Discussions rêvées

– Dis donc, Hamil', pour le moment, tu aimes particulièrement les retranscriptions de discussions dans ton journal, non ?
– Ah oui ? tu trouves ? 
– Bah oui ! Tu ne fais presque plus que ça : retranscrire des discussions... Hier avec Fred puis Wali ; avant-hier avec Léandra puis Mary ; dimanche avec Gaëlle... On dirait que t'as trouvé une nouvelle façon de nous communiquer toutes tes conneries.
– Et c'est lassant, c'est ça ? 
– Bah... Euh... Non, ça va encore... Mais j'ai l'impression que ça devient compulsif, voire malsain...
– "Compulsif" ? "Malsain" ? M'enfin, tu déconnes ou quoi ? C'est juste que, quand je discute avec des gens, c'est souvent plus simple, forcément, d'adopter le format de la discussion, avec des tirets marquant les différents protagonistes, et tout et tout...
– Ben justement, pour cette discussion, il n'y a à proprement parler pas de "protagonistes"...
– Comment ça ?
– Hé bien, tu ne discutes avec personne, en ce moment...
– Je ne comprends pas.
– Cette discussion, tu l'as inventée de toutes pièces. C'est dans ta tête, mon gars. Personne ne t'a jamais réellement dit que, pour le moment, tu aimais particulièrement retranscrire des discussions dans ton journal.
Ha-ha-ha !
– Je t'assure ! Tu es en train d'écrire un truc qui n'a jamais été prononcé dans le monde réel, une discussion qui n'a jamais réellement eu lieu.
– T'essaies de me faire flipper, c'est ça ? De me dire que je deviens complètement fou ?
– Pas spécialement... Peut-être n'es-tu pas fou... Peut-être testes-tu simplement une nouvelle fois la technique de la mise en abyme ? Dans ce cas, c'est à nouveau totalement raté !
Pffff...
– Ben c'est comme ça, mon gars ! Désolé si je te fais de la peine, mais t'es sur la mauvaise pente, là !
– J'ai juste une question : si cette discussion n'a pas réellement eu lieu, faute de protagoniste, ça veut dire que tu n'existes pas réellement ! Qu'est-ce que tu réponds à ça ?
(...)
– Ha ! Je l'ai eu à son propre jeu, ce couillon ! 
* * *


– Oui, allo ?
– Hamilton ! Ça va ? T'es où ?
– Je suis à la Maison du Peuple.
– Ha ! Comme c'est original !
– Oui, ça m'arrive très rarement, je sais... Les serveurs ne m'ont pas reconnu et m'ont proposé un Coca.
Haha ! Tu es seul ?
– Oui, je suis seul...
– Moi, je passe la soirée avec Nanash, mais je t'appelais pour autre chose...
– Pour autre chose ?
– Oui... Je me disais que je réécrirais bien une journée sur ton blog, à l'occasion.
– Pourquoi ?
– Je ne sais pas, je me suis dit que ça te permettrait de te reposer un peu...
– Ha oui, c'est une bonne idée. D'autant plus que j'ai du mal pour le moment... Et tu parlerais de quoi ? 
– De toi entre autres, mais pas spécialement de ta journée... Et d'autres trucs...
– Bon, OK, et tu veux faire ça quand ?
– Je ne sais pas. C'est bon pour moi de ce vendredi à mardi prochain...
– Disons lundi alors. Il ne se passe jamais rien le lundi !
 

* * *


– Oui, allo ?
– Hamilton, c'est Tintin ! Dis, je voulais te remercier d'avoir réaffirmé la persistance de ma clarté linéaire intangible face au déferlement de la "performance capture"...
– Oh, bah, tu sais, c'est peu de choses... Mais merci d'avoir appelé ! Je suis très touché !

"Uh, does anyone here speak English?"

Je suis seul à la Maison du Peuple de Saint-Gilles... Vers 22h30, coup de fil d'un numéro privé... Je pense un court instant avoir affaire à un(e) vendeur(se) voulant me vanter l'intérêt de m'abonner à Luminus/Electrabel à la place d'Electrabel/Luminus, puis je me rappelle de l'heure et me dis que ce genre de coup de téléphone n'est pas probable à cette heure tardive. Je décroche.

– Hamil', c'est Fred !
– Hé ! Coucou ! Ça va ?
– Ouais, là, je sors de "Tintin" et tu avais raison : c'est vraiment une grosse merde, ce truc !
Ha ! Tu ne peux pas savoir à quel point ça me fait plaisir que tu me le dises ! Mais bon, c'est logique, vu que t'es un amateur de bandes dessinées, et aussi de Tintin...
– C'est vraiment du grand n'importe quoi ! C'est comme tu disais : au début, on se dit que ça va être bien et puis c'est vraiment dé-bi-le !
– Ouais, je trouve aussi...
– Comme toi, je n'arrive pas à comprendre comment certains tintinophiles ont pu adhérer à ce machin... C'est assez incroyable en fait !
– Ouais, à mon avis, ils ont été payés ou alors ils ont reçu certains privilèges, du genre "droits d'exclusivité sur les interviews"...
– Et puis, il y a vraiment des scènes récupérées d'Indiana Jones... Haddock dans le side-car, c'est le père d'Indiana Jones : le type qui foire tout ou presque dans la Dernière croisade !
– Clairement... Haddock, c'est Henry Jones.
– Je suis vraiment énervé. Il fallait que je partage ma haine avec quelqu'un ! 
(Oh, comme je le comprends !)

On peut continuer la liste, avec juste ce qu'il faut de mauvaise foi : les Dupondt, ce sont deux incarnations de Marcus Brody ; Omar Ben Salaad, c'est le Sultan qui veut absolument sa Rolls-Royce ; etc.

J'en profite pour affirmer ici même que, alors que j'ai détesté le "Tintin" de Spielberg (et c'est peu dire !), j'ai toujours adoré Indiana Jones (du moins les trois premiers épisodes). L'humour y est réussi, les scènes d'action extrêmement bien dosées et le scénario bien ficelé... Oui, oui ! Je mentionne ce fait afin qu'on ne puisse à aucun moment me taxer de "Spielbergophobie" primaire, car ce serait un affront à la vérité vraie, oui Monsieur ! Par exemple, je trouve Duel vachement bien foutu et, enfant, j'ai été très impressionné par Rencontres du troisième type, malgré la performance ridiculement mauvaise de François Truffaut. (Vraiment aucun rapport, mais je viens à l'instant de me rendre compte, en zieutant par hasard une photo sur Google, de la ressemblance assez phénoménale entre Toine du badminton et ledit réalisateur français !)
* * *


Avant de retourner chez moi, je me fais intercepter par Wali, un des habitués de la Maison du Peuple... Le 19 octobre, j'avais passé une fin de soirée avec Darnia et lui. Depuis lors, aucune nouvelle de Darnia (ça t'étonne, Hamilton ?). Par contre, Wali, je l'ai revu à plusieurs reprises accoudé au bar, sans qu'il ne se rende compte de ma présence...

