Finis corporis insani

Le principe général d'un régime amaigrissant ressemble à celui d'un solde comptable : si les entrées sont plus élevées que les sorties, je gagne ; si les sorties sont plus élevées que les entrées, je perds. C'est d'une logique implacable, du moins à court terme : si je veux perdre du poids (autrement dit si je veux que mon corps aille chercher son énergie en brûlant le surplus de graisses qui m'entoure), il faut que j'inverse la balance des entrées et des sorties. Autrement dit : je dois ingurgiter moins de calories et, éventuellement, en brûler plus par jour. Et il faut que j'applique ce procédé pendant un certain nombre de semaines en suivant une discipline très stricte.

Je suis fatigué d'être essoufflé à tout bout de champ, de subir constamment tachycardie et extrasystoles, même si mon cardiologue me dit qu'il « n'est pas inquiet ». Il faut que je maigrisse, de dix kilogrammes au moins, de vingt si possible, et ce afin de revenir aux glorieux 75 kilogrammes de mes vingt ans.

J'ai donc établi, depuis lundi 10 mars, un régime à la radicalité stupéfiante (car c'est tout ou rien ; je ne peux pas faire dans les demi-mesures) : j'ai supprimé tout ce qui était superflu dans mon alimentation de la semaine : le pain au chocolat du matin, les biscuits de la pause café, le plat trop riche du midi au travail, la barre chocolatée de l'après-midi, le (fréquent) hamburger de dix-sept heures trente, les deux bières du train (que j'ai remplacées par un smoothie), la pizza préparée du soir, toutes les bières spéciales de la nuit (remplacées par une consommation élevée d'Earl Grey). Combiner l'arrêt complet d'alcool en semaine avec un régime me semble une très bonne idée : quitte à se priver, autant se priver de tout à la fois.

Cela se résume donc la plupart du temps à ne manger qu'à midi (des tartines de pain gris au fromage blanc, du poisson ou d'autres aliments pas trop caloriques) et à boire du café noir, du thé et du jus de fruits frais le reste du temps. Parfois une pomme le soir. C'est tout. Le vendredi et le samedi, je m'accorde un répit en buvant un ou deux Orval et en mangeant un repas complet en soirée. N'importe quel diététicien me dirait que mon comportement est absurde, que c'est une très mauvaise idée, qu'il faut que je mange de manière régulière et non pas une fois par jour. Je le vois me regarder avec ses yeux de chien battu : « Monsieur Evenvel, ce que vous faites n'a aucun sens. Vous allez vous bousiller le corps et, dans deux ans, vous aurez repris, si ce n'est dépassé, votre poids initial ! Connaissez-vous l'effet yo-yo ? » Fort heureusement, je n'ai pas consulté de diététicien. Un diététicien, c'est un peu comme un psychologue : ça ne me sert à rien.

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