Archives mensuelles : octobre 2011
Schizophrénie chez Walt Disney (4/4)
[/] Après le restaurant pirate, nous testons Autopia, une attraction où nous conduisons des voitures à une vitesse ridiculement basse. Conduire est un grand mot : la voiture est fixée à un système de rail unique et il s'agit simplement d'appuyer sur l'accélérateur et de tourner le volant si nous le désirons, sans que ce geste ne change réellement la trajectoire. Gaëlle embarque avec Emily, Léandra avec Walter et moi avec Andrew (mon "frère ennemi", etc.). Nous traversons un "circuit modèle", avec sa flore et sa ville utopique, baptisée "Solaria".
[/] Après Autopia, Gaëlle et moi nous séparons du reste du groupe. Ma fille veut faire un tour sur le Carrousel de Lancelot. Il y a des dizaines d'attractions délirantes pour les enfants de son âge dans le parc, mais elle veut faire une file d'une demi-heure pour un bête carrousel de foire, avec ses éternels chevaux et carrosses ? Une confirmation supplémentaire de la "théorie de l'emballage cadeau" : donnez un cadeau extraordinaire à un enfant et il jouera avec l'emballage.
Voyage en hyperespace
[-] (Encore un droïde stupide issu de l'univers de Star Wars. La société dépeinte dans cette saga semble de prime abord hautement technologique mais – énorme paradoxe – n'est jamais capable de créer une intelligence artificielle digne de ce nom : R2-D2 ne sait pas parler, C-3PO sait à peine marcher et RX-24 est censé avoir été créé pour piloter mais ne sait justement pas piloter.)
[+] Cette vieille attraction (1992) est géniale à tout point de vue : il s'agit d'un simulateur de vol performant qui nous fait ressentir en temps réel les mouvements que nous observons sur un écran situé juste en face de nous. RX-24, notre pilote, fait connerie sur connerie : il frôle les murs de la station spatiale ainsi qu'un nombre impressionnant de vaisseaux de combat ennemis. Il se trompe également de chemin, nous faisant assister à la destruction de l'Étoile de la Mort par des vaisseaux de type "X-wing". Lors de deux passages en hyperespace, nous sommes scotchés à notre siège. Gaëlle, encore une fois, rit aux éclats et, à la sortie de l'attraction, me demande si nous sommes réellement allés dans l'espace. Je n'arriverai jamais à savoir si la question était on ne peut plus sérieuse ou bien si Gaëlle voulait simplement y croire.
[*] Mais comment cela fonctionne-t-il ? Est-ce que le compartiment dans lequel nous nous trouvons se déplace légèrement dans une sorte de hangar ou bien reste-t-il statique ? Je me pose la question car les "déplacements dans l'hyperespace" nous collent gentiment à nos sièges pendant quelques secondes, comme si nous sentions l'effet d'une véritable accélération. La réponse : nous nous trouvons dans un simulateur de vol ; aucun déplacement donc, juste des inclinaisons sur trois axes, grâce à un système de vérins hydrauliques. Pour créer cette attraction, Walt Disney Imagineering (le nom des concepteurs Disney) a acheté des simulateurs à l'armée américaine ($500.000 l'unité), qu'ils ont transformé pour les besoins de l'attraction. J'apprends également que la sensation d'accélération lors du passage en hyperespace est simulée d'une manière toute bête : rapidement, via le système de vérins, le nez du simulateur pointe vers le ciel et la queue vers le sol, et la gravité fait le reste : elle nous colle à notre siège. N'ayant pas de référentiel spatial extérieur à la capsule, notre cerveau imagine une accélération...
Parade et shopping
[+] Le séjour touche à sa fin. Nous nous dirigeons vers Main Street pour voir la parade, cette fameuse parade dont tout le monde me parle depuis tant d'années (j'ai tendance à exagérer). Elle passe devant une foule compacte et docile. Je m'attendais à un défilé de majorettes et de pom-pom girls mais nous en sommes très loin. La parade Disney est faite de chars sur rail et, de nouveau, force est de constater que c'est très bien foutu. Chaque char est thématique : le char du Roi Lion, le char des ténèbres (avec un impressionnant démon noir qui rejette de la fumée), le char des princesses qui font des saluts mielleux... Gaëlle, sur mes épaules puis sur celles d'Andrew, est subjuguée.
[/] Après la parade, sur Main Street, nous formons deux groupes : d'un côté Léandra et Andrew qui vont faire les magasins pendant une petite heure ; de l'autre Emily, Walter, Gaëlle et moi qui allons faire les magasins aussi, mais en très grande vitesse, pour ensuite aller nous reposer à la terrasse d'un café.