– Je t'avais vu plus tôt mais t'avais l'air très concentré sur ton PC... J'ai pas voulu te déranger.
– Ha, ben tu pouvais... Y a pas de problème...
Alors, ça va, tu as recommencé à travailler ?
– Euh... Oui, faut bien. J'ai été opéré il y a un mois... J'ai recommencé il y a plus de deux semaines donc...
– Et sinon, ça va ?
– Ouais, ouais, ça va... Et toi ?
– Ah ça va bien ! Je reviens de Pologne et je repars bientôt... J'ai trouvé une petite copine là-bas...
– Ha ?
– Là-bas, les filles sont supérieures, franchement. En intelligence, surtout.
– Ha ?
– Oui, ici, en Occident, tu peux rester des années célibataire... Les femmes ne comprennent pas les hommes. Là-bas, c'est différent... Elles sont moins égoïstes, elles comprennent mieux...
– Ha.
– D'ailleurs, tu te souviens de la soirée qu'on a passée ensemble ?
– À la table, là-bas, avec Darnia ? 
– Ouais. Tu l'as revue depuis ?
– Non.
– Ben moi non plus. Mais tu vois, on était deux célibataires et bon, elle n'a rien essayé...
– Hmmm... Faut dire qu'on... Enfin je n'ai rien essayé non plus...   
– Ouais mais bon.
– Ben ouais.

– Là, tu vois, j'ai pris une voiture, j'ai tracé à travers l'Allemagne, direction Cracovie, une ville universitaire, et en très peu de temps, voilà que je tombe sur une fille, quoi. Et elles sont toutes plus intelligentes là-bas. Je veux pas faire de stéréotype, mais en moyenne, c'est vrai.
– Ha ?
– Ouais, ouais...
* * *

Hé bien voilà, il semblerait que j'ai rattrapé ce putain de retard d'écriture accumulé depuis Disneyland® Paris (Tchoutchou !)... Je suis à jour, je suis à jour ! 

Bribes de discussions

(Ces échanges n'ont jamais eu lieu stricto sensu, dans la mesure où j'ai déplacé, supprimé et recollé des éléments de discussion pour recréer une conversation suivie. Le fond des échanges, par contre, est plus ou moins respecté...)

(Avec Léandra, vers 15h40, à la Maison du Peuple de Saint-Gilles.)
– (...) Par après, je me suis dit que la prochaine fois que j'écrirais une nouvelle, je créerais une structure avant de commencer.
– M'enfin, mais oui !
– Parce que là, je ne sais pas trop comment retomber sur mes pattes...
– Ben oui...
– Ouais, je sais, c'est très con. Mais sinon, ce n'est pas trop nul quand même ?
– Non, ça va, mais tu restes trop dans le monde des idées, tu devrais ajouter beaucoup plus d'éléments narratifs.
– J'ai du mal avec la narration... Par contre, les idées, j'aime bien...
– Oui, mais on ne fait pas une nouvelle rien qu'avec des idées.
– Je sais, mais c'était censé être le début, j'aurais développé la narration par après...
– Moi, je l'aurais bien vu plus ancré dans le réel, ce début de nouvelle. Par exemple, tu aurais dû réellement faire croire que tu écrivais cela maintenant parce que tu n'avais pas ta fille ce week-end ; et aussi faire comprendre que tu n'aurais jamais osé écrire quoi que ce soit pendant qu'elle était là.
– Ha ouais, c'est pas con, mais c'est trop tard. De toute façon, je pense sérieusement que je vais laisser tomber.
– Tu peux aussi arrêter pour le moment et reprendre plus tard.
– Tu crois que ça se fait, ça ? Que je pourrais reprendre le week-end prochain par exemple ?
– Bah oui.
– Ouais, bof... C'était une expérience. Je vais laisser tomber, ce n'est pas grave. Ce n'est pas comme si des gens me lisaient, hein...
– Hmmmm...

(Toujours avec Léandra, vers 17h30, dans les "coursives" du Potemkine, devant un concert de jazz du Fred Becker Trio.)
– Pfff, je n'ai vraiment pas le moral.
– C'est à cause de Jonas ?
– Oui et non. De toute façon, pour sortir avec lui comme la dernière fois, autant ne pas sortir avec lui.
– De fait.
– Je suis très déçue de constater qu'il a oublié qu'on devait se voir jeudi pour visionner trois épisodes de Star Wars. Là, il est avec ses copains, donc tout va bien pour lui. Il comptait d'ailleurs faire un truc avec eux ce jeudi.
– [Je ne sais pas si je l'ai dit ou si je l'ai pensé très fort] Ouais, donc, grosso modo, quand il angoisse, il est très content de t'avoir mais quand tout va bien, il t'oublie...
– En fait, ce qui me ferait vraiment du bien, à moi, c'est de pouvoir passer la Noël chez mes parents avec mon compagnon, quel qu'il soit.
– Tu mets la charrue avant les bœufs, là.
– Bah...
– La chose arrivera sans doute un jour, faut pas désespérer. Sans doute pas cette année, mais bon...
– Quoi ? Pas cette année ? Ooooh, pffff !
– De toute façon, ce n'est quand même pas si important que ça, non ? L'important, c'est d'être bien en couple, tu ne penses pas ? Après, tout coule de source...

– Hmmmm...

(Avec Mary, vers 22h, au Bar Parallèle, après avoir été voir le film Drive à l'UGC Toison d'Or.) 
– Et alors, quand est-ce qu'on va te rhabiller, Hamilton ?
– Quoi ? Tu reviens encore avec ça ?
– C'est très important d'avoir un style, tu ne t'en rends pas assez compte !
– Pfff...
– Il faut que je te dise un truc... Ça ne va sans doute pas te faire plaisir, mais tant pis, c'est pour ton bien : il faut vraiment que tu changes. Tes amis ne te le disent pas assez. Faut dire que Léandra est un peu comme toi, elle aussi : elle est très braquée et ça n'arrange rien.
– Pffff...
– Non, mais sans déc', t'es vraiment trop braqué, tu te mets des œillères, tu ne veux rien changer dans ta vie, tu ne te remets jamais en question. 
– Je sais... J'ai toujours été comme ça...
– Ce n'est pas une réponse, ça !
Si, c'est une réponse ! Les gens m'acceptent comme je suis, ou alors je les emmerde, sérieusement...
– Mais tu ne seras jamais heureux comme ça... Mon père est comme toi. Et mon frère a été comme toi. Mais depuis qu'il a changé, qu'il porte des nouvelles fringues, il a une vision plus positive de lui-même, il a une petite copine et il est bien mieux dans sa peau !
– Pffff... L'éternel débat... Être dans le coup : "le monde évolue alors il faut évoluer avec le monde". Ben nan, désolé ! Si le monde qui m'entoure devient totalement con, je vais pas devenir con pour être dans le mouvement...
– Ben ça fonctionne comme ça de nos jours, Hamilton ! Les femmes ont le choix désormais. Elles attendent moins longtemps. Si elles ont envie de se barrer parce que leur mec est trop chiant, elles se barrent, un point c'est tout.
Gné ? Quel rapport ?

– Ben t'as peu de chance de trouver quelqu'un, là.
Je sais. Et ?
– Ben faut que tu changes.
Ben nan.
– Raaaah, t'es chiant. Essaie au moins de changer de look. Si ça ne te va pas, au moins t'auras essayé et je te laisserai tranquille !
Nan.
– Et le boulot, pourquoi tu travailles aussi loin ?
– Bah ! J'aime bien mon boulot. C'est assez rare. Et puis, je ne cherche pas vraiment ailleurs.
– Ben tu devrais. 
– On verra.
– Pffff... Et pourquoi tu ne reprends pas le badminton ?
– Pas envie.
– Donc, en gros, ta vie, désormais, c'est : boulot-boire-dodo...
– Ouais, ça ne change pas tellement d'avant. Avant, c'était : boulot-badminton-boire-dodo...   
– Et en plus, tu ne crées rien.
– Ben j'écris, c'est toujours mieux que rien...
– Mouais...
– Hmmmm...

