Rêve manichéen

Ce rêve que j'ai fait en pleine nuit : avec ma mère, j'accompagne à la prison de Mons une de mes cousines du côté paternel. Sa mère (ma tante donc) y est incarcérée. Ma cousine est en chaise roulante. Jusqu'ici, la plupart de ces éléments font partie de la réalité : ma tante est réellement en prison en ce moment et sa fille est réellement en chaise roulante, car elle a essayé de se suicider en se défenestrant de sa chambre il y a quelques mois. Seul écart significatif : je n'ai jamais accompagné ma cousine voir sa maman à la prison de Mons. C'est ma mère qui s'en occupe. Ma tante, qui s'est brouillée avec plus ou moins tout le monde dans la famille, serait seule si sa belle-sœur (ou plutôt son ex-belle-sœur) n'était pas là.

Dans mon rêve, je sors de la prison et je me retrouve avec ma maman dans un endroit qui ressemble au Parvis de Saint-Gilles. En fait, c'est un peu comme si je sortais de la Maison du Peuple. Je vois Walter en train de fumer une cigarette non loin de là. Je lui fais de grands signes. On se salue cordialement et je lui explique l'histoire de ma cousine et de ma tante. Je commence à railler : « Comme tu peux le constater, c'est le quart monde chez moi ! » Il se met à rire à gorge déployée, émettant ces grands « ha-ha-ha ! » tonitruants dont il a le secret. Je commence à rire avec lui, mais ma mère m'arrête, choquée : « Mais enfin ! Où est donc passée ton humanité ? »... Et je me réveille.

Ce rêve est presque trop parfait : il est extrêmement facile d'y voir la personnification terriblement manichéenne du démon et de l'ange, comme ceux qui apparaissent dans les bandes dessinées de la vieille école (j'ai Tintin au Tibet en tête mais il y en a plein d'autres) : le rire cruel de Walter symboliserait mon côté froid, cynique, presque démoniaque, face au malheur des autres ; l'intervention de ma mère, au contraire, incarnerait ce côté bienveillant qui fait partie de mon éducation. — Sans les barrières de cette dernière, je me demande bien quel personnage monstrueux je serais devenu : les digues morales ne m'ont jamais arrêté de penser de manière amorale, voire immorale ; par contre, elles ont bridé tout ce qui était chez moi de l'ordre de l'acte lui-même, elles m'ont empêché d'appliquer au monde un comportement qui ne serait pas en accord avec l'éthique familiale. Je suis un être totalement inoffensif et, somme toute, on ne peut que s'en réjouir.

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