Hamilton's Weather

Ce soir, chez Mary, Léandra et moi discutons un bref moment de l'inconnu (José) qui a commenté rudement le blog de mon amie. La discussion s'étend – malencontreusement, ai-je envie de dire – à la table entière... Quel blog ? Vous tenez un blog ? De quoi ça parle ? Vous parlez de nous ? Avantage ou malédiction de ce XXIe siècle technologique : Walter prend son smartphone, tape le nom de "Léandra Courbet" sur Google et finit par tomber assez rapidement non pas sur le journal de Léandra mais sur le mien. Il commente : "Jeunesse sarkozyste... Punaise vous n'y allez pas avec le dos de cuiller !". Vous ? En fait, il est seulement tombé sur mon blog personnel. À l'exception d'un article, Léandra n'est responsable de rien ici-bas.

C'est à ce moment précis de la discussion que je commence à me ronger les ongles... J'essaie de me souvenir de tout ce que j'ai écrit dans ce putain de journal, sur Mary, Walter et les autres... Car au début, n'étant lu que par deux personnes (Léandra et Andrew), je décrivais toute ma journée de manière systématique et sans beaucoup de retenue, écrivant tout ce qui me passait par la tête (humeur, jugement, déception, énervement...). J'aurais dû faire gaffe car, comme dirait le brave Marcus Brody : "La plume est plus forte que l'épée".

Trop tard : le "mal" est fait, mais je suppose que, pour ma tranquilité d'esprit et aussi pour celle de mes amis, mon journal va devenir de plus en plus introspectif ou "théorique", ou plutôt un peu des deux. De toute façon, comme me l'ont déjà fait remarquer plusieurs amis, c'est déjà le cas : à chaque fois que j'écris quelque chose, je ne peux m'empêcher de faire dans le didactique, comme dirait l'autre. Ou comme dirait Yama : quand on me lit, on m'entend presque parler... Je ne sais pas si je dois prendre ce commentaire comme un compliment. Je suppose que oui.

J'ai en stock une troisième solution un peu con : et si je ne parlais plus que de météo ? La météo, c'est consensuel, ça ne choque personne ! C'est un beau sujet de blog, bien original : je suis certain que ça n'a jamais été fait ! Je supprimerais ainsi tous les articles actuels (à l'exception de quelques extraits qui apportent un point de vue purement météorologique) et renommerais ce journal Hamilton's Weather : "Il va faire beau ce week-end. Il fera 24 degrés ce mercredi. C'est chouetteuh."

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Gaëlle s'est levée aux aurores ce samedi : elle a rêvé qu'elle était poursuivie par un homme sans tête qui voulait "lui faire du mal". Voilà ce qui arrive quand on joue à Minecraft (prononcer "Maillenecrafte") toute la journée.

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Le soir, souper chez Mary. Celle-ci habite avec trois autres personnes dans une maison pas loin de Ma Campagne. Elle a cuisiné quatre délicieuses quiches. Emily, Léandra, Andrew et Walter sont présents à la soirée. Un des colocataires de Mary est là également, ainsi que Bob, un ami de Mary que j'avais déjà croisé au concert de Timber Timbre.

Le souper a lieu dans le petit jardin jouxtant la cuisine de la maison. Nous n'avons pas beaucoup le temps de profiter de cette délicieuse météo de début d'automne car Mary aimerait que nous nous rendions en début de nuit au Tavernier, un café du Cimetière d'Ixelles, pour y voir un groupe cubain dans lequel chante une de ses employées.

Le Tavernier ne m'a jamais plu. C'était déjà le cas au temps de l'université et ça n'a pas vraiment changé. La chanteuse est très en retard sur le programme, le café est pas mal rempli, nous restons debout un moment à siroter des bières dans un gobelet. Andrew s'endort presque, Walter et Léandra s'ennuient. Quant à moi, j'essaie de m'intégrer, de parler aux amis ou collègues que me présente Mary (notamment une Polonaise qui ne connaît pas grand monde et un Australien installé à Bruxelles qui ne parle qu'anglais). Ils sont bien sympas mais je n'ai pas la tête à ça et je ne suis pas naturel. J'ai de plus en plus de mal avec ces soirées bruyantes : ça me bloque, réellement. Léandra s'en va puis, peu après le début du concert, Andrew, Walter et moi, un peu énervés de ne pas pouvoir discuter normalement, décidons de partir boire un verre autre part. J'explique la situation à Mary et nous nous en allons.

Autre part, c'est le Corto. Il fait toujours aussi bon dehors : nous restons donc en terrasse. Le patron est à la table d'à côté, en compagnie d'une des serveuses. Il nous reconnaît (évidemment) : "Hé, vous avez raté les 20 ans du Corto le 3 septembre !", nous lance-t-il. "Deux cents personnes ! Du monde jusque sur la route et les bières à un euro 25 !"... C'est pas grave : on s'en remettra. 

Nous serons rejoints – assez vite en fait par les autres. Peu avant leur arrivée, je fais une remarque débile et foncièrement fausse comme quoi c'est nous qui choisissons l'endroit de la soirée (nous sommes des "aimants", dira Andrew). N'importe quoi ! Ça me fait penser à plusieurs scènes de bandes dessinées du fabuleux Christophe Blain... Gus, tome 1 ("Nathalie"), p. 27 : "On ne s'enterre jamais quelque part. On a déjà trop collé à ce zinc. C'est foutu. Usé. On reste en mouvement. C'est pas l'endroit qui nous fait. C'est nous qui faisons l'endroit. Nous sommes les rois de la nuit. La fête, c'est nous. On se tire." Ou Isaac le Pirate, je ne sais plus quel tome, de mémoire : "Messieurs, ce soir, nous sommes l'amour !". Mais pourquoi je pense à ça ?

Le retour se fait en taxi avec une Mary "un peu" pompette.

Et pendant ce temps (et sans aucun lien ni transition), lors de l'émission On n'est pas couché de ce 24 septembre sur France 2, Ségolène Royal est d'une rare condescendance vis-à-vis d'un jeune écrivain beaucoup plus subtil, direct et intelligent qu'elle. Misère !

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