* * *

En fin d'après-midi, Léandra et moi sommes dans les hauteurs (les "coursives") du Potemkine pour assister à un concert de jazz qui se joue en contrebas. Il s'agit du Fred Becker Trio, sauf qu'ils sont quatre : le saxophoniste et clarinettiste Fred Becker, accompagné d'un batteur, d'un contrebassiste et d'un guitariste. Le public de départ n'est pas habitué au jazz : les applaudissements sont donc peu nourris entre les solos. Observation amusante, depuis notre "tour d'ivoire" : ce premier public sera petit à petit remplacé par un public en moyenne plus vieux et plus connaisseur, de telle manière que durant le second set, les applaudissements se feront plus chaleureux... Niveau musical, le groupe pratique un jazz pas trop difficile à suivre. Certains morceaux côtoient le rock progressif. Le batteur se marre bien, le guitariste part dans de belles envolées bruitistes et le saxophoniste a le sens du spectacle (comme le remarquera Léandra).

Peu après 19 heures, je rejoins Mary à l'UGC Toison d'Or pour un ciné. Le film choisi, après moult tergiversations : Drive de Nicolas Winding Refn. L'histoire : un homme taciturne, as de la conduite, est cascadeur pour Hollywood la journée et conducteur ("driver") pour la mafia la nuit. Tout se passe bien jusqu'au jour où, par amour pour sa voisine, il tente d'aider le mari de cette dernière dans un casse qui tourne mal. Le scénario classique...

Quand je rejoins Mary à l'UGC ce dimanche soir, elle se trouve à l'intérieur d'une file d'au moins trente mètres, qui rappelle Disneyland® mais en moins magique. Tout Bruxelles a décidé d'aller au cinéma apparemment. Arrivés dans la salle, nous sommes obligés de nous installer au second rang et de plier le cou à 45 degrés pour voir l'entièreté de l'écran.

La première heure du film se déroule dans une ambiance ouatée qui n'évite pas certains poncifs : longues scènes lancinantes où les deux "amoureux" se regardent dans le blanc des yeux sans rien dire – faut dire que le gars est un pince-sans-rire –, ralenti énervant durant un montage montrant un retour au bucolique en plein Los Angeles... Ces quelques scènes mises à part, j'aime la première heure de film dans son ensemble : les scènes de courses-poursuites sont intelligentes, la musique est prenante, le personnage principal est calme et mystérieux...

Après, ça se gâte car nous passons de la course-poursuite à la violence gratuite. Le "héros", qui ne porte pas d'arme, est obligé de recourir aux pires atrocités pour se protéger et défendre celle qu'il aime. Entre autres joyeusetés : écrabouillage compulsif de tête dans un ascenseur ou utilisation d'un marteau pour faire (très) mal... Du côté du "méchant mafieux sans pitié", nous aurons droit à une répugnante ouverture de l'artère ulnaire, ainsi qu'à d'autres scènes dans lesquelles le sang fait d'immondes gargouilllis. Toutes les cinq minutes, Mary se cache du mieux qu'elle peut. Une partie de la salle (moi y compris) rigole tellement c'est gore. Force est de constater que ce film est beaucoup moins subtil que le Parrain (rien d'étonnant). En conclusion : c'est mieux que le ridicule "Tintin" de Spielberg (pas difficile, cela dit) mais ça ne vaut certainement pas le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes 2011. Enfin, moi, pour ce que j'y connais en cinéma, hein...

"Nona" (2)

Samedi 5 décembre 2009

— Papa ?
— Yup ?
— Pourquoi est-ce que la lune, parfois, elle change ?
— Elle change ?
— Oui, elle change. Pourquoi est-ce que parfois on la voit comme un cercle, et parfois pas ?
— Ha oui... Les phases de la lune. C'est à cause de sa révolution autour de la Terre... Euh... Le soleil ne l'éclaire pas toujours de la même façon. Parfois, la lune est pleine, parfois c'est un croissant, parfois on ne la voit pas du tout...
— Et là, elle est quoi ?
Gaëlle me tendit un de ses dessins.
— Ben là, sur ton dessin, elle est presque pleine, mais pas vraiment. En fait, c'est ce qu'on appelle une lune gibbeuse.
— "Gibbeuse". Je ne connaissais pas le mot. Nona non plus.
Gaëlle reprit son dessin de mes mains, attrapa le rouleau de papier collant qui traînait sur sa petite table et s'en alla coller la feuille à l'un des murs de sa chambre.
Le dessin représentait un paysage de nuit. La lune était bien présente en haut à droite de la feuille : Gaëlle avait maladroitement dessiné un cercle, dont elle avait noirci avec application un mince croissant. Traversant le dessin, ce qui ressemblait à une route, avec en son centre des traits discontinus. Sur la route, un long camion vaguement esquissé mais reconnaissable. Dans le camion, un visage souriant ; devant le camion, un chat au regard triste. En arrière-plan enfin, des géants aux gueules béantes.
— Il représente quoi, ce dessin, ma chérie ?
— Ben c'est Isidore, tiens ! Nona dit qu'il faut qu'il meure.
— Ha ?
— Oui. Il doit mourir. Mais Nona dit que j'ai le choix de la mort. C'est pour ça que j'ai dessiné un camion : parce que j'ai décidé qu'il sera écrasé par un camion.
— Un camion...
— Oui, un camion. T'es bête ou quoi ? Tu sais ce que c'est, un camion, quand même ? Mais je ne sais pas où. Nona m'a dit que je devais dessiner des mangeurs de pierres.
— Des mangeurs de pierres... D'accord.
— Tu sais s'il y a des mangeurs de pierres près de la maison de Nanou et Gégé, papa ?
— Euh...

Le lendemain, pour la première fois, je voyais les petites ombres qui voltigeaient autour de ma fille.
Le lendemain, ma petite cousine arrivait en pleurs au dîner familial. Son chat venait de se faire écrabouiller par un camion.
Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas.
Longtemps, je me suis levé de bonne heure.
Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours !
Oh et puis merde !

"Nona" (1)

Vendredi 4 novembre 2011

Je profite de l'absence de ma fille ce week-end pour commencer mon récit.
J'ai déjà mentionné à maintes reprises dans ce journal les facultés mémorielles et imaginatives de ma fille Gaëlle. Elle n'a aucun don pour les jeux, aucun don pour les échecs, aucun don pour la stratégie, mais elle a une fabuleuse mémoire "à tiroirs" ainsi qu'une imagination débordante.
Gaëlle se souvient de tout : de chaque événement, de chaque phrase, de chaque mot prononcé. Lorsque je lui lis une histoire, une et une seule écoute lui suffit pour emmagasiner jusqu'au moindre événement, jusqu'au moindre vocable, jusqu'à la moindre intonation, à tel point qu'elle serait capable de me ressortir mot pour mot chacun des termes de la banale aventure narrée au pied de son lit un soir de mauvais temps, un an auparavant.
Et depuis peu, Gaëlle apprend à lire et à écrire.
Depuis peu, Gaëlle découvre le monde des idées.

Gaëlle imagine, depuis l'âge de trois ans, un univers qui n'appartient qu'à elle. À trois ans et des poussières, elle a créé un personnage sans forme ni âge définis, qu'elle a toujours nommé, pour je ne sais quelle raison, "Nona".
Nona était/est/sera une petite fille.
Mais Nona n'était pas (et n'a jamais été) une petite fille.
Nona avait trois ans.
Puis, du jour au lendemain, elle en a eu trente.
Nona était vivante.
Puis, du jour au lendemain, elle est morte.
"Désormais, elle vit dans le ciel."
"Désormais, elle a des ailes."
Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Gaëlle.

