Cueillette

Gare des Guillemins à Liège, de bon matin. Sur l'un des panneaux d'affichage, mon train en correspondance est annoncé à l'heure, sans aucun retard. « Ça alors ! » Je continue à marcher lentement tout en jetant un œil aux autres panneaux que je croise sur mon chemin. Plus loin, au moment de prendre l'escalator, un « +0H08 » écarlate s'affiche enfin : le train est en retard, rien ne change et me voilà rassuré.

Je vois des passagers qui pestent à cause d'un retard de train et remarque ceci : ces gens ne sont pas des habitués ; s'ils s'énervent, c'est parce qu'ils sont des néophytes du transport ferroviaire. De la part d'un navetteur journalier, le comportement face à un retard peut prendre toutes sortes de teintes, comme l'amusement, le rire nerveux, le cynisme désabusé ou encore la plus stricte neutralité, mais rarement l'énervement ou la colère. (Sauf, bien sûr, si la personne en question est un CADD).

« Tu me dis : "Qu'importe le cueilleur : un fruit reste un fruit !" — Je te réponds qu'un tel arbre n'existe pas ; que tu confonds "faits" et "interprétation des faits" ; que dans le verger des événements, la cueillette est déjà une transformation. » (Hans Winstub, Des faits et de leur interprétation, 1937.)

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