[-] Je n'ai pas encore mentionné ce que Gaëlle a acheté durant ce séjour. C'est le moment ou jamais... Ma fille a reçu de ma famille un pécule conséquent (200 euros) pour acheter de la camelote de chez Disney. Elle a donc pu grosso modo recevoir ce qu'elle voulait recevoir. Son butin est le suivant :
- une longue-vue de pacotille ;
- un médaillon pirate de pacotille ;
- un pistolet pirate de pacotille ;
- un gobelet "Ariel la petite sirène" de pacotille ;
- une paille Mickey de pacotille ;
- des oreilles de Minnie (offertes par Léandra) ;
- des oreilles de Minnie différentes ;
- un appareil lumineux ridicule ;
- un petit robot-chien ridicule ;
- une robe de Cendrillon (46€, hé ouais !).
[-] Je ne supporte pas ces magasins de Main Street noirs de monde, remplis d'individus qui se marchent sur les pieds et qui tendent tous vers ce même but idiot : acheter ce putain de tee-shirt Disney "spécial Halloween". Je veux partir loin, loin, très loin de cet endroit.
[/] Nous retrouvons Andrew et Léandra à l'entrée du parc. Direction la voiture, direction Bruxelles. Le rêve est terminé.
Dans la voiture d'Emily, sur le chemin du retour, Gaëlle s'endort presque immédiatement. Elle dormira durant la majorité du trajet, à tel point que je resterai dans la voiture avec elle pendant l'arrêt sur une aire d'autoroute.
Durant le trajet de retour, c'est la musique d'Emily qui passe dans la voiture. À un moment, nous entendons la très connue "Stairway to Heaven" de Led Zeppelin. Emily : "J'adore cette chanson, du début jusqu'à la fin". Moi : "C'eût été mieux s'ils s'étaient interrompus vers la quatrième minute". D'autres chansons rock passent. Je trouve qu'elles contiennent des envolées de guitares superfétatoires (il était temps que je la place, cella-là). Certaines des mélodies entendues me font penser à Queen (c'est une obsession !), avec leurs solos de guitares qui ne servent à rien. Emily remarque à raison : "En fait, tu as de sérieux problèmes avec les solos de guitare". Moi : "Non, ce n'est même pas vrai : je n'aime pas les solos sans raison". Puis, enfin, la délivrance : nous entendons "Where Is My Mind?" des Pixies. Moi : "Ha ! Voilà un air qui tient debout, sans fioriture !" Sorti en 1988 s'il vous plaît ! Une longueur d'avance ! Cerise sur le gâteau : la chanson clôture à merveille ce long week-end Disney, en posant la question qui fâche : "Où est passé mon cerveau ?"
Schizophrénie chez Walt Disney (3/4)
[/] Court instant de fou rire avec Walter et Emily, durant lequel nous imaginons un parc à thème entièrement dédié au sexe. C'est Walter qui lance l'idée. Je lui dis : "ce genre de parc doit sûrement déjà exister !" L'air sûr de lui, il me répond : "Non, absolument pas !" Le parc serait constitué selon le même modèle que les Royaumes enchantés de Disney mais à la place du château central, se dresserait un gigantesque phallus, sorte de point de repère général pour les familles groupes... Oui, mais pourquoi donc un phallus et pas un vagin, hein, hein ? Tout simplement parce qu'une vagin, c'est beaucoup moins visible de loin et qu'en plus, on risquerait de tomber dedans (hahaha !). Autour du phallus, on retrouverait différents lands : "Straightland" pour les hétéros, "Gayland" pour les homos ainsi que d'autres zones consacrées à des fantasmes particuliers comme "Fetishland" (simple exemple) ; Main Street serait remplacée par une rue remplie de sex shops et le petit train faisant le tour du parc ne ferait qu'entrer dans des tunnels à l'aspect évocateur ; quant au clou du spectacle, ce serait un feu d'artifice de couleur blanchâtre qui éclaterait juste au dessus du "château" la nuit. (C'était la partie hardcore de mon voyage à Disneyland®. Promis juré, je ne recommencerai plus !)
Le Studio Tram Tour
[/] Le temps passe. Nous voulions tester une attraction intitulée le "Rock'n'Roller Coaster avec Aérosmith" grâce à un Fastpass récupéré ce matin, mais nous laissons tomber, faute de temps. À la place, nous faisons le Studio Tram Tour, un train touristique sur roues qui nous promène dans divers décors de film...
[-] Le "wagon" dans lequel nous nous asseyons contient une petite télévision diffusant un reportage dans lequel deux acteurs (un anglophone et une francophone) vantent la "magie" du cinéma et des effets spéciaux. C'est un peu "gnangnan" (surtout pour la francophone) et ça n'apporte pas grand chose à l'attraction. C'est un peu con d'avoir mis autant de moyens dans ce parcours (voir le prochain paragraphe) mais de ne nous diffuser qu'une petite émission ridicule pour toute explication.