Jusque là, rien que de très banal. Tous les enfants ont leurs objets transitionnels ; tous les enfants s'inventent des histoires de croque-mitaines ; tous les enfants s'imaginent des monstres tapis sous leur sommier. Peu importe la forme que prend l'aventure ainsi créée : elle contient les peurs, elle organise l'inconnu, elle contrôle le néant, elle apprivoise la mort.
Si seulement ce n'était qu'une simple histoire de croque-mitaine.
Si seulement ce n'était que dans son imagination.
Le reste de l'histoire, il m'a fallu un certain temps pour la digérer. Et il m'a fallu encore plus de temps pour l'écrire.
Le village de mon enfance est endeuillé par la mort d'un troisième enfant et cela ne peut pas – ne peut plus – être dû à la simple contingence, au simple jeu des statistiques.
Gaëlle tue, sans le savoir.
Elle a commencé avec de simples animaux – avec des chats.
Putain de chats.
Aujourd'hui, plus âgée et plus intelligente, elle est en mesure de mettre en scène – d'organiser ? – le meurtre d'êtres humains.
Elle ne s'en rend pas compte mais ça marche.

Je saute des étapes essentielles à la compréhension. Je ne sais si un jour ce journal sera lu par un autre que moi mais peu importe au final ! Ne fût-ce que pour ma propre santé mentale, et aussi pour appréhender l'entièreté de ce phénomène macabre, il faut que je couche sur papier toute l'histoire. Toute l'histoire, oui, depuis le meurtre du premier chat. Depuis le meurtre d'Isidore.

Les montagnes russes amoureuses de Léandra

Ce soir, je vais manger chez Léandra. Je reviens du boulot et je n'ai rien apporté : ni vin, ni bières, ni chips... Léandra : "Haaa, zut, mais je n'ai pas de bières pour toi, moi !". Elle ouvre son frigo, qui contient cinq bières spéciales et une bête Pils. Elle ne sait donc pas ce que contient son frigo. Cela dit, moi non plus je ne sais pas ce que contient mon frigo (si ce n'est pas grand chose)... Comme entrée, elle réchauffe une petite pizza qu'elle découpe en huit parts. Comme plat principal, des pâtes aux lardons et au pesto rouge.

Léandra n'est pas dans son assiette, elle est un peu malade. Quant à moi, j'ai le nez bouché et la gorge enrouée. Nous sommes tous les deux fatigués. Nous remettons donc la discussion prévue (l'organisation des "soirées causerie") à plus tard et parlons d'autre chose : elle, moi, les autres...

Un sujet de discussion : Jonas. Léandra est ressortie une troisième fois avec lui, mais c'est à nouveau fini. La relation n'a pas duré longtemps et n'a pas été très passionnée. Jonas n'est pas prêt, blablabla... Alors, Léandra attend et espère : "Il y a une chance sur deux pour que nous ressortions ensemble un jour. Pas spécialement tout de suite, mais un jour." Elle regarde souvent ses mails pour voir si elle n'a pas reçu de nouveaux messages. Bizarre : Léandra n'ouvre jamais sa boîte aux lettres physique (surtout par crainte des factures) mais elle n'arrête pas d'ouvrir sa "boîte aux lettres virtuelle"... Mais doit-elle réellement attendre autre chose que de sempiternelles tergiversations de la part de ce gars ? Elle l'espère, mais ce n'est pas gagné.

En attendant, le temps passe et Léandra a envie de fonder quelque chose de concret, un couple stable, et d'avoir un enfant (elle a déjà trouvé une série de prénoms et s'est même renseignée sur l'insémination artificielle)... De mon côté, j'échaffaude une théorie bancale sur le fait que Jonas est justement une sorte d'enfant qui ne sait pas ce qu'il veut, et que c'est justement ce que Léandra adore chez lui : quelqu'un qui a la force d'un enfant (imagination, réflexion hors cadre), mais qui du coup possède aussi ses faiblesses (immaturité, angoisses du monde et incapacité de construire quelque chose de solide avec quelqu'un d'autre). Mouais, c'est ça, Hamilton : analyse-toi toi-même avant d'analyser les autres...

Léandra voudrait repeindre son appartement...
– Si tu devais changer les couleurs, lesquelles choisirais-tu, Hamilton ?
– J'en sais rien. Je m'en fous un peu. J'aime bien les murs blancs.
– C'est important pourtant, de décorer son appartement.
– Ha.
– Ben oui. Tu devrais vraiment te forcer un peu et y réfléchir, pour toi aussi.
– Oui. Euh. Oh, moi, tu sais...
– Je mettrais bien du jaune, sur le mur de la cuisine, non ?
– Beuh... Euh... Moi, j'aime bien le blanc, le rouge et le noir, mais le noir, ça ne le fait pas trop.
– Gris, ce serait bien, là, non ?
– Ha oui, peut-être gris et rouge... Ou alors tout blanc, simplement ?
– Ouais, on est d'accord : je n'aurais jamais dû mettre du beige au mur. J'aurais du mettre du blanc comme au plafond.
– Hmmmm...

J'ai toujours eu certaines difficultés à discuter de l'aménagement d'un appartement. C'est un peu comme pour les vêtements. Si Mary me lisait, elle m'écrirait que ça ne va pas, que je dois affirmer mon style, ma personnalité et tout et tout... Mais ça n'a pas réellement d'importance à mes yeux. Un appartement, c'est un truc fonctionnel avant tout. J'essaie quand même de décorer un peu le mien pour me sentir chez moi mais la maigre décoration ressemble plus à une tentative ratée qu'à une véritable décoration : la copie d'une carte ancienne du Québec collée n'importe comment sur un des murs du salon, des vinyles posés un peu partout, des "posters" de groupes montréalais, des livres dans deux bibliothèques, disposés sans aucune logique de classement... Et puis voilà ! Si je devais repeindre les murs de mon appartement, je suppose que ce serait de nouveau en blanc.

Avant de partir de chez Léandra, relativement tôt, je jette un œil au frigo, recouvert d'aimants et de cartes postales. Il y a des mois, nous l'avions orné de mots-magnets : des aimants constitués d'articles définis ou indéfinis, de mots ou de partie de mots en anglais. Ils sont toujours là aujourd'hui... La photo de Gaëlle est ainsi décrite : "some beautiful angel" ; pour Walter, c'est "cigarette", "ing" (pour la banque ING) et "latex" ; et devant Charles-Henri, j'avais apposé un simple "him". 

De retour chez moi vers 23h, je lutte contre le sommeil en relisant Le Secret de La Licorne d'Hergé (pour enlever de ma tête les images de cet affreux film) et je m'endors dessus (façon de parler).

Régularité

Approchez, approchez, Mesdames et Messieurs !
Venez découvrir le journal d'Hamilton :
le seul blog du Web (mon cul ouais !) qui propose 
un article complet pour chaque jour de l'année,
tenu avec acharnement par Hamilton 1er du nom,
et suivi par ses 16 fidèles lecteurs (bien le bonjour à eux) !
 
Le contenu n'est pas toujours des plus intéressants ?
Certains articles sont d'une médiocrité confondante ?
L'auteur est un horrible gauchiste ?
L'auteur est un vil lanceur de chats ?
 
Peut-être, mais il propose un article par jour 
et c'est la seule chose qui compte...
Mais comment y arrive-t-il ?

Aujourd'hui, Léandra a eu une longue conversation téléphonique avec Judith. Un seul élément de la conversation est porté à ma connaissance, car il me concerne directement : la régularité du présent blog... (Judith a consacré son  mémoire de licence en philologie romane à l'univers des blogs.)

