Te souviens-tu de la première fois où nous avons dû nous rendre à la Bibliothèque royale Albert Ier ? Une vraie excursion en pleine jungle surréaliste. Notre professeur d'Histoire moderne nous avait pourtant tout expliqué : dans quels fichiers chercher ; comment remplir la fiche de commande en trois exemplaires (avec le format, l'année, la cote, le titre, l'adresse, etc.) ; comment dialoguer avec le bibliothécaire-fonctionnaire de base (« Soyez polis et surtout, ne dérogez pas aux règles ! »)...
Plus de dix ans plus tard, rien n'a changé, si ce n'est le hall d'entrée qui a entièrement été modernisé. Le personnel, lui, est toujours aussi surréaliste et les commandes de livres se font toujours manuellement, après avoir compulsé au bas mot trois fichiers (deux numériques et un manuel). Quand vont-ils enfin informatiser tout ce brol ?
Moi : « Par hasard, pourriez-vous m'échanger deux pièces de cinquante contre une pièce de un ? »
La préposée de l'accueil : « Par hasard, non, je ne peux pas. »
Moi : « Je voudrais commander tous les volumes à partir de 1947. Comment l'indiquer sur la fiche ? »
Le préposé aux commandes : « Oula, mais attendez, mais euh... Combien de volumes vous voulez ? »
Moi : « Je voudrais acheter une carte de photocopies. »
La préposée de l'accueil : « Ha ! Viens, je vais te montrer ! Tu mets un billet de cinq dans ce distributeur, tu récupères toutes les pièces de un et de cinquante qui tombent, ensuite tu mets ces pièces dans l'autre distributeur, là, et puis tu appuies sur ce bouton — ce bouton, hein, attention ! — et la carte sortira... »
Le midi, à la cafétéria du cinquième étage de la bibliothèque, je commande des spaghettis. Le concept est très intéressant : il faut payer sa commande, puis s'asseoir à l'une des tables de la grande salle. Quand la commande est prête, une dame dépose le plat sur une petite table proche de la cuisine et hurle : « Spaghettis ! » ou : « Moussaka ! » ou encore : « Croque-monsieur ! ». Quelle délicatesse !
Le soir, je vais manger avec Andrew et Léandra au Monticelli, rue de Lombardie à Saint-Gilles, le restaurant italien qui ne paie pas de mine mais où la bouffe est tellement délicieuse qu'il faut absolument réserver sa table (voir ici, quatrième paragraphe). Nous prenons la traditionnelle mozzarella di buffalo, puis de la saltimbocca a la romana, accompagnée de polenta.
Après le repas, nous nous arrêtons un instant au niveau d'une jolie maison Art nouveau située au 7, rue Antoine Bréart. Nous sommes particulièrement attirés par les trois sgraffites ornant les tympans du deuxième niveau : le premier représente un coq chantant au soleil levant, le deuxième deux hirondelles se passant une brindille, le troisième deux chauves-souris volant sous la Lune, avec un petit village en arrière-plan. À la vue des chauves-souris, nous nous demandons s'il s'agit des dessins originaux. Il semblerait que oui. Ces sgraffites, signées Adolphe Crespin, sont des allégories du Matin, du Jour et de la Nuit. Quant au bâtiment, classé, il porte le nom de « Maison Aglave », date de 1898 et est l'œuvre de l'architecte Paul Hankar. (Plus d'informations ici.)
Nous allons faire un tour dans le quartier du Châtelain. Rien à dire à ce sujet car... c'est le quartier du Châtelain*. Et en plus — comble de l'horreur — c'est le jour du marché. Je veux retourner au Parvis de Saint-Gilles ! Je veux retourner au Parvis de Saint-Gilles ! (C'est le côté « enfant » qui sommeille en moi.)
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* Si ce n'est que nous avons mangé une glace, au Framboisier Doré, rue du Bailli. Y a pas à dire : j'ai rarement mangé une glace (meringue et lait d'amandes) aussi succulente.