’ai décidé de faire le grand saut : au démarrage, un petit "Alt-F10" puis une restauration de l’ordinateur aux paramètres d’usine, impliquant un formatage intégral des disques durs et une réinstallation en règle de Windows. Je l’ai laissé se remettre en route tout seul tranquillement, durant quelques heures, alors que je travaillais à mes appels d’offre (comme Vinge !).
J’ai sauvegardé le minimum. J’ai dû perdre des données importantes dans l’affaire, comme des photos, des textes, des mots de passe et des centaines de vidéos de séries et... d’autres films, mais je m’en fous : je recommence à zéro, avec un ordinateur tout neuf. Sauf que... Sauf que le touchpad ne fonctionne toujours pas (tant mieux !), ni le clavier (tant pis !), ni le lecteur DVD (m’en fout : je ne m’en sers jamais pluscomme dirait le Corbeau – au pire, en cas de besoin, je peux en acheter un externe). À la question récurrente de mes collègues ou de certains de mes amis consistant à me demander pourquoi je n’en achète pas un nouveau, je leur lance l’éternelle réponse hamiltonienne : "Je suis trop fauché". Je suis trop fauché depuis que j’ai eu pour la première fois de l’argent de poche, c’est-à-dire depuis vingt ans. Je ne supporte pas l’épargne ; je déteste faire un budget (en fait, je ne sais pas en faire un) ; je claque le moindre centime dans des trucs ridicules (comme un nouvel MP3 que je casse en deux semaines). Je m’en contrebalance dans la mesure où, ayant été éduqué dans une famille assez pauvre avec des besoins simples, le manque d'argent ne m’a jamais vraiment empêché de faire ce que j’avais envie de faire dans la vie.
Je suis en train de démolir mon image tout seul comme un grand et j’adore ça.
* * *
Je quitte le boulot plus tard. Le train a du retard. Je rejoins donc Emily... plus tard. Où ça ? Ai-je encore besoin de le mentionner ? Aujourd'hui, nous passerons la soirée à deux et sans ordinateur. Où est donc passé Walter ? Il aurait dû arriver, mais ce n'est pas le cas.

Emily raconte son rêve de la nuit dernière. Elle se trouve à une pompe à essence. Sa voiture de fonction est presque en panne sèche. Lorsqu'elle veut payer, sa carte Lukoil est refusée. Après une deuxième tentative, le paiement est accepté mais, soudain, il se passe quelque chose ! Comme dans une scène de cinéma, sa vision effectue un mouvement de caméra du style "zoom arrière". Elle voit ainsi qu'un tsunami se dirige vers la pompe à essence. Pendant qu'elle est inattentive, quelqu'un lui vole sa voiture. Dans son rêve, sa première pensée est pour le vol de sa voiture, et non pour la menace imminente de tsunami. On essaie de trouver une symbolique, mais on rame.
Emily me ramène chez moi en voiture, comme... d'habitude, oui.

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