Chevalier servant

Je passe la matinée à une réunion dont la question principale est : "faut-il inventorier les périodiques d'un fonds d'archives en les décrivant comme des pièces dans l'arborescence archivistique ou faut-il au contraire les intégrer dans une liste présente dans le contenu d'un dossier (au sens intellectuel du terme) ?". 

L'après-midi, je passe mon temps à comprendre avec mon chef à quoi correspondent ces abréviations sur de vieux registres de pension qui n'intéresseront sans doute jamais personne (du genre : "O.V.", qui veut dire "ouvriers/veuves", ou "R.P." qui veut dire "rentes à payer", bah oui, voyons !). Entre les deux, durant la pause de midi, on parle de sexe. Une bénévole (qui par ailleurs avait apporté un Saint-Nicolas de Bourgueil) nous dit qu'elle a une activité sur un terril ce week-end et que pour y monter, elle devra se faire tirer par quelqu'un (haha !). Du coup, ça dégénère en du grand n'importe quoi. 

Sur le chemin du badminton, le soir, j'ai failli me battre avec un drôle de type alcoolique/clochard/fou : j'attends tranquillement le bus près de la Gare d'Etterbeek et trois dames sont assises sur le banc de l'arrêt de bus. Le gars en question s'amène et veut s'asseoir, il s'assied d'ailleurs presque sur deux des dames. Ces deux-là se retirent du banc, et le gars commence à insulter l'une d'elles, du genre "sale gouine, je pue ou quoi, t'as peur de rester à côté de moi ?". La dame répond qu'il a failli l'écrabouiller. Je trouve la situation très énervante, donc j'interviens en la soutenant (ça m'arrive de temps en temps, sans penser un seul moment aux conséquences possibles). Conséquence : je me retrouve nez à nez avec le gaillard, qui me traite de tous les noms et me propose quatre ou cinq fois de me péter la tronche en faisant aller un de ses bras de manière menaçante. Je n'en avais tellement rien à battre que je n'ai pas bougé d'un seul centimètre. J'ai soutenu son regard pendant deux minutes en lui sortant froidement un "d'accord, j'attends" puis, voyant qu'il ne se passait rien, un "je n'ai pas peur, vous savez" suivi d'un "oui, c'est ça" ironique purement hamiltonien. J'ai vraiment failli me faire péter la gueule, en fait, mais j'étais dans mon droit et je n'ai pas bronché. Quand je lui ai dit "Allez vous asseoir, maintenant, Monsieur", il est reparti s'asseoir, en me traitant de tous les noms. Dans le bus, avant de descendre au Cimetière d'Ixelles, la dame "molestée" verbalement me sort (texto) : "merci d'avoir été mon chevalier servant", puis (toujours texto, par rapport au fait que le clochard l'avait traitée de lesbienne) : "j'ai un enfant mais pas de mari, pourtant je cherche un homme". Tout ce que j'ai réussi à lui dire fut "bonne chance !", au lieu de "moi, j'ai une fille mais pas de compagne, et pourtant etc.", pourtant ça m'est passé par le cerveau. 

Cet événement m'a mis de très bonne humeur. Au badminton, je ne joue pas trop mal. Je fais la paix avec Lewis. Je lui dis ce que je n'aime pas chez lui, il ne change pas d'avis sur la question (moi non plus), mais n'est pas fâché non plus. Mary veut aller manger chez lui un de ces jours avec moi, je ne sais pourquoi. Plus tard, je retrouve Emily au Café de l'Université. Emily n'aime pas son boulot pour le moment, où l'ambiance n'a pas l'air au rendez-vous. On mange bien, on rigole bien, puis on rejoint Andrew chez lui. Léandra est là. On ne voit pas de bobo (ça change de la Maison du Peuple), mais au vu de ce qui recouvre le front d'Andrew, ça ne doit pas être très joli. Il a de beaux livres à nous montrer, notamment un sur le constructivisme russe. Je me dis et lui dit qu'il aimerait sans doute bien Chris Ware. Léandra, quant à elle, est très captivée par une BD qui met en scène un robot, un œuf et une photocopieuse (entre autres). Emily nous ramène gentiment chez nous en voiture.

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