[+] Gaëlle adore le Studio Tram Tour. Faut dire que c'est vachement bien fait : le "tram" s'immobilise dans un paysage désolé de canyon, dans lequel trône un gros camion-citerne rouillé ressemblant à celui de Duel de Steven Spielberg. Nous sommes dans la reconstitution d'un tournage avec de gros effets spéciaux. Des parties du canyon explosent dans un souffle enflammé, provoquant une sorte de mini-tremblement de terre qui secoue nos compartiments installés pour l'occasion sur des plaques mobiles. Le grand moment de cette partie de l'attraction est encore à venir : en très peu de temps, un véritable déluge d'eau (265.000 litres selon Wikipédia) s'abat dans le canyon et sur notre véhicule (heureusement couvert). Gaëlle rit aux éclats. Je comprends mieux désormais l'avertissement au début de l'attraction : "Attention : vous risquez d'être éclaboussés". Le véhicule contourne ensuite le canyon et montre l'envers du décor : trois énormes pompes qui amènent de l'eau en très grande quantité sur la scène du "tournage".
[+] La deuxième grande étape, à l'autre bout du circuit, est une reconstitution de la ville de Londres saccagée par un dragon. Ce dernier n'est pas visible : nous voyons (et sentons) juste le feu qu'il crache. Le décor est à nouveau très bien foutu. Un train déraillé en hauteur me rappelle la pochette de l'album Scrabbling at the Lock de The Ex.
[/] Après le Studio Tram Tour, il est midi passé et nous devons retourner dans le parc Disneyland®. Nous avons en effet réservé une table au Blue Lagoon, le "restaurant des Caraïbes", pour le repas de midi. Un bon moment pour faire une pause et marquer la fin de la troisième partie de ce texte (ça diminue !).
Schizophrénie chez Walt Disney (2/4)
[+] Rien que pour sa première salle, l'attraction vaut le détour. Toute personne y étant allée en parle avec des étincelles dans les yeux. Car il faut bien l'avouer : cette première pièce dont les murs s'agrandissent et dont le plafond s'éloigne à vue d'œil, modifiant au passage les tableaux accrochés au mur, est terriblement bien foutue ! Le reste du parcours se fait à pied puis en "doombuggies" (véhicules de parcours scénique). Durant le parcours, j'observe de nombreux effets d'optique géniaux, comme ce buste qui me regarde constamment, quelque soit l'endroit où je me place ; ou encore une salle de bal remplie de spectres dansant une valse lugubre. Gaëlle a juste un tout petit peu peur, mais sort de la maison toute contente.
[*] Je me suis un peu intéressé aux différents aspects techniques de cette attraction. J'ai ainsi appris que la toute première pièce (appelée fort logiquement la "stretching room") est constituée d'un ascenseur caché fabriqué tout spécialement par la firme Otis : l'ascenseur n'est pas fait d'un seul bloc et descend lentement tandis que le plafond reste en place. Cet ascenseur n'est pas accessoire : il est nécessaire à l'attraction dans la mesure où cette dernière n'est pas du tout située à l'intérieur de la petite maison mais dans un complexe souterrain invisible, qui dépasse la bordure du parc ! Autre aspect technique : celle du buste qui nous suit du regard : il s'agit tout simplement d'une statue "négative" (concave) qui, éclairée d'une certaine manière, crée cette illusion d'optique bluffante. Quant à la salle de bal avec la danse des fantômes, que l'on observe du dessus, l'effet d'optique est rendu possible grâce à un système de vitre qui reflète une série d'automates situés dans une pièce sous les buggies.
Discoveryland !
[/] Nous passons la fin de la journée dans Discoveryland, une zone dont tous les éléments rappellent Jules Vernes, la bonne vieille anticipation, ainsi que le mouvement "steampunk". Amusant : Andrew et moi trouvons dans certaines "machines rétro-futuristes" de Discoveryland des points communs avec l'univers gnome de World of Warcraft.
[/] Si nous nous rendons à Discoveryland, c'est pour une raison bien précise : essayer le Space Mountain: Mission 2, une "montagne russe" en intérieur, considérée comme un des fleurons de ce parc à thème. Pendant ce temps, Emily emmène Gaëlle dans l'Orbitron, une jolie attraction
[+] Léandra prend place à côté de moi ; Andrew et Walter sont juste devant. Avant le départ, nous sommes confortablement (hem) assis dans nos sièges et amenés à la base d'un "canon". Après une dizaine de secondes d'attente, le canon nous propulse dans le Space Mountain. C'est une attraction géniale, une idée de grand malade : nous frôlons à toute vitesse des planètes, passons par des tunnels psychédéliques, effectuons trois inversions (dont une en forme de fer à cheval assez unique, même si nous n'avons pas le temps de nous en rendre compte). Bref : ce Space Mountain, c'était le clou de cette première journée.