Cela fait six mois environ que je renouvelle mon journal au rythme d'un article par jour, avec beaucoup de difficulté pour l'instant (j'ai pris du retard à cause de mon séjour chez l'ami Walt). Au départ, il s'agissait simplement de quelques mots écrits en quatrième vitesse ; aujourd'hui, c'est plus complet, plus détaillé et plus chiant aussi (oui, oui, n'ayons pas peur des mots !). Peu importe tant que je m'amuse en l'écrivant et que je ne force personne à le lire (manquerait plus que ça !)...

Mes milliers centaines quelques lecteurs se posent sans doute peut-être la question suivante : comment est-ce que j'arrive à tenir le coup et à écrire un article complet et intéressant aussi long et ennuyeux tous les jours ? La réponse n'a aucun rapport avec le fait que je ne dors quasiment pas la nuit ou que je passe beaucoup de temps dans les transports en commun, oh que non ! La réponse est beaucoup moins tordue : j'exploite tout simplement dans ma petite cave, pour un salaire de misère, quatre blogueurs sociopathes. Un bol de céréales et une Jupiler suffisent à leur régime quotidien et ils ne se plaignent jamais (de toute façon, ils sont attachés). Bertrand s'occupe de mes textes à caractère politique ou philosophique ; Éric de tout ce qui est "amours déchus" et "textes dépressifs" ; Laurent du ludique et de l'informatique ; Rudy, enfin, de l'humour et de la musique. 

Aujourd'hui, c'est Rudy qui s'est occupé du présent texte. Je lui ai dit avant d'aller me coucher : "Rudy, pour ce soir, il faudra faire une mise en abyme, dans laquelle tu devras absolument faire croire au lecteur que c'est moi qui ai écrit ce blog mais où tu devras aussi parler des véritables artisans qui sont derrière tout ça : vous !" Rudy a très bien fait son travail car dans le présent texte, on a toujours l'impression que c'est moi qui écris. Ils sont très forts, je suis content de les avoir, ces couillons !

* * *


Bon, sinon, aujourd'hui, je fais quoi ce soir ? Je suis à la Maison du Peuple pardi (et oui !), à la même table que ce lundi. Emily est là, comme ce lundi. Elle travaille toute la soirée sur son ordinateur portable, comme ce lundi. De mon côté, j'en profite pour continuer mon texte sur Disneyland®. Emily et moi ne nous parlons presque pas de la soirée... Vers 23h, Léandra déboule dans le café. On parle un peu de Jonas (Léandra n'est de nouveau plus avec lui – c'est Santa Barbara !). Emily dit à Léandra que de toute façon, elle ne le sent pas trop, ce type, qu'il cache quelque chose... Mmmmmh... Léandra ressortira-t-elle une quatrième fois avec Jonas ? Et qu'en pensera Cassandra, qui est secrètement amoureuse de lui mais qui ne se doute pas que Matthew, le mari de Samantha, s'apprête à lui déclarer sa flamme ? Et moi dans tout ça, bordel ? La suite au prochain épisode.

"Tintin" de Spielberg ou l'art de transformer l'or en plomb

Une question : qu'a donc fumé Hugues Dayez, tintinophile et critique de cinéma, avant la projection du premier épisode de la trilogie "Tintin" de Steven Spielberg (Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne), pour voir en ce film une "réussite exceptionnelle" ? Ou, à défaut d'avoir fumé une quelconque moquette de piètre qualité, que lui a-t-on donné en échange d'un tel éloge dithyrambique ? Peut-être n'a-t-il rien fumé ni reçu ? Peut-être a-t-il réellement adoré ce film ? Alors c'est à n'y rien comprendre car ce premier "Tintin" de Spielberg a tout – absolument tout de la véritable daube.

Le film commence pourtant bien : après un générique en ombres chinoises finement réalisé, nous avons droit à une première scène assez réussie au marché aux puces, avec en prime une jolie référence à Hergé et à la ligne claire. Hélas ! Si les premières minutes tiennent la route et si la technique de la "performance capture" permet parfois de très beaux rendus, le film plonge ensuite très vite dans de l'action "à la Spielberg"... Ce n'est plus Tintin que l'on regarde mais Indiana Jones ! Ou plutôt, comme dirait mon ami Vinge qui est allé voir ce film avant moi (et qui ne dit pas que des conneries), "un mélange d'Indiana Jones et du Seigneur des Anneaux".

Le scénario de ce "Tintin" s'inspire principalement de deux albums : Le Crabe aux pinces d'or et Le Secret de la Licorne. Presque aucun élément du Trésor de Rackham le Rouge ici, si ce n'est la découverte, dans les dernières minutes du film, d'une partie du trésor dans un globe terrestre au pied de la statue de saint Jean l'Évangéliste, dans les caves du château de Moulinsart. La raison de ce choix d'albums à été expliquée en long et en large : le capitaine Haddock ne pouvait pas débarquer dans le film comme par enchantement, sans aucune racine, car le public (surtout américain) n'aurait rien pigé (ha bon ? Pourquoi ?) ; il fallait donc prendre le temps d'expliquer la genèse de l'amitié entre lui et le jeune reporter, amitié qui débute effectivement dans Le Crabe aux pinces d'or.

En entrant dans la salle, je n'ai pas trop d'inquiétude : la plupart des critiques que j'ai lues affirment que la trame des deux bandes dessinées a été respectée et que les scénaristes ont créé une histoire qui tient la route. Avant la séance, je me demandais néanmoins par quelle magie ils avaient réussi à assembler ces deux récits qui n'ont somme tout que des liens très ténus (l'un traite du trafic d'opium ; l'autre de la recherche d'un trésor de pirate), mais je leur faisais globalement confiance. J'imaginais que la première moitié du film serait consacrée à la rencontre Haddock-Tintin dans Le Crabe au pince d'or, puis qu'on n'entendrait plus du tout parler du Maroc, d'Alan, du Karaboudjan ou d'Omar Ben Salaad, afin de se concentrer sur l'intrigue du Secret de la Licorne. Force est de constater que je n'avais rien compris ! Dans ce film, la chronologie des albums n'est pas du tout respectée ; au contraire, elle est entièrement démantibulée et reconstruite... Un peu comme si des scénaristes fous avaient arraché chacune des pages des deux albums, les avaient mélangées de manière aléatoire et pondu une histoire sur base du résultat... 
C'est bien joli de tout mélanger mais c'est oublier que, derrière une simplicité apparente, les scénarios d'Hergé (à l'exception des premiers) sont tous de petites merveilles de construction épurée. C'est aussi oublier que chaque album contient son univers propre, son ambiance particulière. Dès lors, je ne comprends pas comment un tintinophile peut ressortir de ce film et dire qu'il l'a adoré, car Spielberg n'a a priori strictement rien compris à une BD de Tintin.

