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« Original Pimpant »

Apnée, tachycardie et extrasystoles.  — Ha ! Elle va être belle cette journée de samedi, à Bruxelles, en compagnie de ma fille !  — Durant la nuit, je me suis réveillé en sursaut à deux reprises, avalant de grandes bouffées d'air, comme si je n'avais plus respiré depuis une minute (à bien y réfléchir, peut-être était-ce vraiment le cas ?). Le matin, je sors du lit plus fatigué que la veille, le cœur battant la chamade (la lave tiède de tes yeux coule dans mes veines malades ?*) et décalant ses battements. Je sais d'avance que toute ma journée sera gâchée par ces ratages cardiaques désagréables et ça m'énerve prodigieusement. Courant d'après-midi, le souffle court, je suis obligé d'aller me reposer quelques heures dans ma chambre, laissant Gaëlle, toute sage, devant un DVD des Simpson
Autant je suis dans une phase morale et intellectuelle ascendante en ce moment, autant je suis terriblement à plat physiquement. Peut-être la mort est-elle plus proche que je ne le crois ? — C'est vraiment très embêtant d'être une conscience prisonnière d'un corps dont je ne contrôle aucune des fonctions vitales... Mon cœur peut lâcher d'un instant à l'autre, annihilant toute vie, toute mémoire... C'est ce qui arrivera tôt ou tard de toute façon. (Tu aimes les évidences, hein, Hamil' ?) — Toute l'humanité n'est en fait que ceci : une mémoire, une conscience se perpétuant dans l'immensité de l'espace et du temps... Mais pour combien de temps encore ?  — Ça vaut bien la peine d'emmerder les autres avec ses rêves de pouvoir, d'argent et de domination... Au final, tout, absolument tout, sera aplani. (Absurdité, absurdité que tout ceci !)

Et en plus, il fait gris...  — Si seulement il faisait beau, mais non ! Le temps est gris et maussade. Non pas que je n'aime pas cette ambiance de « météo aquarium » (pour reprendre une expression de ma tantine), mais c'est embêtant de rester enfermé toute la journée dans un appartement avec Gaëlle. Et puis, un peu d'air frais me ferait sans doute le plus grand bien.

« Original Pimpant ». — Que serait devenue l'histoire de la famille Simpson sans la légendaire figure de Charles Montgomery Burns, vieux milliardaire acariâtre, égoïste mais haut en couleur ? Ce personnage porte à lui tout seul la moitié des gags les plus hilarants de la série. (Gags qui, soit dit en passant, sont contenus principalement au sein des toutes premières saisons... Car par la suite, ce show est devenu, à de rares exceptions près, très mauvais et consensuel — rattrapé par le formatage télévisuel ambiant, en quelque sorte.)

Vu aujourd'hui, pour la centième fois au moins, cet épisode génial (le 10e de la 5e saison) intitulé en français L'enfer du jeu**, dans lequel Burns crée son propre casino et perd complètement les pédales... Il se laisse pousser la barbe et développe une folie du contrôle couplée à une phobie des microbes (comme Howard Hughes !), à tel point qu'à la fin de l'épisode, Waylon Smithers, son fidèle bras droit, doit se déplacer dans un environnement aseptisé habillé en chirurgien. Scène mythique et surréaliste : Burns montrant une maquette d'avion à son assistant. Le vieil homme explique, le plus sérieusement du Monde : « Smithers, j'ai créé un nouvel avion. Il s'appelle "Original Pimpant". Il transportera 200 passagers depuis l'aéroport de New York jusqu'au Congo belge en 17 minutes. » (Voir ICI, à 15 minutes et 44 secondes du début. — À noter que tout l'épisode est presque du même niveau !) Gaëlle connaît cette réplique par cœur (j'en suis très fier).

Monty Burns présentant fièrement son « Original Pimpant ».

Retour sur La Nef des fous. — Je me suis bien gardé hier de prendre parti pour cette nouvelle, et pour cause : en première lecture, j'y décelais quelque chose de malsain. Rien à voir avec le fait que son auteur est un assassin... Non : simplement, le texte me mettait mal à l'aise.

Après une nuit de sommeil (et d'apnées), je peux pointer plus facilement du doigt la source du malaise : ce pamphlet « anarcho-primitiviste » relaie un discours assez proche par endroit de celui prôné par une branche de l'extrême droite contre, entre autres, la social-démocratie. — Je rectifie, car c'est plus complexe : il contient des éléments de langage propres aux anarchistes de droite et aux libertariens américains, ceux pour qui la liberté individuelle ne peut en aucun cas être entravée par des politiques de type égalitariste, principalement portées par la gauche...

De manière allégorique, le texte vilipende ces foules qui suivent aveuglément un gouvernement fonçant droit dans le mur et qui ne remettent jamais en cause la légitimité de ce dernier. Mais il est également un chouïa plus précis : la cible privilégiée de sa critique, c'est l'égalitarisme et les mesures antidiscriminatoires. C'est ainsi que les principaux protagonistes qui geignent sur le navire sont : des marins étrangers qui gagnent moins que les autres ; un gay qui se sent discriminé dans ses pratiques sexuelles ; une femme qui veut la même couverture (comprendre les mêmes droits) que les hommes ; une autre femme qui ne pense qu'au bien-être des animaux... Autrement dit, selon ce texte : la lutte contre la xénophobie, l'homophobie, la discrimination des femmes et la souffrance des animaux sont annexes ; ce qu'il faut avant tout, c'est un changement radical de société. (On pourrait presque rapprocher ce discours des idées de ceux qui n'arrêtent pas de dire du mal, en Belgique, du Centre pour l'égalité des chances ou du MRAX.)

Voilà de quoi s'emmêler les pinceaux... Car il y a dans La Nef des fous des éléments intéressants concernant les choix de société : à quoi cela sert-il d'égaliser les droits de chacun si, sur un plan plus vaste, toute la civilisation est vouée à l'effondrement ?  — Et pourtant, si je déteste la réticence de la social-démocratie vis-à-vis de toute remise en question radicale, je déteste encore plus les plans foireux qui ressemblent furieusement à des coups d'états militaires dont le but est de... de quoi au fait ? De revenir à une ère pré-technologique, pré-industrielle ? De tout raser, de faire mourir 90% de l'humanité pour revenir à une économie rurale/artisanale à échelle humaine ? D'envoyer des colis piégés à des scientifiques technophiles ?

Quoi qu'il en soit, cela repose la question de la technologie et de l'éthique : est-il possible de disposer d'une technologie plus en phase avec les besoins de l'humanité et moins proche du pouvoir et de l'argent ?  — Au fond, la question n'est pas tant celle de la technologie que de l'usage qui en est fait. Par ailleurs, toute avancée technologique a lieu sur différents plans : d'un côté, elle peut être un moyen d'asservissement et d'aliénation (il suffit de voir les progrès en matière de puces électroniques et de fichage) ; de l'autre, elle peut constituer une toute nouvelle forme de résistance (voir par exemple la constitution de réseaux indépendants et d'essence coopératiste sur Internet). — Mais tout ce que je raconte ici est un peu bateau, non ? Quoi de plus naturel pour le fan de métaphores maritimes à deux francs cinquante que je suis...

À suivre...
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* Une référence à Julien Clerc... Je commence à me répéter.

** Le titre anglais, $pringfield (Or How I Learned to Stop Worrying and Love Legalized Gambling), parodie du Dr. Strangelove (Or How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb) de Stanley Kubrick, est beaucoup plus inspiré.

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