[/] La soirée touche à sa fin. Nous retournons en douceur vers les voitures, afin de prendre la route du bungalow que nous avons loué, au Davy Crockett Ranch®. En passant par le Disney Village®, une scène surréaliste : un restaurant "à l'américaine" où les serveurs, serveuses, cuisiniers et cuisinières sont sur le bar en train de danser et de chanter avec entrain. Mon dieu, mais où sommes-nous ?
[+] Arrivés à la réception du Davy Crockett Ranch®, Andrew se charge d'aller chercher la clé de notre bungalow. Ce domaine est encore et toujours un endroit made in Disney, à la discipline, à l'hygiène et à la propreté exemplaires. Nous serpentons une route à travers bois afin de rejoindre notre "îlot résidentiel" : une petite centaine de bungalows se ressemblant tous situés aux abords d'une route circulaire. Rien n'est laissé au hasard. Dès l'entrée dans le bungalow, une télévision s'allume et souhaite la bienvenue à Andrew ! Le bungalow contient une chambre trois lits, une autre avec un lit double (avec son WC et sa salle de douche particulière !), un salon/salle à manger, un second WC, une seconde douche...
[-] Cet hygiénisme fait peur, parfois. J'ai l'impression d'être dans un lieu aseptisé, sans vie, tenu par des maniaques de la propreté (et pour que je me rende compte d'un excès de propreté, il faut que ledit excès soit tout de même assez sévère). En outre, j'ai la désagréable impression d'être dans une banlieue américaine stéréotypée (un peu comme dans Edward aux mains d'argent), où tout le monde roule en Range Rover...
[/] Il est décidé d'un commun accord que je dormirais avec Gaëlle (totalement exténuée d'ailleurs) dans le lit double (à chaque fois que je pars en vacances avec ce groupe, j'ai droit au lit double avec salle de bain contiguë) ; que Léandra, Andrew et Walter dormiraient dans la grande chambre ; qu'Emily s'installerait dans le divan, faute de quatrième lit (arf).
[/] Emily prépare ses spaghetti à la bolognaise. Tout le monde est fatigué et ça nous fait un bien fou de nous asseoir, de nous reposer en grignotant des saucisses Zwan ou des chips laissées par les précédents occupants (ou bien par Disney pour nous souhaiter la bienvenue ?). On boit du vin et/ou de la Chimay bleue.
[/] Après le repas, vers 23 heures, Emily, Walter et moi décidons de nous rendre au Saloon... Car oui, dans l'énorme complexe du Ranch, il y a de tout : une piscine, une boutique, un restaurant, des terrains de sport et... un saloon ! Pas de bol : ce dernier est en train de fermer lorsque nous débarquons. La magie Disney se couche tôt. Emily et Walter sont partants pour retourner boire un verre au Disney Village®. Je n'ai ni l'énergie ni le courage nécessaire pour un tel déplacement et je boude. Conclusion : personne n'y va.
Schizophrénie chez Walt Disney (1/4)
Prologue
Mon réveil sonne à 5h04. Je passe du sommeil à l'éveil total d'un seul coup. Dans ma salle de bain, je me débarbouille et me lave les dents rapidement. Je me rends dans la cuisine et fais couler du café. Je me précipite ensuite vers mon petit sac Nike bleu démantibulé et le remplis en vitesse de babioles : deux brosses à dents, du dentifrice, quelques vêtements pour moi, quelques vêtements pour Gaëlle, un livre de SF, une Chimay blanche et une clé USB remplie de musique... (Dans la précipitation, j'ai oublié – mais je ne m'en rendrai compte qu'aujourd'hui soir – un pyjama pour moi, un pyjama pour Gaëlle et des serviettes de bain.) Je réveille ma fille vers 5h15. Elle n'a aucun mal à se lever. Elle s'habille et met ses chaussures toute seule, pendant que je m'occupe des derniers détails (tu parles !).
La route du parc
[-] Nous ne payons rien au péage car le parking est compris dans le forfait "2 jours avec logement" auquel nous avons souscrit, mais nous avons néanmoins déjà un avant goût du mercantilisme qui se cache derrière la parure enchantée : des conducteurs payant docilement 15 euros aux souriants préposés Disney (ici, tout le monde est souriant, du moins en façade), afin d'avoir la chance de garer leur voiture dans l'immense parking impersonnel.
Main Street, USA
[+] Main Street est le nom donné à la rue principale (bah oui) du parc Disneyland®. Après un passage obligé sous l'hôtel Disney, c'est la première chose que nous voyons avec, au loin et bien dans l'axe, le château de la Belle au Bois dormant... Chaque magasin de Main Street possède sa propre devanture, extrêmement soignée, tout droit sortie d'une petite ville américaine modèle. À notre arrivée, un train à vapeur situé en hauteur lance un "Tchoutchou" caractéristique. Je pense qu'aucun train à vapeur dans le monde réel n'a jamais lancé un "Tchoutchou" pareil. On se croirait dans un dessin animé. Ce train, c'est le train rêvé, fantasmé par tous les petits enfants occidentaux. Le "Tchoutchou" du train, c'est le détail en trop : ma barrière critique s'effondre d'un seul coup et je cache tant bien que mal des pleurs d'émerveillement. Léandra le remarque et sort un "Même Hamilton a l'air subjugué !" bien à propos.