L'intrigue : un patchwork surréaliste

L'histoire proposée ici est la suivante : Tintin achète sur une brocante la maquette d'un bateau ("La Licorne") que deux collectionneurs veulent immédiatement lui racheter. Il se rendra vite compte, après le cambriolage de son appartement, que La Licorne renferme un secret dans un de ses mâts : un parchemin qui – Tintin le comprendra plus tard – mène à la cachette du trésor du pirate Rackham Le Rouge. Jusque là, rien de neuf. 
Après, ça se complique : Spielberg a besoin d'un grand méchant (c'est plus fort que lui, il ne peut pas s'en empêcher). Il décide donc de donner ce rôle à Monsieur Sakharine, un collectionneur qui dans la BD n'a qu'une importance secondaire. Dans le film, Sakharine devient le "méchant pas beau" attitré, qui fera tout pour récupérer les trois parchemins. Plus fort encore : il s'avérera que Sakharine est le descendant de Rackham le Rouge (oui, oui !) et que toutes les actions qu'il pose sont en fait liées à une sombre histoire de vengeance contre le descendant du chevalier de Hadoque (le capitaine Haddock donc). 
Et le troisième parchemin, où se trouve-t-il ? Chez les Frères Loiseau à Moulinsart ? Que nenni ! Ces deux-là, pourtant essentiels à l'intrigue dans la BD, ne sont même pas mentionnés une seule fois dans le film. À la place, nous avons droit à une histoire tirée par les cheveux : la troisième Licorne et son parchemin sont détenus par... Omar Ben Salaad (!), dans une glace sécurisée, au sein d'un palais marocain de pacotille qui ressemble à un décor hollywoodien.
La rencontre avec le capitaine Haddock ? Elle se fait bien dans le bateau "Karaboudjan", comme dans Le Crabe aux pinces d'or. Haddock est le capitaine de ce navire mais le véritable maître à bord est Sakharine (le méchant machiavélique) aidé par Alan, le second du capitaine. La façon dont Tintin arrive à déduire que le Karaboudjan a un quelconque rapport avec son histoire de parchemin de La Licorne est rocambolesque... Barnabé (l'homme de main des Frères Loiseau dans la BD) est mitraillé devant la porte d'entrée de l'immeuble où habite Tintin. Dans la BD, gravement touché, il a juste le temps de montrer des oiseaux dans la rue (pour désigner les Frères Loiseau, mais Tintin ne comprend pas sur le coup) ; dans le film, il utilise son sang, un peu à la manière de "Omar m'a tuer" (haha !) pour marquer, une à une, les lettres "Karaboudjan" sur un journal. Bigre ! Tintin est très fort et comprend tout de suite. Ce passage, comme tant d'autres dans le film, est d'une absence complète de crédibilité. On a l'impression que Tintin avance grâce à des indices qui lui tombent du ciel juste quand il le faut : à chaque blocage, un deus ex machina... Tout le film, linéaire comme une borne d'arcade, est construit sur ce principe.

Dois-je continuer la liste des stupidités scénaristiques ? Oh oui, rigolons encore un bon coup ! (Personnellement, j'étais plié en deux dans mon siège tellement je trouvais certaines scènes totalement ridicules.) Un capitaine Haddock au regard à la limite de l'idiotie rotant de l'alcool dans un réservoir (!) pour faire redémarrer le moteur d'un avion (gné ?)... Un abordage survitaminé avec un bateau pirate en feu, en posture horizontale, faisant un "salto arrière" au-dessus de La Licorne... Plus tard, chez Omar Ben Salaad, un récital de la Castafiore (mais qu'est-ce qu'elle vient faire là, celle-là ? Passons...). Sa voix extrêmement aiguë casse la vitre sécurisée contenant La Licorne tant convoitée (une référence inversée au Sceptre d'Ottokar ?)... À ce moment, Sakharine, en hauteur, lance un oiseau domestiqué perché sur son épaule (pffff...) casser le mât du bateau et récupérer le précieux parchemin... Une scène de démolition totale de la ville de Bagghar, démolition dont Tintin se fout royalement (encore un rappel d'Indiana Jones)... Plus tard encore, Tintin fuyant en side-car, avec un capitaine Haddock armé d'un... bazooka (re-pffff). Ridicule ? Oui, mais il y a pire encore : à la toute fin, nous retrouvons Haddock en plein combat de grues (!) avec Sakharine (mais où vont-ils chercher tout ça ?)

Peut-on encore après cela, en toute honnêteté, oser ne fut-ce que mentionner le respect de l'œuvre originale ? Non, on ne peut pas. Ce bidule n'a plus rien à voir avec Tintin. Mais je vais être gentil et tolérant et rectifier la phrase : ce bidule n'a plus rien à voir avec mon Tintin (celui qui a bercé mon enfance). Peut-être ceux ne connaissant pas bien l'univers d'Hergé apprécieront bien mieux que moi ce déluge d'effets spéciaux ?


Et Hergé dans tout ça ?


Que reste-t-il, dès lors, de l'esprit "Hergé" dans ce mélange indigeste ? Hé bien pas grand chose, si ce n'est quelques "tableaux" plus authentiques que les autres : la scène du marché aux puces, celle du capitaine Haddock et de Tintin dans le désert, ou encore les passages avec Aristide le cleptomane, clairement réussis.

Pour le reste, Spielberg, tout au long du film, essaiera de nous montrer : 1) qu'il a bien lu tout Tintin (c'est bien, gamin, t'auras un caramel mou !), en mettant dès que c'est possible des références lourdingues aux autres albums, extérieures au contexte narratif général (un exemple : la scène où le capitaine Haddock tente de boire dans un avion en chute libre une bulle de whisky en apesanteur, comme dans On a marché sur la Lune) ; 2) qu'il maîtrise à donf la technique de la "performance capture" : regardez les gars, la caméra bouge dans tous les sens, je filme des contre-plongées de la mort qui tue et je n'ai même pas peur !

Quel gâchis de ne pas avoir exploité ce procédé au service d'une intrigue qui tienne la route ! Au regard de la réussite de certaines rares scènes, je me dis, à la sortie du film, qu'un autre long métrage que celui-ci était possible. Le génie d'Hergé dans Le Secret de la Licorne a été de captiver (ou pas ?) son lectorat avec une histoire qui se déroule en grande partie à Bruxelles et à Moulinsart, de le faire voyager avec une grande économie de moyens. En lisant cette BD, j'étais pourtant transporté ailleurs... Spielberg, quant à lui, ne m'a transporté nulle part...

À la sortie de la séance, Walter nous demande : "Alors, vous avez trouvé ça comment ?" (Walter adore ce "Tintin" : c'est la seconde fois qu'il le voit). Moi : "Ben écoute, franchement, les deux premiers mots qui me viennent à l'esprit sont : bouse infâme. C'est dire !". Léandra : "Je n'aime pas trop les histoires de Tintin, je n'ai donc pas un avis de tintinophile sur le respect ou non des albums, que je ne connais pas vraiment. Mais j'ai trouvé que c'était un navet !". Quant à Andrew, il n'a pas aimé non plus. Misère !

Une idée pour le prochain film de Spielberg : reprendre Johan et Pirlouit de Peyo et remplacer biquette par un T-Rex, le vieux roi par Aragorn et réaliser une scène finale où le mage Omnibus détruit l'armée du méchant avec un sort contenant au moins quatre minutes d'effets spéciaux non-stop. Si on ne fait pas ça, les Américains ne vont rien comprendre, voyons ! Ouais, ouais, c'est ça, Steven, c'est ça ! (Gros soupir.)

Tchoutchou !

Ma fille me réveille à 8 heures du matin. Elle a dormi dans la voiture d'Emily durant tout le trajet de retour d'hier et par conséquent a déjà récupéré de l'éreintant week-end à Disneyland® Paris... Pour ma part, j'aurais bien dormi quelques heures de plus.

