Rock français 5 étoiles (1)

Grève d'une partie du personnel d'entretien de la SNCB ce jeudi matin. Pour me rendre à mon boulot, à défaut d'autres choix, je monte dans le train à double étage de 7h31, celui qui emprunte "l'ancienne ligne", fait arrêt dans six gares et roule au rythme d'un escargot, augmentant le temps de trajet de quarante minutes environ...

J'ai donc plus de temps devant moi...
Oui, mais plus de temps pour faire quoi ?
Je n'ai pas envie de lire.
Je n'ai pas envie d'écrire.
Je n'arrive même pas à dormir, malgré la fatigue héritée de ma soirée solitaire d'hier, passée à rédiger jusqu'à pas d'heure – et avec curieusement beaucoup de motivation.
Je finis par écouter de la musique.

Michel Cloup (duo), Notre silence

Dans le train vide ou presque, je décide donc d'écouter un album nouvellement acquis à la suite d'une chronique extrêmement positive parue dans le RIFRAF du mois de novembre. L'album : Notre silence, de Michel Cloup (duo). Le style : du rock français intimiste et minimaliste. Les protagonistes : le guitariste et chanteur Michel Cloup, accompagné du batteur Patrick Cartier. J'en écoute assez rarement, de ce rock-là, obnubilé que je suis (un peu trop sans doute) par ce qui se passe outre-Atlantique, outre-Manche voire outre-Rhin... 

Cet album, Notre Silence donc, est une vraie tuerie... Pour comprendre l'émoi qui me submerge, seul ou presque, dans mon train-escargot, il conviendrait d'écouter en entier et en boucle un des morceaux-fleuves de l'album (plus de 11 minutes), celui intitulé "L'enfant" : des guitares anguleuses et saturées appuyant un texte déclamé plus que chanté. "C'est pertinent comme du Shellac", lit-on dans RIFRAF. C'est vrai, et j'aurais presque envie de rajouter, si je ne m'étais promis ici-même de ne plus parler de ce groupe, que c'est incisif comme du Slint (ce qui serait un très beau compliment)... 
"L'enfant" relate ce qui ressemble très fort aux limbes d'une rupture amoureuse : ce curieux court moment durant lequel un ancien couple partage encore le même foyer, les mêmes pièces, les mêmes gestes mécaniques, les mêmes repas ("Je suis en retard pour le dernier repas que tu as spécialement préparé pour moi")... Une chanson magnifiquement construite, fantastiquement écrite, faite de constantes oppositions père/enfant ("J'étais devenu le père, je suis redevenu l'enfant") ou chaud/froid ("Tes joues glaciales sur les miennes bouillonnantes"). Et puis, ces dernières paroles, marquantes : "Tu m'embrasses rapidement et me parle de mes enfants : ne t'inquiète surtout pas, je les embrasserai... pour toi !".

"Notre silence", le deuxième morceau-fleuve de l'album, est une pépite d'un autre genre, faite d'une (très) lente progression de guitares et de batterie glaciales, coupée brièvement par un chœur enfantin venu de nulle part, et se terminant par un véritable déluge sonore... Du post-rock à texte. Quant aux autres morceaux, ils possèdent la même intelligence, la même urgence, la même franchise.

À noter en passant – car ce blog est avant tout un journal personnel sans queue ni tête qui n'a nullement la vocation d'être un site de critique musicale à part entière – qu'une des chansons de l'album ("Plusieurs fois cet après-midi") me rappelle mon amie Léandra et sa façon de considérer les appels téléphoniques : "Plusieurs fois cet après-midi, j'ai eu envie de t'appeler, pour savoir comment tu allais aujourd'hui. Nous aurions parlé de tout et de rien... Une avalanche de banalités, comme nous le faisions quotidiennement... Et tu m'aurais sans doute rassuré sur des détails assez peu importants. J'aurais fait la même chose avec toi. Ça m'aurait fait du bien ; ça t'aurait fait du bien aussi, je crois... Et nous aurions raccroché, un peu mieux tous les deux."

Pas moyen de trouver pour l'instant sur le Web, en guise d'entrée en matière, une version en streaming de "Notre silence" ou de "L'enfant", alors je me rabats sur la première chanson de l'album, splendide aussi d'ailleurs (et sans doute un peu plus facile d'accès), "Cette colère"... Ça parle de deuil, de colère indomptable, c'est très beau et ça donne le ton.



Maison du Peuple avec Emily & Walter

Emily était malade en ce début de semaine (encore, oui)... Aujourd'hui, ça va mieux, alors elle propose de nous retrouver... à la Maison du Peuple de Saint-Gilles, avec Walter, qui arrivera plus tard. Bigre, j'y aurai vraiment passé toutes mes soirées, dans ce café !

Les serveuses et serveurs sont tellement habitués de me voir débarquer que je n'ai souvent plus besoin d'ouvrir la bouche pour commander à boire. On me sert directement un Orval, ou à défaut une Chimay blanche (l'Orval est une denrée rare pour l'instant : les serveurs me disent tous que c'est à cause des exports prioritaires vers les États-Unis – décidément, chaque café dispose de sa propre "version des faits"). Être connu pour la bière que je commande au bar... Je ne sais pas si je dois m'en féliciter ou m'en inquiéter... 

Je ne me rappelle plus très bien de quoi nous avons parlé. Je n'ai pas mangé, je bois beaucoup trop et j'en suis presque saoul. La Maison du Peuple est pleine à craquer, comme chaque jeudi soir, d'autant plus que nous sommes une veille de jour férié. Quelles conneries ai-je racontées ? Je préfère ne pas le savoir.

En fin de soirée, une de mes serveuses préférées (celle que j'appelle Clémentine, mais qui ne s'appelle sans doute pas Clémentine) arrive à notre table et ramasse les petits bouts de papier éparpillés un peu partout : "Ha mais ça y est, vous avez recommencé à tout déchirer !". Moi : "Hé mais ce n'est pas moi cette fois-ci, c'est elle, c'est Emily ! Je ne suis responsable que des petites cocottes en carton !". Alors, Clémentine prend une des cocottes en question et me la met sur ma tête. Pourquoi pas ? 

Un peu plus tard, une autre serveuse (la blonde que j'appelle... euh... comment je l'appelle, celle-là ? Ha ben elle n'a pas encore de surnom, en fait – je vais l'appeler Gwen) passe avec un plateau sur lequel est posé un verre rempli de bière. Maladroite, elle me le renverse carrément sur la tête, mon manteau et mon sac. Conséquence : je commence à puer la bière – manquait plus que ça ! Pour se faire pardonner, elle me lance : "Désolée, désolée, je t'offrirai la prochaine". Il n'y a pas eu de prochaine lors de cette soirée... J'espère qu'elle s'en souviendra la prochaine fois...

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