[-] Les magasins de Main Street sont tous différents vus de l'extérieur, mais se ressemblent tous à l'intérieur : même camelote Disney en plastique made in China, de mauvaise qualité et hors de prix ; même vendeur souriant jusqu'à la crispation qui me demande si j'ai vu la réduction de 88 cents sur les sucettes d'Halloween (oui merci, mais non) ; même foule compacte se jetant comme des requins sur des peluches ridicules. Nous sommes dans un temple du consumérisme. Alors qu'une crise de grande ampleur frappe le monde extérieur, ici, on fait comme si de rien n'était.
[*] Le parc est divisé en différentes régions, appelées "lands". Au centre, évidemment, le château, visible de presque partout et servant de repère visuel. C'est une utopie ou une dystopie (tout dépend du point de vue), un monde en dehors du monde ; c'est la ville idéale vue par Walt Disney. Elle rappelle les nouveaux îlots de richesse à Dubaï, mais aussi les projets de cités idéales propres aux utopistes du XIXe siècle. Car tout est prévu pour l'être humain qui y séjourne, du début jusqu'à la fin de l'aventure, moyennant une sollicitation du porte-monnaie : nourriture, boissons, logement (j'y reviendrai plus tard), distractions diverses, piscine (durant le week-end, Emily a parlé de la piscine du ranch au moins dix fois : les piscines l'obsèdent – faudra que j'essaie un jour de comprendre pourquoi). Le parc est aussi une fausse fractale car ses centres névralgiques sont répétés à divers niveaux de grandeur : au centre du parc, le château ; dans chaque "land" (sorte de parc en miniature), un noyau secondaire (comme le "Disneyodendron", gigantesque arbre abritant la cabane des Robinson dans Adventureland...) ; pour chaque attraction, un signe visible, un appel (la rampe de lancement du Space Mountain, la maison hantée sur sa colline...).
[-] Cette utopie-là, elle se nourrit de fric, de fric, et encore de fric.
it's a small world!, Peter Pan's Flight, etc.
[-] Nous commençons notre tour des attractions dans Fantasyland par it's a small world! (sans majuscules). Pitié ! Laissez-moi sortir ! Pendant une dizaine de minutes, nous voguons sur une petite embarcation à l'intérieur d'un énorme hangar contenant des milliers de petites poupées d'humains ou d'animaux, chantant un air horriblement entêtant : "It's a Small World". Le message de l'attraction – difficile de ne pas le saisir car il est très gros et pas très subtil – est le suivant : nous vivons dans un tout petit monde et nous sommes tous frères...
[-] Nous faisons le tour de la planète en compagnie de poupées de nationalités diverses qui chantent, parfois dans leur langue, le même air énervant. Le parcours se déroulant dans le même hangar, sans cloison insonorisante, le résultat est cacophonique. Et personnellement, si c'est ça la fraternité, je préfère vraiment m'en passer : toutes les poupées ont presque la même bouille, seul le déguisement change ; elles ont toutes le même sourire béat ; à la fin, on peut apercevoir un Amérindien et un cow-boy se tenant la main en signe de réconciliation, ainsi qu'un footballeur américain de type caucasien (comme ils disent aux États-Unis) et une joueuse de baseball afro-américaine (histoire de respecter les "quotas" ?). Arrêtez, c'en est trop ! Mon côté critique et moqueur reprend le dessus et, pour passer le temps, j'imagine une attraction proposant le message inverse, où tous les peuples du Monde, symbolisés par des poupées, se taperaient sur la tronche : on y verrait des poupées japonaises horrifiées devant une explosion nucléaire, des villes en ruine sous le coup des bombes, ou bien encore des colons massacrant des Sioux. Je considère que ma vision du "petit monde" est bien plus proche de la réalité... Mais l'ami Walt proposait un rêve, voyons, une vision d'avenir... Ah oui c'est vrai, j'avais oublié : une vision où toutes les différences sont aplanies, où tous les peuples se tiennent la main en chantant une musique gnangnan issue de l'imaginaire Disney.
[+] Gaëlle ne sait plus où donner de la tête. Elle n'entend pas ce qu'on lui dit. Elle a des étincelles dans les yeux et de la bave aux commissures des lèvres. Pour les petits enfants, cette attraction est une vraie merveille.
