Train en folie

Absence d'humour. — Cette vieille grand-tante (une des sœurs de feu mon grand-père) ne possède aucun second degré, ni même, maintenant que j'y pense, aucun sens de l'humour. Elle accepte chaque information avec un sérieux frôlant le ridicule : tout ce que je lui raconte, y compris les choses les plus incongrues, loufoques, surréalistes, est directement ingurgité comme étant la vérité et ne lui arrache pas le moindre sourire. La situation me fatigue et m'amuse à la fois.

Le train s'immobilisera trois fois. — Arrivé en périphérie de la capitale, le train Charleroi-Bruxelles s'immobilise complètement. À partir de ce moment, et ce pendant presque une heure, la contrôleuse nous informe de l'évolution de la situation. (Je prends note des phrases au fur et à mesure : la retranscription est donc beaucoup plus fidèle que d'habitude.)
Premier message : « Mesdames et messieurs, en raison d'une personne couchée sur les voies, notre train est immobilisé pour le moment. »
Deuxième message : « Mesdames et messieurs, votre attention s'il vous plaît. La personne est toujours sur les voies. Nous attendons qu'elle s'en aille pour repartir. »
De petits rires nerveux se font entendre dans la voiture.
Troisième message : « Nous attendons l'intervention des secours. La personne est couchée sur les voies. Merci de votre patience. »
Quatrième message : « Mesdames et messieurs, la police est arrivée sur place. Elle est occupée à libérer la voie. Merci de votre compréhension. »
Cinquième message : « Mesdames et messieurs, votre attention s'il vous plaît. La police est maintenant sur place. Nous attendons l'autorisation d'Infrabel pour repartir. »
Une alarme stridente retentit juste avant que la contrôleuse ne reprenne la parole pour délivrer un sixième message : « Avis à la personne qui a utilisé l'Help Assistance dans la quatrième, cinquième ou sixième voiture : je ne peux hélas pas accéder à cette voiture pour l'instant ! »
Regard intrigué des passagers et, à nouveau, rires nerveux.
Septième message : « Mesdames et messieurs, votre attention s'il vous plaît, nous allons bientôt redémarrer, merci pour votre patience ! »
Le train redémarre. Les gens crient quelques « Ouais ! » enthousiastes, mais le train s'arrête à nouveau, puis redémarre, puis s'arrête une nouvelle fois. Huitième message : « Mesdames et messieurs, nous sommes à l'arrêt car quelqu'un a ouvert la porte du train. Nous remercions cette personne ! »
Toute la voiture éclate de rire et, à travers la fenêtre, j'observe la contrôleuse, suivie de deux techniciens, courir vers l'arrière du véhicule. (Voilà une situation dans l'ensemble très comique, mais je suis certain que ma grand-tante n'aurait pas rigolé une seule fois !)

Les lépidoptères. — Coup de téléphone de Mary alors que je suis au Parvis de Saint-Gilles : elle a trouvé par hasard, en rangeant en profondeur les armoires de la cuisine, plusieurs nids de « mites »* à l'intérieur de verres à Champagne retournés (!). Elle m'explique que ces petits lépidoptères avaient eu le temps d'y produire de la soie et d'y pondre des larves en abondance. Elle les a annihilés, non sans un haut-le-cœur. — On a donc fini par le dénicher, ce foyer dont je parlais déjà dans cet article... en espérant qu'il n'y en ait pas d'autres.

Consultations de neurologie. — Andrew et Nanash me rejoignent en seconde partie de soirée. « Alors, comment ça va, en neurologie ? » Nanash me répond qu'il passe sa journée à traiter des cas inintéressants au possible : « Non mais parfois, c'est surréaliste quoi ! J'ai eu un patient dernièrement qui m'a expliqué avoir mal à la tête à chaque fois qu'il brûlait de l'encens dans son appartement. Je lui ai posé la question : "Vous avez déjà essayé d'arrêter l'encens ?" Et il m'a répondu : "Ha bon ? Vous croyez que c'est lié ?" »

Trullemans, Trullemans... — Nanash déclare suivre de près l'affaire « Trullemans » (pour en savoir plus, taper ce nom dans un moteur de recherche) qui prend en ce moment une place totalement disproportionnée dans le paysage médiatique belge francophone, au point de donner lieu à de nombreux débats sur... du vide. Nanash scrute sans relâche la presse et s'indigne de la bassesse de certains chroniqueurs de journaux. Il a été particulièrement choqué par la récente « opinion » de Dorian de Meeûs dans Lalibre.be, intitulée « Ce que Luc Trullemans et Véronique Genest révèlent sur notre société... » Nanash veut absolument que j'en prenne connaissance. Il commente le texte en direct : « C'est vraiment n'importe quoi cet article, n'importe quoi ! J'étais tellement choqué que je leur ai écrit un courrier d'indignation. Ce type mélange tout ! Mais qu'est-ce que le mariage pour tous vient faire dans cette histoire ? Et puis, cette phrase : "En s’empêchant d’aborder des sujets sensibles tels que l’islamisme radical..." : mais on ne parle que de ça, justement ! On n'arrête pas de parler de l'islamisme radical ! L'islamisme radical fait tout le temps la une des journaux ! » — Voilà qui est bien dit ; pas besoin d'en dire plus. Au revoir donc, stupide affaire « Trullemans » !

Le chat. — Je n'ai toujours pas vu Quid, le nouveau chaton de Léandra, et c'est très grave. Si ce chat est là, me disent-ils, c'est pour qu'on aille le voir. Il faut donc que j'aille dire bonjour à Quid au plus vite, sinon Léandra pensera que je n'aime pas son chat, que je l'évite... (Quelle idée !)
  
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* Après plusieurs observations attentives et recherches sur Internet, je gagne en précision : il s'agit sans aucun doute de « teignes des grains ».

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