Rêve de nitroglycérine

Depuis un promontoire rocheux, j'observe, entouré d'ingénieurs (qui portent un casque de chantier et une chemise avec un stylo dans la poche gauche... bref tout l'attirail archétypique d'un d'ingénieur), un paysage montagneux brunâtre, curieux mélange entre la Monument Valley et les Alpes. Tous attendent mon signal : je sais que si nous sommes ici, c'est pour faire exploser les montagnes environnantes. J'ai dans la main un bouton rouge. À peine l'ai-je effleuré que le monde autour de nous tremble, explose et rugit. L'explosion détruit les montagnes et notre environnement est désormais entièrement plat, à l'exception de notre promontoire. De l'eau monte rapidement : elle gagne mes genoux, mes hanches, mon buste, mon cou... Je vois mes amis dans la même situation embarrassante que moi. Je n'ai curieusement pas peur. Notre horizon n'est plus qu'une vaste étendue d'eau. Une pensée s'impose avec clarté : nous avons agi avec trop de précipitation et n'avons pas calculé avec précision tous les facteurs de risque ; dans notre volonté de supprimer les montagnes, nous avons fait exploser beaucoup trop de rochers — et un barrage aussi peut-être ! — et allons mourir noyés. Cependant, arrivée à notre bouche, l'eau redescend aussi rapidement qu'elle ne s'était répandue. Un ingénieur se présente alors à moi et me tend deux petites fioles remplies d'un liquide transparent : « Voilà, je t'ai enfin trouvé de la nitroglycérine ! », me dit-il, fier de sa découverte. Je suis embêté : conscient que c'est à ma demande qu'il a apporté ces flacons, je suis bien obligé de les accepter, tout en sachant que le moindre choc pourrait provoquer une nouvelle catastrophe. J'imagine une destruction encore plus forte, un déluge encore plus grand que ceux que nous venons de subir. Me vient alors l'idée de conserver les deux récipients dans le frigo, à mon travail. C'est d'ailleurs ce que je décide de faire, mais je ne suis pas à l'aise. J'ai toujours en tête que la nitroglycérine entreposée non loin de mon bureau pourrait faire d'incroyables ravages. Je me mets à chercher des solutions alternatives, d'autres endroits de stockage : il faut que je me libère à tout prix de cette nitroglycérine ! — Et je me réveille.

Ce rêve m'a tellement impressionné qu'en me levant du lit ce matin, je me suis précipité sur la Toile pour lire tout ce que je pouvais trouver sur la nitroglycérine, et notamment l'information suivante : l'instabilité de ce puissant explosif liquide est en partie (mais en partie seulement) une légende véhiculée par des films comme Le Salaire de la peur, des dessins animés comme ceux de la Warner Bros. ou encore par certaines bandes dessinées comme Lucky Luke. J'ai alors poussé un bref (et bien réel) soupir de soulagement, avant de me rappeler que cette histoire n'était de toute façon qu'un rêve, que je n'avais pas vraiment à côté de moi de la vraie nitroglycérine et que je ne devais donc pas réfléchir dans l'urgence à un moyen pour m'en débarrasser.

Laisser un commentaire