[/] On trouve une parodie hilarante de ce célèbre parcours de poupées made in Disney dans un des épisodes de la quatrième saison des Simpson intitulé "Selma's Choice" : Lisa et Bart sont à Duffland® (le parc à thème consacré à la bière Duff), dans une attraction qui ressemble à s'y méprendre à la nôtre, sauf que... les petites poupées ont toutes une bouteille de Duff en main et chantent un air différent, à la gloire de la bière... Durant cette scène mémorable, Lisa boit, à cause d'un bête pari avec son frère, l'eau qui coule sous l'embarcation et se tape un trip psychédélique... C'est vers la 18e minute de l'épisode : une parodie d'une exceptionnelle acuité : tout y est, même la petite musique énervante qui reste en tête ! (Gaëlle, connaissant les premières saisons des Simpson par cœur, s'est rendu compte directement de l'analogie.)
[/] Après le monde des poupées, nous faisons rapidement un tour par "les tasses" : une simple attraction de foire, un manège avec des tasses qui peuvent être tournées manuellement. J'embarque avec Gaëlle et Andrew, mon "frère ennemi" ; Léandra embarque avec Walter ; Emily n'embarque pas car les spirales au sol la rendent malade. Après les tasses, nous marchons dans le labyrinthe d'Alice, une attraction un peu vieillote. Gaëlle semble apprécier (elle est plus petite, elle voit les petites haies du labyrinthe différemment).
[/] Dernière attraction de cette première matinée : le vol de Peter Pan. Pour accéder rapidement à cette attraction, nous utilisons pour la première fois de la journée un ingénieux système de Fastpass® (ouaip, ce truc est aussi protégé par un brevet !). Le principe : avec notre ticket d'entrée, nous récupérons un pass (disponible toutes les trois heures environ) qui nous permet de passer par une file d'attente "VIP" évitant les circonvolutions de la file normale.
[-] Peter Pan's Flight : une courte attraction qui cale tout le temps. Nous sommes d'abord dans un bateau qui survole Londres, mais on ne voit rien, si ce n'est quelques étoiles et la tour de Londres mal éclairée : la magie n'opère pas. Plus tard, une vision de combats entre Peter Pan et les méchants pirates, sauf que ce sont de vieux automates assez mal foutus. Un Fastpass® utilisé pour pas grand chose donc...
[+] Gaëlle adore mais elle n'est pas au bout de ses surprises.
Repas mexicain
[-] Le midi, nous allons manger des fajitas (entre autres) au Fuente Del Oro, un restaurant mexicain situé juste en face de Big Thunder Mountain dans Frontierland (une gigantesque attraction du genre "train de la mine", avec une mesa grandeur nature en son centre, malheureusement fermée pour cause de récent accident – ha ben merde, ils l'ont déjà rouverte !). La bouffe, dans le pur style "fast food", n'est pas terrible.
Pétition contre le renvoi d'Éric Deup
Quelques explications : pendant environ 6 ans, c'était le Belge Thierry Tinlot, ancien rédacteur en chef de Spirou, qui était aux commandes de Fluide et Tinlot laissait apparemment beaucoup de marge (jeu de mots qui ne sera sans doute compris que par les lecteurs de Fluide) à ses auteurs. Ces derniers avaient d'ailleurs pris l'habitude de rire de leur chef (c'est clairement dans la ligne "On ne se prend pas au sérieux" de Fluide – souvenirs des éditos d'Albert Algoud qui étaient à chaque fois "censurés" lors de la mise en page : une forme de running gag assez lourdingue). Mais Tinlot ayant rejoint les colonnes culturelles du Soir, c'est un certain Christophe Goffette qui est depuis peu aux commandes. Quand je lis ce que Goffette aime et ce qu'il a réalisé, je me dis pourtant qu'il a l'air d'un type très bien. Mais Goffette n'a apparemment pas apprécié l'humour de Deup envers la nouvelle direction... Tout cela est expliqué sur la Toile, ici et là...
Sans Deup, je trouve que ce tout dernier Fluide Glacial de novembre a perdu une partie de son esprit (bon, OK, je suis partial). Et puis, le magazine était un peu décousu et pas très marrant ce mois-ci (comme ça arrive parfois avec Fluide, oui...). C'est quoi cet édito pompeux de Goffette en fin de journal ? Et puis surtout, qu'est devenu le baromètre mensuel sur la cote d'Yves Calvi ? Sans ce référenciel, je suis perdu et je ne sais plus quoi penser du présentateur... Est-il enfin en hausse ? (Mais non, ce n'est pas possible !) En une phrase : rendez-moi mon Deup, bande de moules ! En attendant qu'on me rende mon Deup, j'ai décidé, après plus de dix ans de lectures assidues, d'arrêter d'acheter toute publication émanant de Fluide (ni album, ni magazine, ni hors-série). Tant pis pour ceux que j'adorais lire, tant pis donc pour Léandri (marrant : une seule lettre de différence avec mon amie Léandra), pour Edika, pour Bouzard et pour Phil Casoar qui m'a fait découvrir tellement de bonnes musiques... Ma décision ne changera pas grand chose, à moins que nous soyons des dizaines de milliers à poser le même acte.
