Effluves

Cette soirée au restaurant constitue la toute première sortie d'Amy et Z. depuis l'accouchement. — Mais c'est que j'en serais presque fier !

Le cadeau d'anniversaire offert par Flippo : le premier LP du groupe allemand Amon Düül II, Phallus Dei (1969). C'est une des œuvres fondatrices du Krautrock à côté, évidemment, des premiers albums de Can.
« C'est un vinyle très difficile à trouver. Il m'a fallu le faire venir en import.
— C'est vrai ?
— Non. »

Le cadeau d'anniversaire offert par Amy et Z. : Agricola d'Uwe Rosenberg. — Si j'étudie chaque carte et chaque phase de jeu jusqu'à ce que ma mémoire déborde (et l'on sait qu'elle déborde très vite) ; et si je donne à mes pensées un piolet, afin qu'elles atteignent, par une ascension rude mais salutaire, la plus haute cime de l'entendement stratégique ; et si, enfin, je laisse reposer ce nouvel apprentissage jusqu'à ce que, décanté, il me donne une vision claire, précise, synoptique et éthérée de ce jeu, peut-être aurais-je alors une chance de les battre lors de la prochaine rencontre ? (Tout compte fait, miser sur leur fatigue post-natale me paraît beaucoup moins harassant.)

Une tentative de cosmogonie signée Z. : « L'extrémité du cosmos est un immense trou du cul qui remplit l'univers de fromage. » — Le fait d'avoir deux jumeaux en très bas âge et, surtout, de ne dormir que quelques heures par nuit change presque inévitablement la conception que l'on peut avoir du monde. Cette vision d'un « Dieu qui chie » ou d'un « Dieu-sphincter » ou encore, pour les athées que nous sommes, d'un « sphincter auto-alimenté » est drôlement puissante : elle engendre les pires et les meilleures images que je puisse me représenter en matière de caca et d'univers.

Je note la phrase sur le trou du cul et le fromage dans mon carnet.
« Hé, Hamil ! Tu n'es pas obligé de publier tout ce qu'on dit...
— Comment pourrais-je le publier ? Je n'ai même plus de blog ! »
(Je suis un menteur qui se cache derrière le masque d'un honnête homme.)

Pourquoi suis-je si pauvre ? — Z. me donne l'impression de ne comprendre ce que je raconte qu'à moitié (il n'est pas le premier) : donc je n'aurais aucune épargne et je maintiendrais toujours ma balance bancaire autour de zéro ? Mais pourquoi ? Il faudrait que je creuse ce « pourquoi » : la réponse me paraît évidente mais comment l'exprimer autrement que par : « Un compte bancaire bien fourni n'a aucune utilité dans la tombe » ?

Si cette après-soirée au Pantin effluve la liberté, au point de me rappeler les années d'université (sans enfant et sans travail donc), c'est sans doute parce que nous sommes tous un peu saouls — comme lors des années d'université justement.

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