Gaëlle a faim et il n'y a plus rien du tout à manger dans mon appartement : ni pain, ni biscuit, ni céréales (père indigne !). Je décide donc de l'emmener de bon matin à l'EXKi de la Gare du Midi, avant de prendre le train vers chez mes parents. Je suis toujours estomaqué par les prix pratiqués au sein de cette chaîne de restauration bio/bobo : 7 euros environ pour deux pains au chocolat, un petit jus de fruit, un café et une brioche minuscule... Pourquoi t'y retournes, alors, Hamilton ? Peut-être parce que tout y est bon (à l'exception des germes de soja pour végétalien totalement immangeables) ?

Nous prenons le train de 10h07 vers chez mes parents. Pour leur faire une surprise, Gaëlle enfile dans le wagon sa robe de Cendrillon en tulle achetée hier et, pour augmenter encore d'un cran le ridicule du déguisement, décide de porter ses oreilles de Minnie. Ça fait sourire les voyageurs.

À la maison familiale, ma grand-mère, ma tante, mon père et ma mère lui posent des questions sur son voyage au Pays des rêves™. Elle reste très évasive sur le sujet. Quand on lui pose une question précise (comme : "T'as fait quoi à l'école aujourd'hui ?"), elle n'y répond que très rarement. Si elle répond, c'est toujours de manière très concise et pas très intéressée par le sujet, comme si elle répondait à un questionnaire obligatoire.
– Alors, tu t'es bien amusée à Disneyland® ?
– Oui, oui...
– Et t'as fait quoi ?
– Ben je suis allée à Disneyland®...
– Oui, mais comme attraction ?
– Euh... [Très longue pause] La Maison hantée ?

En fait, c'est en grande partie moi qui explique en long et en large à mes parents comment s'est déroulé ce week-end à Disneyland®. Dans l'histoire, c'est moi l'enfant émerveillé : (à mon père) "Y a des montagnes russes de malade, là-bas... T'aurais adoré ! Et un ascenseur d'hôtel qui tombe en chute libre ! Tu te rends compte ? Ils sont fous !" ; (à ma mère) "On a été manger dans une resto pirate qui reconstituait l'ambiance d'une nuit aux Caraïbes... C'était totalement dingue !" ; (à tout le monde, les larmes aux yeux) "Vous auriez vu Main Street, avec le château de la Belle au Bois dormant à l'arrière et le petit train qui faisait 'Tchoutchou' ! Rhalala, mais qu'est-ce que c'était beau !". J'ai rendez-vous chez un psychiatre spécialiste de l'addiction Disney fin novembre.

Mes parents me reconduisent à la gare avant de ramener Gaëlle chez sa maman en fin d'après-midi. Et c'est reparti pour un voyage en train, sauf que celui-ci ne fait pas "Tchoutchou".

De retour à Bruxelles, je me rends à la Maison du Peuple de Saint-Gilles pour écrire. Emily est là, avec son ordinateur, à la "table habituelle". Elle doit absolument travailler sur une de ses conférences pour le boulot. Dans un sens, ça m'arrange bien qu'elle ait du travail car il faut que je décrive absolument notre voyage à Disneyland®... J'ai pris le parti de tout décrire et ça me prend un temps démesurément long pour pas grand chose. Au départ, je comptais publier deux articles : un premier texte élogieux et un second texte en miroir, très critique. J'ai cependant changé d'avis en dernière minute et décidé de procéder par demi-journées en demi-teintes, en appliquant à chaque paragraphe un système de signes un peu con (je m'en rends compte en terminant le premier texte) symbolisant mon état d'esprit du moment. Je devrai donc écrire en tout quatre textes (lointain parallèle avec les quatre "lands" visités) et, ce lundi soir, je suis encore très loin d'avoir fini.

Je suis dans un goulet d'étranglement, j'accumule du retard sur mes articles journaliers. Vais-je retomber un jour sur mes pieds ? Parviendrai-je à décrire chaque journée sans en bâcler une seule ? En tout cas, il est hors de question que j'abandonne l'écriture d'un article en cours de frappe faute de temps ! C'est clairement quelque chose qui ne me ress
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Schizophrénie chez Walt Disney (4/4)

Résumé de l'épisode précédent : après un (petit-)déjeuner made in Disney, nous nous rendons de bonne heure au parc Walt Disney Studios®. L'occasion pour Emily, Walter et moi de tester une attraction phare du parc : la Tower of Terror, un ascenceur fou "descendant plus vite que la gravité". L'occasion aussi pour nous de boire un café Disney totalement répugnant et d'imaginer Sexland®, le pendant (sans mauvais jeu de mot) sexuel du parc Disneyland®. Nous terminons notre rapide visite des studios par le Studio Tram Tour, une plongée dans l'univers des décors de films et des effets spéciaux. Début d'après-midi, nous regagnons le parc Disneyland®, plus particulièrement le Blue Lagoon, le restaurant pirate, yohoho !

Un restaurant en extérieur à l'intérieur

[+] Je suis sans doute beaucoup trop émotif, mais j'ai vraiment été impressionné par ce restaurant. Le concept est génial : nous nous trouvons à l'intérieur d'un bâtiment (le grand hangar qui contient l'attraction Pirates des Caraïbes), mais l'endroit où l'on mange est uniquement constitué d'une terrasse (un extérieur donnant sur un intérieur). Après un petit temps d'attente à l'entrée du restaurant (nous avons réservé mais le Blue Lagoon est apparemment très couru), un serveur-pirate s'occupe de nous et nous installe à une table donnant directement sur le retour des embarcations de l'attraction. De temps en temps, des jeunes adolescents dans les barques nous lancent des "Bonjour !" enthousiastes et légèrement moqueurs.

[-] D'un point de vue marketing, ils ont réussi leur coup, ces salauds de chez Disney : quand on est dans l'attraction, on a une vue sur la fameuse terrasse et tout est fait pour donner l'envie d'y réserver une table.

[+] C'est terrible : tous les détails du restaurant sont extrêmement soignés : les fausses lanternes qui diffusent une lumière tamisée, les bougies, les tables, les palmiers, les fausses lucioles au loin dans la jungle, le bruit des grillons et des grenouilles (!). Une fausse nuit permanente vachement bien foutue donc. Niveau nourriture, ça change de tout ce qu'on a pu voir/manger jusqu'ici : le service se fait à table et les plats sont d'un niveau nettement supérieur. C'est une sorte de "restaurant gastronomique à la Disney". Le menu est plus cher, évidemment (39 euros pour le "Coffre du capitaine"), mais comparativement aux autres restaurants (12 euros environ pour de bêtes fajitas même pas bonnes), nous sommes gagnants. Pour ma part, je prendrai de l'espadon fumé "Boucanier" en entrée, un "Talisman jamaïcain" (3 médaillons de veau délicieux) et un café gourmand. Si l'on veut quelque chose de plus sexuel (ça y est : il recommence !), il faut embarquer avec la "Caresse antillaise", continuer avec le "Désir de dorade" et terminer avec "La banane dans tous ses états" (ça existe vraiment !). C'est tellement gros que nous nous demandons si ce n'est pas fait exprès.

[/] Léandra trouve que cette pause-midi est trop longue : ça l'emmerde et elle ne semble pas très heureuse d'être là. Quant à Gaëlle, elle dessine sagement mais ne mange quasiment pas. 

Autopia et le Carrousel de Lancelot

[/] Après le restaurant pirate, nous testons Autopia, une attraction où nous conduisons des voitures à une vitesse ridiculement basse. Conduire est un grand mot : la voiture est fixée à un système de rail unique et il s'agit simplement d'appuyer sur l'accélérateur et de tourner le volant si nous le désirons, sans que ce geste ne change réellement la trajectoire. Gaëlle embarque avec Emily, Léandra avec Walter et moi avec Andrew (mon "frère ennemi", etc.). Nous traversons un "circuit modèle", avec sa flore et sa ville utopique, baptisée "Solaria".
[-] D'après Wikipédia, la définition exacte d'Autopia est "un endroit où la ville, la nature et les autoroutes vivent en parfaite harmonie". C'est un thème hérité de la vieille science-fiction, de films comme Métropolis de Fritz Lang (1927) dans lequel des routes parcourent une mégapole futuriste dans tous les sens. La ville, la nature et l'autoroute vivant en parfaite harmonie : je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer...