Le soir, c'est la grande préparation de notre week-end à Disneyland® Paris pour l'anniversaire de ma fille. Léandra a invité chez elle les protagonistes de notre prochain périple dans les eaux tumultueuse de la magie Disney® : Emily, Andrew, Walter, Gaëlle et moi. Une soirée sous le signe de la simplicité : quelques bières, une bouteille de vin, des olives, des chips, des pizzas à réchauffer...
Gaëlle et moi arrivons chez Léandra plus tôt, un peu avant 18h... Le but de ce rendez-vous de fin d'après-midi, avant que les autres invités n'arrivent, est de plancher une grosse heure sur les "soirées causerie" que Léandra tient absolument à réaliser. Il faut choisir des dates, des thèmes, des invités... Léandra a fait du bon boulot : elle a griffonné, comme d'habitude, une série de notes sur son carnet fétiche. Pour ma part, je suis en plein questionnement : comment réaliser ces soirées sans que ça ne paraisse ridicule ? Les gens viendraient-ils à un truc pareil (à savoir une soirée en semaine, autour d'une bouteille de vin, de quelques chips et d'une question de société précise) ? La suite au prochain épisode...
Les autres arrivent aux alentours de 20 heures. Pour ce soir, il faut simplement décider de trois questions en suspens : à quelle heure nous prenons la route demain, qui prend qui dans sa voiture (nous partons avec deux véhicules) et le point de rendez-vous à Bruxelles au matin. Après moult détours, nous trouvons un terrain d'entente : nous nous retrouverons vers 5h45 près de chez Léandra. Je serai avec ma fille dans la voiture d'Emily, tandis que Léandra et Andrew voyageront avec Walter. Le rendez-vous des deux voitures se fera devant un feu rouge pas loin de chez Léandra.
Ça a l'air simple comme ça, mais en fait c'est foutrement compliqué de trouver un compromis pour ces trois questions, surtout celle concernant le point de rendez-vous... Est-on obligé de se retrouver au matin ? Oui ? Non ? Oui ? Est-on obligé de prendre un déjeuner ensemble sur la route ? Bah oui. Bah non. Oh ben oui. Toute une série de problèmes existentiels qui me font craindre durant un moment le pire, à savoir un calvaire de tergiversations durant tout le week-end, lorsque nous aurons à choisir les attractions, la nourriture, le chemin à prendre... Mais demain est un autre jour...
Nous partons tous tôt, vers 22 heures. Emily me ramène, ainsi que ma fille, à mon appartement, en voiture. J'essaie de faire dormir Gaëlle le plus vite possible : pas facile mais j'arrive à lui faire comprendre la nécessité d'être en forme demain pour son plus grand amusement. Quant à moi, forcément, je ne m'endors pas avant 1h30 du matin. La nuit risque d'être – ou plutôt sera – très courte, comme d'habitude.
La théorie de la bulle
De retour chez moi, en soirée, je trouve une deuxième carte postale d'Amy et Zapata dans ma boîte aux lettres. Elle vient du Canada. Amusant : je reçois cette carte après celle de New York, pourtant envoyée plus tard... Ha, les aléas des longs courriers ! (Cette dernière phrase contient un jeu de mots mal foutu et même pas marrant).
Je me souviens que je dois encore réaliser la cartographie de leur court périple aux États-Unis (New York - San Francisco - Yosemite National Park). Cette activité me prend une partie non négligeable de la soirée. Idée : lorsque leur voyage sera terminé (dans six mois environ), j'écrirai dans ce blog un article que je nommerai – simple exemple – "Des cartes & des cartes postales", reprenant toutes les cartes que j'ai réalisées pour eux, avec en vis-à-vis le recto des cartes postales qu'ils m'ont envoyées...
Alternatives
Je suis seul aujourd'hui. Emily se repose (d'après ce qu'elle m'a dit hier) ; Léandra et Andrew sont à leur cours d'impro, à se lancer des "FREAK OUT!" déjantés ; quant à Walter, je ne sais pas... Constat bizarre : à chaque fois que je parle de ceux qui ne sont pas là, je me limite à eux quatre. Ça aussi, c'est la "permanence des structures".
Je n'ai rien de plus à raconter... Je passe deux heures à écrire le texte ci-dessus (tout ça pour ça ?) et puis voilà ! Je ne pense pas que j'ajouterai un "addendum" aujourd'hui. Je m'en vais vers dix heures, non sans faire, de loin, un grand sourire et un signe à Clémentine, la serveuse sympa, qui me renvoie la pareille.
