Litanies no 1 & 2

Un repas de famille peut devenir un gentil tribunal si je m'éloigne de la norme, même légèrement. Depuis des années, j'affronte — non sans une pointe de jubilation — ces moments durant lesquels je dois justifier ma vie, donner un sens à une conduite qui semble déroutante. Ces discussions sont devenues des litanies : on me pose une question, je roule des yeux (souvent mentalement désormais, car j'ai appris à me contenir) et je donne une réponse connue et formatée. Ainsi, aujourd'hui, lors d'un repas au restaurant « L'Asia » à Charleroi...

Litanie no 1.
« Célibataire depuis presque sept ans ?
— Oui.
— Et même pas une toute petite aventure ?
— Non. »

Litanie no 2.
« Tu dois quand même avouer que c'est aberrant : tu prends le train pour Liège depuis plus de... huit ans, c'est ça ? Tu pourrais habiter Liège, tout simplement.
— J'aime Bruxelles. C'est ma ville.
— Alors change de boulot !
— J'aime mon boulot. C'est un travail qui me convient parfaitement, où j'ai la rare chance de pouvoir être polyvalent. J'y ai aussi ma petite autonomie : les collègues acceptent très bien mon mode de fonctionnement.
— Mais ça ne te semble pas long, trois heures de trajet par jour ?
— Non.
— Tu pourrais être plus longtemps chez toi si tu habitais moins loin.
— Être ici ou là-bas, quelle importance ? C'est toujours être quelque part. »

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