Poète miniature

Je cherchais un tournevis cruciforme dans une vieille armoire de l'ancienne chambre de mes parents et je suis tombé par hasard sur mes vieux bulletins d'école primaire, méticuleusement rangés par ma mère dans une chemise en plastique. Je me souvenais de mes excellents résultats (l'époque bénie des 99 %), mais pas des commentaires laissés par mes institutrices. Cela va de « H. s'intéresse à tout ! C'est parfait ! Mais je ne lui interdis pas d'être soigneux ! » (2e primaire) à « H. se laisse influencer et essaye de se mettre en valeur par des actes et des paroles qui blessent ou vexent ! Un effort ! Tu perds des points inutilement ! » (6e primaire). À eux seuls, ces deux commentaires révèlent un certain nombre de caractéristiques comportementales que l'on retrouvera sans trop de peine dans ma personnalité d'adulte (rien n'a changé, je suis toujours un petit enfant) : le fait de m'intéresser à beaucoup (trop ?) de choses en même temps, d'être très peu soigneux et aussi, de temps à autre, de crâner, voire d'afficher un réel mépris pour certaines personnes jugées comme indignes d'intérêt.

Mais le plus beau commentaire de tous, dont je ne soupçonnais pas l'existence et que je lis avec beaucoup d'émotion aujourd'hui, est celui inscrit pour la fin de l'année scolaire à l'arrière de mon bulletin de 2e primaire, donc par la même institutrice qui au début de l'année trouvait parfait que je m'intéresse à tout : « Au revoir, H. ! Au revoir petit poète ! Au revoir mon ami créateur ! Tu es vraiment un enfant "TRÈS BIEN". »

Parfois, il m'arrive de douter que j'aie vraiment été ce petit enfant éveillé que me renvoie ma piètre mémoire : le petit gamin qui avait écrit sa première histoire de pirate en 1ère primaire (je donnerais un trésor pour la retrouver !) et qui, à partir de la 2e, s'est mis à écrire des poèmes d'un classicisme tout enfantin (eux aussi, j'aimerais les revoir !) ; celui aussi qui avait réussi à fédérer une partie de la classe pour dessiner à la craie un jeu de marelle géant dans la cour de récréation, le plus grand jeu de marelle d'une cour de récréation d'école de village ! — Avec ce commentaire élogieux (et assez curieux aussi quand on le relit) d'une institutrice, j'ai désormais une preuve à apporter à ma mémoire défaillante.

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