Le baron d'Holbach, ce héros au sourire si doux
(Une minute avant que la fameuse tigiste ne s'en aille pour toujours, j'avais – chose extrêmement rare ! – pris mon courage à deux mains et bégayé quelques mots embarrassés – trois exactement. Un résultat : un verre dans un café liégeois et rien de plus. Une conclusion : ce verre, je ne l'aurais jamais pris avec elle si j'étais resté muet.)
Je suis dans le train de retour vers Bruxelles avec Flippo, qui est fatigué d'avoir dormi dans une voiture durant tout un trajet l'amenant à Bertrix : Flippo est greffier dans un tribunal de la jeunesse et doit se déplacer avec son juge dans divers centres pour jeunes délinquants (je ne suis pas certain que ce soit le terme exact). Je bois une bière et nous mangeons des bonbons.
En soirée, je refuse tout contact avec Lewis, qui me téléphone tout le temps et qui m'énerve prodigieusement. Lewis veut me parler : il me laisse des messages sur mon répondeur, autant de bouteilles jetées à la mer – comprend-il seulement que je déteste ce genre de comportement ? Comprend-il seulement que je déteste les personnes collantes, qui veulent s'assurer constamment de mon bien-être ? Comprend-il seulement que je suis fondamentalement un solitaire et que je n'ai besoin de personne pour fonctionner ? Ni dieu, ni maître, ni père de substitution ! Lewis me téléphone cinq fois dans la journée. Après le dîner, j'éteins mon téléphone portable. Il me laissera encore deux messages. Le premier : simplement "Lewis" ; le second : "C'est Lewis. Que se passe-t-il, mon grand ?". Je fais exprès de ne pas lui répondre. Emily me demandera plus tard – et elle a entièrement raison – pourquoi je ne lui envoie pas simplement un message pour lui dire que je n'aime pas ça... La réponse : sans doute une certaine forme de méchanceté revancharde qui consiste à laisser dans l'expectative ceux qui me sollicitent plus que de raison...
Je passe la soirée avec Emily à la Maison du Peuple de Saint-Gilles. Emily est encore un peu malade (elle tousse de temps en temps) mais, à part ce détail, elle se porte bien, je trouve.
La musique des années 80 est à l'honneur aujourd'hui. À un moment, passe "I Won't Let You Down" de Ph.D... Sans doute la chanson est-elle aussi nulle que toutes les autres (Emily n'a pas l'air spécialement enchantée de l'entendre en tout cas) mais pour moi elle revêt une signification particulière : c'était ma chanson préférée quand j'étais un tout petit gamin, ex æquo avec "Maid of Orleans" d'Orchestral Manoeuvres in the Dark... Ha, la New Wave ! J'ai beau regarder tout cela avec un œil plus critique aujourd'hui, elle restera à jamais une des musiques de mon enfance (et si j'aime The Cure ou Echo and the Bunnymen encore aujourd'hui, c'est grâce à cet héritage des eighties).
(Après des décennies, je réécoute/revisionne cette vidéo d'OMD et je me dis : non seulement que le rythme syncopé de la batterie est terrible, mais aussi que la danse hystérique du chanteur est tout bonnement fantastique ! Mon but avoué si jamais j'arpente à nouveau une piste de danse : arriver, sans trembler, à un tel résultat.)
Tiens, Wali est accoudé au bar. J'ai passé trois heures avec ce gars et sa copine dernièrement, mais il ne me reconnaît même pas. (À un moment, il drague une des serveuses dans les toilettes, l'Espagnole qui a du mal à parler français : "Ha, tu fais du théâtre... Comme c'est intéressant !").
Emily me reconduit chez moi. Il me faut un peu de temps pour réaliser qu'il n'est que... 9 heures du soir.
Reprise du travail : fragments
Plus tard, coup de fil de Vinge. Je ne réponds pas. Re-coup de fil de Vinge. Je mange ; je ne réponds pas. Vinge me contacte donc sur Facebook. J'avais déjà du mal avec Wittgenstein, mais avec Vinge, c'est encore plus compliqué. Je ne pige que des bribes de conversation. Exemples : "J'attends la signature de Didier pour le boulot" ; "Au pire, je bosse en janvier. On va faire Zébulon dans mon appart. Tournicoton ! Sans clope, sans canette..." ; "Sinon, j'ai vu Tintin. Pas terrible... Un peu Indiana Jones, avec des bouts de Gollum"... Il propose de me téléphoner mais j'élude : "Tu peux me téléphoner demain s'il te plaît ? Je suis fatigué, je bois une bière devant South Park et je vais bientôt aller dormir...". C'est la stricte vérité.
Je vais en effet me coucher très tôt (23h). Je n'ai rien écrit aujourd'hui. Il faudra que je me rattrape demain (et demain, c'est aujourd'hui : paradoxe).