Métropolis

[/] Après Autopia, Gaëlle et moi nous séparons du reste du groupe. Ma fille veut faire un tour sur le Carrousel de Lancelot. Il y a des dizaines d'attractions délirantes pour les enfants de son âge dans le parc, mais elle veut faire une file d'une demi-heure pour un bête carrousel de foire, avec ses éternels chevaux et carrosses ? Une confirmation supplémentaire de la "théorie de l'emballage cadeau" : donnez un cadeau extraordinaire à un enfant et il jouera avec l'emballage.

Voyage en hyperespace

[/] Après avoir été ridicule pendant quelques minutes sur un petit cheval aux côtés de ma fille, je retrouve les autres pour la dernière attraction du séjour, et non la moindre : Star Tours. Le concept : nous faisons la file dans un spatioport pour effectuer un voyage touristique vers une lune d'Endor. Le problème : une fois dans le vaisseau, le droïde RX-24 qui le conduit n'est pas très expérimenté et le pilote avec une maladresse inouïe.

[-] (Encore un droïde stupide issu de l'univers de Star Wars. La société dépeinte dans cette saga semble de prime abord  hautement technologique mais – énorme paradoxe – n'est jamais capable de créer une intelligence artificielle digne de ce nom : R2-D2 ne sait pas parler, C-3PO sait à peine marcher et RX-24  est censé avoir été créé pour piloter mais ne sait justement pas piloter.)

[+] Cette vieille attraction (1992) est géniale à tout point de vue : il s'agit d'un simulateur de vol performant qui nous fait ressentir en temps réel les mouvements que nous observons sur un écran situé juste en face de nous. RX-24, notre pilote, fait connerie sur connerie : il frôle les murs de la station spatiale ainsi qu'un nombre impressionnant de vaisseaux de combat ennemis. Il se trompe également de chemin, nous faisant assister à la destruction de l'Étoile de la Mort par des vaisseaux de type "X-wing". Lors de deux passages en hyperespace, nous sommes scotchés à notre siège. Gaëlle, encore une fois, rit aux éclats et, à la sortie de l'attraction, me demande si nous sommes réellement allés dans l'espace. Je n'arriverai jamais à savoir si la question était on ne peut plus sérieuse ou bien si Gaëlle voulait simplement y croire

[*] Mais comment cela fonctionne-t-il ? Est-ce que le compartiment dans lequel nous nous trouvons se déplace légèrement dans une sorte de hangar ou bien reste-t-il statique ? Je me pose la question car les "déplacements dans l'hyperespace" nous collent gentiment à nos sièges pendant quelques secondes, comme si nous sentions l'effet d'une véritable accélération. La réponse : nous nous trouvons dans un simulateur de vol ; aucun déplacement donc, juste des inclinaisons sur trois axes, grâce à un système de vérins hydrauliques. Pour créer cette attraction, Walt Disney Imagineering (le nom des concepteurs Disney) a acheté des simulateurs à l'armée américaine ($500.000 l'unité), qu'ils ont transformé pour les besoins de l'attraction. J'apprends également que la sensation d'accélération lors du passage en hyperespace est simulée d'une manière toute bête : rapidement, via le système de vérins, le nez du simulateur pointe vers le ciel et la queue vers le sol, et la gravité fait le reste : elle nous colle à notre siège. N'ayant pas de référentiel spatial extérieur à la capsule, notre cerveau imagine une accélération...

Parade et shopping

[+] Le séjour touche à sa fin. Nous nous dirigeons vers Main Street pour voir la parade, cette fameuse parade dont tout le monde me parle depuis tant d'années (j'ai tendance à exagérer). Elle passe devant une foule compacte et docile. Je m'attendais à un défilé de majorettes et de pom-pom girls mais nous en sommes très loin. La parade Disney est faite de chars sur rail et, de nouveau, force est de constater que c'est très bien foutu. Chaque char est thématique : le char du Roi Lion, le char des ténèbres (avec un impressionnant démon noir qui rejette de la fumée), le char des princesses qui font des saluts mielleux... Gaëlle, sur mes épaules puis sur celles d'Andrew, est subjuguée.

[/] Après la parade, sur Main Street, nous formons deux groupes : d'un côté Léandra et Andrew qui vont faire les magasins pendant une petite heure ; de l'autre Emily, Walter, Gaëlle et moi qui allons faire les magasins aussi, mais en très grande vitesse, pour ensuite aller nous reposer à la terrasse d'un café.

[-] Je n'ai pas encore mentionné ce que Gaëlle a acheté durant ce séjour. C'est le moment ou jamais... Ma fille a reçu de ma famille un pécule conséquent (200 euros) pour acheter de la camelote de chez Disney. Elle a donc pu grosso modo recevoir ce qu'elle voulait recevoir. Son butin est le suivant :
- une longue-vue de pacotille ;
- un médaillon pirate de pacotille ;
- un pistolet pirate de pacotille ;
- un gobelet "Ariel la petite sirène" de pacotille ;
- une paille Mickey de pacotille ;
- des oreilles de Minnie (offertes par Léandra) ;
- des oreilles de Minnie différentes ;
- un appareil lumineux ridicule ;
- un petit robot-chien ridicule ;
- une robe de Cendrillon (46€, hé ouais !).

[-] Je ne supporte pas ces magasins de Main Street noirs de monde, remplis d'individus qui se marchent sur les pieds et qui tendent tous vers ce même but idiot : acheter ce putain de tee-shirt Disney "spécial Halloween". Je veux partir loin, loin, très loin de cet endroit.

[/] Nous retrouvons Andrew et Léandra à l'entrée du parc. Direction la voiture, direction Bruxelles. Le rêve est terminé.

* * *

Dans la voiture d'Emily, sur le chemin du retour, Gaëlle s'endort presque immédiatement. Elle dormira durant la majorité du trajet, à tel point que je resterai dans la voiture avec elle pendant l'arrêt sur une aire d'autoroute.

Durant le trajet de retour, c'est la musique d'Emily qui passe dans la voiture. À un moment, nous entendons la très connue "Stairway to Heaven" de Led Zeppelin. Emily : "J'adore cette chanson, du début jusqu'à la fin". Moi : "C'eût été mieux s'ils s'étaient interrompus vers la quatrième minute". D'autres chansons rock passent. Je trouve qu'elles contiennent des envolées de guitares superfétatoires (il était temps que je la place, cella-là). Certaines des mélodies entendues me font penser à Queen (c'est une obsession !), avec leurs solos de guitares qui ne servent à rien. Emily remarque à raison : "En fait, tu as de sérieux problèmes avec les solos de guitare". Moi : "Non, ce n'est même pas vrai : je n'aime pas les solos sans raison". Puis, enfin, la délivrance : nous entendons "Where Is My Mind?" des Pixies. Moi : "Ha ! Voilà un air qui tient debout, sans fioriture !" Sorti en 1988 s'il vous plaît ! Une longueur d'avance ! Cerise sur le gâteau : la chanson clôture à merveille ce long week-end Disney, en posant la question qui fâche : "Où est passé mon cerveau ?"