Seymour le chien

Gare de Bruxelles-Midi. Aujourd'hui, je prends le train en compagnie de mon ami Fred Jr, qui doit se rendre à Liège pour une réunion de travail. Le train est annoncé avec une dizaine de minutes de retard. Comme d'habitude, quoi.

Durant le trajet, nous discutons évidemment de ce qui s'est passé hier à Liège, Place Saint-Lambert, de ce fou qui s'en est pris à la foule avec des grenades et un fusil mitrailleur, avant de se donner la mort. Pour être exact, notre discussion tourne plus autour des réactions à l'événement qu'autour de l'événement lui-même (dont il n'y a pas grand chose à dire) : ce fait tragique a en effet été l'occasion rêvée pour les extrémistes de droite qui peuplent le Web d'établir des relations qui n'existent que dans leur tête et de cracher leur haine pour, en vrac, l'Islam, les étrangers, la justice "trop molle" et "trop laxiste", les socialistes, le réchauffement climatique, le massacre des dauphins et la nouvelle coiffure de Lady Gaga. 


Fred fait un rapprochement avec le site de Laurent Louis, premier député du Parti populaire (parti très à droite sur l'échiquier politique, fondé par Mischaël Modrikamen), qui a été exclu de ce parti et qui a créé le sien, le Mouvement pour la liberté et la démocratie (MLD), une copie presque conforme au point de vue des idées. Fred me dit d'aller voir le site Web du gaillard, simplement pour y découvrir son discours populiste à deux centimes.

En effet, c'est assez "marrant". Plus c'est gros, mieux ça passe... Dans un petit cadre du site, en bas à droite, défilent des photos résumant la pensée politique du mouvement. On y trouve notamment un très beau "Stop à l'assistanat. Au travail !" montrant les pieds d'un chômeur (rien ne dit que c'est un chômeur mais c'est sous-entendu) couché devant sa télévision (tsss, salauds de chômeurs qui profitent et qui regardent la télévision pendant que les autres triment) et "La sécurité partout, pour tous" montrant une vieille dame dans un tunnel sombre, en train de se retourner avec inquiétude car... deux hommes sont en train de descendre l'escalier du tunnel dans lequel elle se trouve (on ne voit que leurs jambes mais ils sont là pour la tabasser, c'est évident. L'insécurité est partout, mon bon Monsieur !).

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Il y a de moins en moins de monde au boulot. La fin de l'année approche et certains collègues sont en congé, quand d'autres sont en réunion. La journée se passe tranquillement. Je bois toujours principalement du... hem... thé à la place du café. Je commence à m'habituer au goût de ce "machin" : ce n'est pas si répugnant que ça, tout compte fait, le... hem... thé.

Durant ma matinée de travail, je termine la mise en page de notre carte de vœux 2012. Il nous a fallu, comme chaque année, un temps conséquent pour nous mettre d'accord sur l'illustration qui ornerait ladite carte. Au départ, nous avions pensé à une superbe affiche issue de nos collections, datant de 1946, sur laquelle il est écrit : "Contre les puissances de l'argent, votez communiste". Sur l'affiche, à gauche et sur fond rouge, on voyait des travailleurs démolir à coup de masse un monument à l'effigie des trusts et des banquiers. À droite, sur fond vert, les forces du "néo-fascisme" nourries par le grand capital, en train de crouler sous le poids des forces du progrès.

L'affiche constitue clairement un sujet d'actualité et montre par ailleurs que le discours critique sur l'oligarchie financière est plus ancien qu'il n'y paraît de prime abord. Rien ne change. Par contre, après mure réflexion, ça ne le faisait hélas pas trop pour une carte de vœux. Exit donc la belle affiche communiste, remplacée par un truc plus consensuel. Pour faire rigoler mes collègues, j'effectue quand même avec Photoshop une dernière manipulation sur l'image : je remplace "Votez communiste" par "Votez Hamilton"... On s'amuse comme on peut, au boulot. 
Et dire que, la semaine dernière, j'avais demandé à Doëlle (qui avait alors en sa possession le disque dur contenant nos affiches numérisées) de m'envoyer l'image en urgence... Elle l'aura fait pour rien... Pour rien ? Non, car aujourd'hui, grâce à cet envoi, elle sait utiliser un FTP pour uploader des fichiers s'il vous plaît !

À midi, seuls Aurèle et moi mangeons au travail. L'après-midi, je bosse tranquillement sur la correction (ou plutôt la réécriture complète, hum...) d'un article qu'il faut absolument rendre avant la fin de l'année. Nous ne sommes que trois dans les locaux. C'est calme, c'est sympa, c'est décontracté, c'est l'ambiance de pré-Noël... Une climat comme je les aime et propice au travail (je déteste le stress).

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Le soir, je passe au supermarché en prévision de la soirée de ce jeudi, durant laquelle Léandra viendra manger chez moi. J'ai décidé de faire très simple : des rigatoni à la sauce bolognaise. Je rentre à mon appartement, je fais un peu de rangement, je prépare la sauce en musique et dans la bonne humeur,  je fais la vaisselle. Demain, je n'aurai plus qu'à mettre la table, cuire les pâtes et réchauffer la sauce.

Ayant fini le visionnage des Cités d'Or et n'étant pas encore prêt pour Ulysse 31, je passe ma fin de soirée à regarder des épisodes de Futurama. Certains passages me font rire aux éclats, d'autres par contre me laissent de marbre. Cette série est assez particulière, bourrée de références parfois assez subtiles (voir ICI par exemple). Bref, Matt Groening et David X. Cohen, les créateurs, se sont vraiment lâchés.

Le dernier épisode que je visionne, "Jurassic Bark" (le septième de la quatrième saison) est très bien foutu au niveau du scénario, constitué de multiples flashbacks explicatifs. Il est aussi assez étrange car la fin n'est pas comique du tout. Elle est tellement touchante que je me mets même à chialer... C'est l'histoire toute bête d'un jeune chien abandonné, du nom de Seymour (comme le proviseur dans Les Simpson), que Fry (le "héros" de la série) recueille et nourrit au XXe siècle alors qu'il est livreur dans une pizzeria. Fry est cryogénisé à l'aube de l'an 2000, alors que le chien n'a que trois ans. Un millénaire passe et Fry, sorti de sa capsule, finit par retrouver son chien, fossilisé. Le professeur Farnsworth propose de le ressusciter, avec tous ses souvenirs, grâce à une de ses inventions... Mais au tout dernier moment, Fry refuse de lui redonner la vie. La raison invoquée  ? Le chien est mort à quinze ans, soit bien après la disparition de Fry. Ce dernier pense alors que ça ne vaut pas la peine de le ressusciter car l'animal doit avoir fait sa vie par après et totalement oublié son ancien maître. Erreur, erreur ! La dernière scène, extrêmement poignante, est constituée d'un ultime flashback : Seymour le chien, pendant environ douze ans, attend Fry devant la pizzeria, sans jamais bouger, sur l'air de "I Will Wait For You" des Parapluies de Cherbourg (version Connie Francis). Cette séquence est un petit chef-d'œuvre, raison pour laquelle elle clôturera cette journée somme toute très ordinaire.


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