Asphalte

Parfum d'été. — Un arrêt de bus, en périphérie de Liège, en compagnie de mes collègues Charlotte et Wynka. Un parfum d'été, et non de printemps, flotte curieusement dans l'air : un léger crachin tombe lentement sur l'asphalte, produisant cette fameuse odeur caractéristique de chaleur moite qui, d'habitude, se dégage du sol seulement après les violentes pluies d'orage qui surviennent en plein cœur du mois d'août. Pour rien au monde, en cet instant précis, je ne m'abriterais en-dessous d'un parapluie ou ne me couvrirais d'une capuche ; pour rien au monde, en cet instant précis, je ne me protégerais de cette humidité anormalement estivale qui recouvre mes cheveux et imprègne mes narines ! — Charlotte : « Mon copain aussi aime ce genre d'atmosphère. Cet amour de l'humidité, ça doit être quelque chose de typiquement belge, quelque chose en rapport avec le climat de ce pays. »

Nouvelle routine. — Si, en ce moment, Yama et Flippo s'inquiètent — on peut toujours rêver ! — de ne plus me rencontrer dans le train du soir vers Bruxelles, c'est en raison d'une routine que j'ai récemment acquise. Celle-ci consiste à ne pas happer le premier train disponible après mon travail mais à m'éterniser pendant quelques heures à la grande brasserie de la gare des Guillemins. J'y bois tranquillement un ou deux Orval devant un livre ou un écran avant de rentrer chez moi. (Ce n'est ni plus ni moins stupide que de boire tranquillement un ou deux Orval devant un livre ou un écran autre part.)

Destruction. — Ils installent sans raison une virgule entre le sujet et le verbe (« Je crois qu'il, va pleuvoir ») ; ils ne semblent pas être au courant que les points de suspension sont au nombre de trois et non de douze (« Je crois qu'il, va pleuvoir............ »), que ces derniers ne doivent pas être placés n'importe où (« Je........... crois qu'il, va pleuvoir »), qu'il n'est pas nécessaire de terminer une phrase par six points d'exclamation pour que les lecteurs comprennent qu'il s'agit d'une exclamation (« Je........... crois qu'il, va pleuvoir !!!!!! »), que la phrase ne continue pas, comme si de rien n'était, après avoir été clôturée (« Je........... crois qu'il, va pleuvoir !!!!!! demain !!! »), que « lol » n'est pas un acronyme qu'ils sont obligés de placer tous les sept mots (« Je........... crois qu'il, va pleuvoir !!!!!! demain !!! lol »), ou encore qu'il faut des espaces avant et après certains signes de ponctuation, mais pas toujours (« Je ...........crois qu'il ,va pleuvoir!!!!!! demain!!! lol ») ; enfin, en dehors de la ponctuation, ils semblent incapables de rédiger une simple phrase sans commettre cinq fautes d'orthographe (« je ...........croi ,kil va peuvoir!!!!!!! dmain!!! looollll »). Ils écrivent à la va-vite de longs blocs de texte mal ponctués, mal écrits, sans queue ni tête, non pas sur la météorologie mais sur des faits divers ou des sujets politiques qu'ils considèrent comme brûlants et à propos desquels ils ont un avis très tranché. En voici un banal exemple (qui, je tiens à le préciser, n'a pas du tout été retouché) pioché presque au hasard parmi des milliers d'autres dans les discussions en ligne du journal La Meuse : « il existe des planning familial!!!! faut arrêter de mettre tt sur l immaturité!!! et les parents, l école, personnes n a vu , je n croix pas , pauvre pt ange qui n avait rien demandé , et bravo aux parents !!!!!!!!!!!!!!!!!!! de ses jeunes » — Savent-ils seulement qu'ils passent pour des idiots en écrivant ainsi ? Sont-ils conscients que c'est insulter le lecteur que de ne pas faire attention à la syntaxe, à la ponctuation, à l'orthographe, à la grammaire ? Et surtout : se rendent-ils compte qu'il est impossible de penser de manière saine lorsque le langage est à ce point malade ?

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